Sesanga veut dissoudre le CNSA quand Olenghankoy est accusé de détournement
  • ven, 12/06/2020 - 04:51

KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1488|VENDREDI 12 JUIN 2020.

Le député Delly Sesanga Hipungu Dja Kaseng connu pour sa production législative propose de dissoudre le CNSA, Conseil national de suivi de l’Accord et du processus électoral.
Le 8 juin, l’ancien secrétaire général du parti MLC de Jean-Pierre Bemba Gombo nommé ministre du Plan du régime 1+4 pour six mois, du 24 mars au 10 octobre 2006, pour le compte du même parti après avoir été directeur de cabinet du gourou du mouvement rebelle de l’Equateur alors un des quatre Vice-présidents de la République, a transmis à la Présidente de l’Assemblée nationale Jeannine Mabunda Lioko une proposition de loi organique abrogeant la loi organique n°18/023 du 13 novembre 2018 qui porte institution, organisation et fonctionnement du Conseil national de suivi de l’Accord et du processus électoral.

Député de la circonscription de Luiza, province du Kasaï Central, Delly Sessanga qui a depuis créé son propre parti, L’Envol de la Rd-Congo, estime que la mission du CNSA mis en place au lendemain de l’Accord politique global et inclusif signé le 31 décembre 2016 intervenu après celui dit de la Cité de l’Union africaine du 18 octobre 2016, «ne se justifie plus» et «n’a plus lieu d’être» dès lors que des «institutions politiques légitimes et pérennes chargées de la gestion du pays et du processus électoral», ont été mises en place.

3 MILLIONS DE $US DETOURNES.
L’accord du 31 décembre 2016 dit aussi de la Saint-Sylvestre signé dans la Capitale au centre inter-diocésain par des représentants du pouvoir et de l’opposition qui donna lieu à la nomination du gouvernement Tshibala, avait conçu «un mécanisme spécifique de suivi du processus électoral» par la création du CNSA voulu comme «une institution d’appui la démocratie».

Cet ancien de France, diplômé d’études comptables et financières, admissible à l’oral du cycle international de l’ENA à Paris, avocat et conseiller juridique des sociétés des services et consultant à l’UNESCO, explicite que le CNSA fut un «mécanisme défini comme conjoncturel par le législateur» et qui a conduit à l’adoption de la loi organique n°18/023 du 13 novembre 2018 portant institution, organisation et fonctionnement du Conseil national de suivi de l’Accord et du processus électoral. Or, des élections générales ont été organisées en 2018 et 2019, la présidentielle, les législatives nationales et provinciales, les sénatoriales de même que celles des gouverneurs de provinces.
L’élu de Luiza articule aussi son raisonnement par la nécessité de réduction du train de vie de l’Etat et de la rationalisation du fonctionnement de l’Etat, estimant que la règle doit être désormais «la dissolution et la liquidation des structures devenues obsolètes».

Selon Sesanga, si le CNSA avait été en 2020 budgétisé à CDF 1 milliard, l’exécution du budget l’a été à 207% au premier trimestre 2020, soit un «glissement manuel» d’environ CDF 2 milliards.
La proposition de loi porte quatre articles. Le premier et troisième articles posent la question de la dissolution du CNSA. Le deuxième se rapporte au patrimoine de cette institution qui devra être «mis à la disposition des autres institutions par décret du Premier ministre délibéré en Conseil des ministres».

Une demande de dissolution qui survient en plein débat médiatique sur des accusations de malversations financières. Selon le rapport d’une organisation congolaise œuvrant dans le contrôle citoyen des finances publiques, ODEP, Observatoire pour la Dépense publique, le CNSA doit s’expliquer sur la destination de 3.087.630 $US «sortis du trésor public pour la prime et salaire des dix-huit membres, non actifs depuis plusieurs mois».
L’ODEP dénonce «une gestion calamiteuse (...) qui conduit à une remise en question de l’institution (...) aujourd’hui budgétivore, dont l’Etat rémunère des gens, qui ne travaillent pas». Selon ce rapport, sur six membres du bureau du CNSA, il n’en reste que trois : le président, la questeure (cousine du président), le rapporteur (un membre de la société civile). Quant à la plénière, organe de décision, elle n’a plus que neuf membres, qui ne peuvent siéger faute de quorum».

Au total sur vingt-huit membres dont est composé le CNSA, il n’en reste aujourd’hui que dix-neuf mais neuf siégeraient actuellement. Outre nombre de parties prenantes qui ont refusé de désigné des membres (UNC, MLC, CENCO), plusieurs autres appelés à d’autres fonctions n’ont jamais été remplacés.
Comme Sesanga, l’ODEP s’interroge sur «l’importance de cette institution à l’heure où le pays fait face aux problèmes des moyens financiers, pour lutter contre le coronavirus». L’ODEP s’intéresse aussi au siège du CNSA, au n° 218, avenue Lukusa. Il s’agirait de l’une des propriétés de son président, Joseph Olengha Nkoy Mukundji, qui y sous-loge le CNSA «en violation de la loi quand dans tous les documents officiels, il renseigne l’adresse du Palais du Peuple/Salle des banquets, commune de Lingwala». L’ODEP dénonce l’usage de faux. Proche de l’alors Premier ministre Bruno Tshibala Nzenzhe, Joseph Olengha Nkoy Mukundji s’éloigna de lui au lendemain de la mise sur pied du CNSA, le 22 juillet 2017. Une violente polémique née après le refus du CNSA de reconnaître l’aile de l’UDPS pilotée par le chef du gouvernement Bruno Tshibala Nzenzhe.
D. DADEI.

Le réquisitoire de l’ODEP contre Olenghankoy.
Selon l’ODEP, depuis l’installation du CNSA, il ressort qu’entre 2017 et 2019, l’institution a bénéficié du trésor public un montant de 7.805.327 $US contre les prévisions de 17 073 994 $US, soit 45,71%. Selon les états de suivi budgétaire du ministère du Budget de la période précitée, deux rubriques budgétaires ont été suffisamment financées : dépenses de fonctionnement et interventions économiques, sociales, culturelles et scientifiques. Pour payer ses membres, le bureau prélevait une quotité des fonds alloués au fonctionnement, sur base d’une liste de présence aux plénières. Une prime de prestige de 8,800 millions de FC (5.216 $US) est octroyée à chaque membre, soit une enveloppe mensuelle d’environ 24,640 milliards de FC (146.058 $US).

Selon l’article 51 al. 3 de la loi relative aux finances publiques, «aucun virement ni transfert ne peut être effectué au profit du titre des dépenses de personnel à partir d’un autre titre». Ce qui constitue une violation de la loi.
Toutefois, le salaire a commencé à être payé en septembre 2019, deux ans après la mise en place du CNSA. Selon les états de suivi budgétaire, de septembre 2019 à avril 2020, environ 818.250 $US ont été décaissés pour le compte de la rémunération du personnel du CNSA, (409.125 $US de janvier à avril 2020). A qui est destiné ce fond, alors qu’il en reste que 9 prestataires? La prime et le salaire continuent à faire l’objet des querelles internes au sein du CNSA entre le président et le groupe de 10 membres, anciens candidats aux dernières élections législatives de décembre 2018. A ce jour, seul un effectif de 9 membres est rémunéré chaque mois, soit un crédit de 43.137 $US sur une enveloppe mensuelle d’environ 146.058 $US, soit 32,14%. L’écart entre le montant payé et celui décaissé par le trésor public par mois est de 102.921 $US, soit 3.087.630 $US en trente mois, pour lequel la destination doit être prouvée et justifiée.

Après un conflit sur les primes des membres de la plénière engagés aux élections de 2018, le président du CNSA a saisi le 21 juin 2019 le conseil d’Etat qui l’a autorisé à ne pas les payer. Mais le trésor public a continué à décaisser mensuellement les fonds pour la prime de tous les 29 membres. Mais depuis les élections de décembre 2018 à ce jour, les 10 membres totalisent 19 mois d’impaiement. Le bureau du CNSA dit avoir obéi aux instructions de l’ex-ministre du Budget Pierre Kangudia, qui avait autorisé la liquidation du paiement sur base d’une liste de prestation. Dès lors que ces membres ne prestaient plus, ils n’étaient pas éligibles à la prime. Avant tout paiement, celui-ci validait les listes de prestations. Nous estimons que dès sa notification par le conseil d’Etat en date du 19 novembre 2019, le bureau du CNSA devrait reverser ces reliquats de 3.087.630 $US au Trésor public. Malgré le rappel de l’ancien ministre des Finances Henri Yav qui a ordonné le paiement de ces 10 membres, le CNSA a continué à l’utiliser à d’autres fins.

L’ODEP prie le Président de la République au titre de garant du bon fonctionnement des institutions, de dissoudre le CNSA, au Parlement de convoquer en urgence son président pour rendre compte «au peuple congolais de la gestion de l’institution» et aux cours et tribunaux de se saisir d’office du dossier CNSA.


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