- lun, 21/08/2017 - 07:22
Kabila sonne l’alerte générale et obtient l’accalmie.
C’est une alerte générale qu’a sonnée le Président de la République donnant lieu à une mobilisation de son équipe économique. L’économie congolaise est extravertie et peu diversifiée. Tributaire de la bonne tenue de nos produits d’exportation, elle n’a pu tenir face au choc externe notamment le ralentissement de l’activité économique mondiale impliquant la chute des cours de nos produits d’exportation, en tête, le cuivre. La réaction sur la monnaie nationale a été automatique. A cela, il faut ajouter des mesures d’anticipation rises par les opérateurs économiques et les investisseurs liées au contexte politique national délétère au lendemain de la tenue des deux Dialogues - celui de la Cité de l’Union Africaine et celui du Centre Inter-diocésain. Déjà, le taux de croissance du PIB réel était passé de 9,5% en 2014 à 6,9% en 2015 et, en 2016, il était à 2,4%.
A L’HORIZON LA BANQUEROUTE.
Quant au taux d’inflation annuel contenu autour de 1% à la même période 2014-2015, il a fait plusieurs bonds en avant et atteignait 23,6% en 2016. La monnaie, elle, passait à FC 1.707,34 FC pour un dollar américain en juillet, mettant le cap à FC 2.000.
Un an auparavant, le dollar s’échangeait contre FC 950. Si, ce ne fut pas la panique, l’inquiétude était réelle, la banqueroute à l’horizon, alors que, de toutes parts, des activités entières fermaient ou menaçaient de fermer.
Une situation qui remonte au début 2016. En juin et juillet 2017, face à ces niveaux de dépréciation du Franc par rapport au dollar américain - monnaie de référence s’il en est une dans nos échanges commerciaux au Congo - à en croire le ministre des Finances, Henri Yav Mulang, c’est le Président de la République lui-même, «au titre de garant de la Nation (...) qui a immédiatement sonné l’alerte et mobilisé le Gouvernement afin d’arrêter cette dépréciation, une des sources de l’inflation et de chercher à stabiliser la monnaie nationale». L’argentier national a fait cette déclaration samedi 19 août, lors d’une conférence de presse dans le hall de son cabinet, boulevard du 30 juin, à laquelle s’est joint le gouverneur de la Banque Centrale, Déogratias Mutombo Mwana Nyembo.
C’est la première conférence de presse de Henri Yav Mulang, plus soucieux de l’efficacité que du bling-bling verbal depuis qu’il est au Gouvernement depuis Matata-2 à Bruno Tshibala en passant par Samy Badibanga.
Lors d’une réunion du Bureau Politique de la Majorité Présidentielle présidée dimanche 20 août dans la ferme présidentielle de Kingakati, faubourg est de la Capitale Kinshasa, le Président de la République a fait venir exceptionnellement le ministre Yav Mulang, signe d’une réelle préoccupation de la situation des Finances publiques au niveau le plus élevé de l’Etat. Dans sa présentation, le ministre a explicité l’une de ces mesures d’urgence - à savoir, suspendre la quasi-totalité de paiements de l’Etat en vue de calmer le marché, fonctionner sur base caisse, ne dépenser que ce que l’Etat dispose dans sa caisse - prises lors d’un comité de pilotage stratégique du Gouvernement, «mis en place par le Chef de l’Etat lui-même sous la modération de son Directeur de Cabinet», le professeur Nehemie Mwilanya Wilkondja. Un véritable régime d’exception...
Nul doute, Joseph Kabila Kabange a, en l’espèce, eu recours à l’art. 69 de la Constitution de la République au terme duquel «le Président de la République (...) assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics et des institutions ainsi que la continuité de l’Etat», article qui, du coup, fait du Président de la République, le Garant de la Nation.
Lors de l’effondrement du Gouvernement Badibanga et face à l’urgence, Joseph Kabila Kabange avait eu recours aux mêmes prérogatives constitutionnelles en prononçant l’éviction du Premier ministre, lors d’un discours sur l’état de la Nation, devant les élus et sans attendre la démission du Chef du Gouvernement.
Responsable devant l’Assemblée nationale, le Premier ministre et son Gouvernement sont démissionnaires à la suite d’une motion de censure et après que le premier ministre, suite à cette destitution, eût présenté sa démission au Président de la République (art. 147)..
Le ministre s’est félicité des résultats atteints par ces mesures. Début août, le dollar qui avait atteint 1.707,34 FC s’échangeait contre 1.560 FC. Mais le resserrement budgétaire ne peut constituer une solution en soi. Le pays doit décréter la diversification économique, produire ce qu’il consomme, relancer le programme de parcs agro-industriels après l’échec du projet de Bukanga-Lonzo.
T. MATOTU.
…………………………………..
Lors de sa conférence de presse samedi 19 août, la première depuis qu’il est, depuis Matata-2 jusqu’à Tshibala en passant par Badibanga, l’argentier national, Henri Yav Mulang a affirmé que c’est le Président de la République Joseph Kabila Kabange lui-même qui, face à la dégradation du franc congolais sur le marché des changes, avait donné l’alerte générale et mis en place un comité de lutte. Le ministre des Finances a déclaré que le Chef de l’Etat était «déterminé de tout mettre en œuvre en vue de stabiliser la monnaie nationale, préalable à la relance de l’économie de notre pays». Ci-après son mot d’introduction.
«Comme vous pouvez bien vous en douter, les récentes variations de notre monnaie nationale, dont les premiers signes de dégradation ont commencé à se manifester dès les premiers mois de l’année 2016, n’ont pas manqué d’inquiéter et de susciter des commentaires au sein de l’opinion.Les niveaux de dépréciation du FC, par rapport au dollar américain, spécialement atteints aux mois de juin et de juillet derniers ont préoccupé plus d’un, à commencer par le Garant de la Nation Lui-même, j’ai cité le Président de la République, Chef de l’Etat, Son Excellence Joseph Kabila Kabange, qui a immédiatement sonné l’alerte et mobilisé, le Gouvernement afin d’arrêter cette dépréciation, une des sources de l’inflation et de chercher à stabiliser la monnaie nationale
Aujourd’hui, vous reconnaîtrez avec moi que cette mobilisation commence à donner des résultats encourageants et que, quoiqu’il faille intensifier et poursuivre les efforts déployés, on peut raisonnablement entrevoir l’arrêt progressif de la dépréciation et une stabilisation de la valeur de notre monnaie nationale. En effet, en considérant la moyenne mensuelle des taux de change pratiqués par les bureaux de change, on constate qu’après avoir atteint 1.707,34 FC pour un dollar américain en juillet, cette moyenne s’est presque stabilisée depuis début août à 1.560 FC le dollar.
Mais, ma présence ainsi que celle du Gouverneur de la Banque Centrale, ce jour, en ces lieux, n’a pas pour objet de venir célébrer une quelconque victoire.
Nous sommes là plutôt pour édifier, à travers la presse, l’opinion sur le niveau d’exécution par le Gouvernement des mesures, prises sous l’impulsion et avec les orientations personnelles de Son Excellence Monsieur le Président de la République, Joseph Kabila Kabange, à qui je rends mes hommages les plus déférents.
Et comme il est de notoriété publique que la stabilité de la monnaie et des prix des biens et services sont le résultat d’une bonne coordination des politiques budgétaire et monétaire, il nous a paru utile, au Gouverneur de notre Institut d’émission et à moi-même, de faire ce jour le point sur l’impact réel de la mise en œuvre de ces mesures sur la santé du franc congolais.
Je vous informe que le Gouverneur de la Banque Centrale et moi-même, sommes membres du comité de pilotage stratégique des mesures urgentes du Gouvernement, mis en place par le Chef de l’Etat lui-même sous la modération de Son Directeur de Cabinet, et travaillant de concert avec le Premier Ministre, Chef du Gouvernement. Ainsi, mon intervention sera axée sur les aspects relatifs à la gestion des Finances publiques et dans une certaine mesure à la relance de la production nationale, tandis que celle du Gouverneur de la Banque Centrale du Congo portera principalement sur la politique monétaire.
Comme vous le savez, la situation économique et financière de notre pays a commencé à se dégrader, dès le début du deuxième semestre de l’année 2015, sous la conjonction, d’une part, du choc externe provoqué par le ralentissement de l’activité économique mondiale à l’origine de la chute des cours mondiaux de principaux produits d’exportation de notre pays et, d’autre part, du choc interne lié au caractère extraverti et peu diversifié de notre économie, auquel s’est greffé un certain attentisme des opérateurs économiques et des investisseurs. Cette dégradation de la situation économique s’est traduite par le ralentissement du taux de croissance du PIB réel qui est passé de 9,5% en 2014 à 6,9% en 2015 et à 2,4% en 2016. Parallèlement, le taux d’inflation annuel, qui était contenu autour de 1% à la même période 2014-2015 a augmenté pour atteindre 23,6% en 2016.
La conséquence immédiate de ce mauvais comportement des principaux indicateurs macroéconomiques a été la révision par le Gouvernement du Budget de l’exercice 2016.
Mais, en dépit du vote par le Parlement d’une loi des Finances rectificative, le Gouvernement a eu à faire face, tout au long de l’année 2016, à une baisse drastique des recettes publiques et à la pression des dépenses, surtout contraignantes, à savoir les rémunérations, les dépenses de sécurité et de souveraineté, le paiement de la dette extérieure, le fonctionnement des institutions, sans oublier les engagements liés au processus électoral. Cette inadéquation entre les ressources internes, de plus en plus faibles, et des dépenses restées constantes, voire en hausse, a eu comme résultat un déficit important dans l’exécution du Budget 2016 et cela, malgré des efforts de compression des dépenses entrepris tout le long de l’année et qui ont permis, au cours de certains mois, de réaliser des excédents de trésorerie.
Eu égard au résultat négatif ainsi connu dans l’exécution du Budget 2016 et pour éviter une détérioration plus prononcée de la valeur de notre monnaie nationale, nous avons décidé dès janvier 2017, de resserrer davantage l’exécution du Budget, en nous fixant comme objectif mensuel zéro déficit ou dans l’impossible, un déficit réduit et facilement compensable avec d’éventuels excédents des mois à venir. Cette discipline budgétaire a permis de maintenir les finances publiques en équilibre au cours de cinq mois sur les sept premiers mois de cette année et d’enregistrer un ralentissement du rythme de dépréciation du franc congolais contre le dollar, passant d’une moyenne de 4% par mois entre octobre 2016 et mars 2017 à 2,5% par mois en avril et mai 2017.
Pris en termes de progression mensuelle, le seul mois au cours de cette année où un déficit de trésorerie aura été important est celui de juin, le déficit programmé de mai ayant été couvert par des excédents des mois précédents.
Mais face à l’accélération de la dépréciation de notre monnaie constatée de fin juin à mi-juillet 2017 et ce, malgré une gestion maîtrisée des finances publiques comme je viens de le relever, le Gouvernement n’a pas eu d’autre choix que de suspendre la quasi-totalité de paiements pour calmer le marché et, ainsi, envisager d’autres mesures nécessaires à une stabilité durable du Franc congolais.
Certes, cette décision a eu pour effet de décaler certains paiements importants du mois de juillet en août, notamment les salaires de certains services de l’Etat et la rétrocession aux régies financières; mais, elle s’est avérée fructueuse car elle a permis au Gouvernement d’équilibrer ses comptes à la Banque Centrale, de constituer une certaine marge de trésorerie pour le reste de l’année et de ramener le taux de change du franc congolais, contre le dollar américain, autour de1.550 FC contre 1.700 FC au mois de juillet.
Toutefois, le Gouvernement reste conscient que cette accalmie relative sur le marché des changes n’est pas suffisante et qu’au-delà de la politique d’ajustement budgétaire, il faut poursuivre les efforts pour asseoir une monnaie forte. C’est la raison pour laquelle une série d’autres mesures en faveur de la mobilisation des recettes internes et de la relance de la production nationale viennent d’être prises par le Gouvernement, au terme des constats faits sur le terrain par différentes missions d’inspection dans certaines provinces, ordonnées par le Chef de l’Etat Lui-même. Adoptées dernièrement par le Conseil des Ministres, ces mesures sont certaines de portée générale, d’autres de portée spécifique, et toutes applicables les unes à court terme et d’autres à moyen et plus ou moins long terme.
Elles portent notamment sur la suppression des taxes illégales, des frais administratifs d’interventions diverses exigés par différents services aux postes frontaliers ou ailleurs sur le territoire national, des points de contrôle sur les routes ou les voies fluviales, l’assainissement des aires de dédouanement, l’intégration de toute la parafiscalité et autres revenus des prestataires en un taux unique, la stricte application du décret fixant à quatre le nombre des services autorisés à opérer aux frontières, la lutte contre la fraude, la contrebande, l’évasion fiscale, le renforcement des sanctions administratives et des poursuites judiciaires contre les agents de l’Etat indélicats et les opérateurs économiques véreux, la mise en place d’une stratégie de promotion des exportations agricoles et des produits de l’industrie locale.
Dans la même série des mesures, il y a lieu de citer aussi la construction des plates-formes logistiques dans tous les postes douaniers, l’accélération de l’informatisation et l’interconnexion des services des régies financières, dont l’inauguration du serveur installé dans le data center de l’immeuble du Gouvernement aura lieu prochainement dans la perspective de la mise en place d’une chaîne des recettes.
A cet arsenal des mesures s’ajoutent deux chantiers importants dont la réalisation devrait permettre à notre pays d’exploiter tout son potentiel fiscal et surtout d’orienter l’essentiel de ses ressources vers la construction des infrastructures de base, sociales et énergétiques. Le premier chantier est celui de la réforme de notre système fiscal, considéré aujourd’hui comme complexe, asphyxiant, tracassier et en définitive décourageant pour les initiatives privées.
C’est pour cette raison que Sous le Haut Patronage de Son Excellence Monsieur le Président de la République et suivant ses orientations personnelles, le Ministère des Finances organise en septembre prochain, un Forum national sur la réforme du système fiscal de la R-dCongo.
L’objectif de cette réforme est d’aboutir, à travers un diagnostic complet et précis des maux dont souffre notre système fiscal, à rechercher des solutions pour rendre notre fiscalité simple, compétitive, attractive, à rendement élevé et au service du développement. Et pour assurer l’appropriation par tous les agents économiques de cette réforme, nous avons opté pour une méthode participative et inclusive, en associant différentes couches socioprofessionnelles. Le deuxième chantier important et incontournable pour le développement de notre pays est celui de la relance de la production agricole nationale et de notre agro-industrie. L’objectif est de chercher progressivement, tant à atteindre l’autosuffisance alimentaire et réduire ainsi la forte dépendance de notre pays vis-à-vis des importations, qu’à assurer la diversification de notre économie et par ricochet des sources de ses revenus».
Henri Yav Mulang,
Ministre des Finances.