Explosion d'étrangers irréguliers au Congo sur fond de Covid et de guerre de visas
  • mer, 01/09/2021 - 19:58

KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1533|MERCREDI 1 SEPTEMBRE 2021.

La DGM, la Direction Générale de Migration du Congo a réalisé, fin juin 2021, des délivrances des visas record. 12,3 millions de $US récoltés sur des prévisions semestrielles de 5,3 millions.

En six mois, les assignations de l’année ont bondi, avec un taux de 115,8%, selon la DGRAD, la Direction Générale des Recettes administratives et domaniales. Notre pays figure dans le peloton des Etats africains les plus fréquentés quand la France, la Belgique et certaines capitales occidentales l'avaient black-listé suite à l’implosion, se justifiaient-elles, du variant Delta de coronavirus.

Bémol ! Des faisceaux d’indices donnent à croire que de nombreux irréguliers se sont également faufilés dans le pays. Les visas d’établissement, d’établissement spécial, permanent, ordinaire ou de travail ainsi que des titres de validation de prise en charge et ceux inhérents à la prorogation de séjour des étrangers porteurs de laissez-passer des pays limitrophes demeurent les plus sollicités depuis le début de la pandémie en 2019.

Toutes les démarches menées par Le Soft International pour avoir les chiffres exacts des mouvements étrangers ayant séjourné et/ou venus s’installer depuis début 2021 ou encore depuis mars 2020 quand la pandémie a été officiellement déclarée en RDC n’ont guère été couronnées de succès.

LE CHACUN POUR SOI ENTRE LA DGM ET LES AMBASSADES.
Mais le calcul de probabilité effectué sur base de types de visas délivrés établit qu’entre janvier et juin 2021, au moins 150.000 étrangers ont séjourné et/ou se sont établis dans le pays. Entre la DGM et nos ambassades, c’est le régime du chacun pour soi.

Cependant, un parfait désordre, l’on dirait, bien structuré domine le secteur de migration. La collaboration est loin d’être le point fort des rapports entre la DGM et la soixantaine des missions diplomatiques à l’étranger. C’est du chacun pour soi en matière de délivrance des visas.
«A ce jour, lit-on dans un rapport de la DGM daté de juin 2020, faute de moyens (financiers, Ndlr), aucun agent de la DGM n’est présent dans les représentations diplomatiques de la RDC tel que prévu à l’article 14 du Décret-loi n°002/2003 du 11 janvier 2003 portant création et organisation de la DGM. (…) Par ailleurs, la circulaire n°003/CAB/ME/MINBUDGET 2016 du 18 juin 2016 recommande l’uniformisation des visas dans toutes les missions diplomatiques ».

Hélas, en marge de récentes Conférences budgétaires portant sur le budget 2022, un expert des Affaires étrangères a reconnu «l’absence d’un mécanisme de contrôle du nombre des visas accordés par les postes diplomatiques et consulaires, de l’insuffisance des crédits budgétaires accordés aux postes diplomatiques occasionnant ainsi la consommation à la source des recettes recouvrées».
Du même ministère, un autre document en notre possession fait état d’«absence d’un acte juridique formalisant l’organisation et le fonctionnement de la Commission Nationale d’Octroi des visas d’entrée en RDC (CNOV) émanant des Ambassades de la RDC à l’étranger».

En outre, la guerre de quotas, permis de séjour des étrangers en zones minières, quota que se livrent Kinshasa (ministères de l’Intérieur et Mines) et les provinces ne permet pas à l’Etat de disposer de statistiques fiables des expats surtout des Chinois qui se sont rués dans l’arrière-pays. Ces expats qui échappent à tout contrôle.
Quatre cas de figures parmi tant d’autres sont mis en exergue pour se rendre compte du coulage des recettes dans la délivrance de visas, et par ricochet, de l’incurie dans la gestion du flux migratoire : au 30, rue Marie de Bourgogne, à Bruxelles, 1000, l’ambassade congolaise auprès du Royaume de Belgique, des Pays-Bas et du Luxembourg ainsi que de l’Union européenne, les prix du visa pour se rendre en RDC varient de 85 à 310 euros. Ils sont majorés de 25 euros pour toute demande express.

Alors qu’à Beyrouth, au Liban, ou à Pékin en Chine, il faut au bas mot 235 euros pour obtenir le visa de 30 jours pour la RDC. Fort probable, suite à la crise financière qui rudoie le pays des Cèdres, beaucoup de Libanais candidats au départ pour l’Eldorado r-dcongolais, se feraient volontiers passer pour des ressortissants d’Iran qui compte parmi la quarantaine de pays dont les citoyens entrent en RDC sans visa.

Les originaires de la Région administrative spéciale de Macao de la République populaire de Chine, les Cambodgiens et les Népalais, facilement assimilables aux Chinois sont aussi exemptés de visa pour la RDC autant que les insulaires de Tuvalu qui passeraient volontiers pour des Indopakistanais.

LA DIRECTION DES MIGRATIONS DEPOURVUE DE MOYENS.
Faute de moyens financiers en 2020, la DGM a repris, pour 2021, toutes ses actions prioritaires dont l’identification et le contrôle de séjour des étrangers ainsi que le rapatriement des clandestins et irréguliers. A mi-août 2021, aucune de ces actions n’a connu un début de commencement.

L’on estime que trois expatriés sur cinq seraient en situation irrégulière en RDC. Autres actions : l’informatisation de la gestion des flux migratoires, le renforcement des moyens logistiques et la sécurisation de l’outil de travail : la DGM est parmi les rares services au monde qui utilisent encore le cachet humide, ce qui, naturellement, favorise la fraude, les entrées illégales. Pas seulement… L’expansion du Covid-19 et son variant Delta, fort probablement aussi.

A l’aéroport de N’Djili, selon un agent du ministère de la Santé, il est déjà arrivé que des véhicules s’avancent jusqu’au tarmac pour transporter des sujets expatriés dès leur descente d’avion. Le Programme national d’hygiène aux frontières (PNHF) est bien souvent ignoré par la DGM et autres services. Comme pour décourager et inciter les agents du service de Santé publique à quitter les postes frontières et frontaliers, certaines taxes relevant du domaine de la santé ont été désactivées au Sydonia World (Guichet unique sous gestion de la DGDA, service de douane).

Il s’agit notamment de la taxe de Désinfection, désinsectisation et la dératisation des véhicules routiers transfrontaliers (DDVR), la taxe sur le contrôle sanitaire aux postes frontaliers (contrôle des établissements classés, déclaration générale de santé des aéronefs, navires, caboteurs et les membres d’équipage ainsi que les passagers à bord), etc.
POLD LEVI MAWEJA.


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