- lun, 02/09/2013 - 04:37
Est-ce un tournant décisif dans le conflit avec le Rwanda?
Jamais le Peuple congolais n’a été aussi fier de son armée que lors de ces batailles décisives des «collines des trois Tours» qui se déroulent au Nord Kivu où, combinant pression diplomatique exercée par l’Oncle Sam sur le Rwanda avec l’engagement sans faille sur le terrain où nos jeunes étaient désavantagés par le terrain, les M23 ont dû battre en retraite craignant d’être exterminés. La puissance de feu des loyalistes conjuguée avec la force diplomatique a eu raison des affreux.
Les M23 avaient peu le choix. Les pressions ont fini par avoir raison de l’ennemi. Conjuguant un engagement sans faille sur un terrain où l’ennemi avait avantage - les rebelles se trouvaient perchés sur le toit de Goma, les fameuses «collines des Trois Tours» quand les loyalistes devaient escalader les hauteurs - avec la pression diplomatique exercée par le président américain Barack Obama mais aussi par le secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-Moon, les M23 ont lâché prise. Au risque d’être exterminés par une puissance de feu d’une ampleur inédite des loyalistes appuyés pour la première fois sans désemparer par les soldats de la Brigade d’intervention de la Monusco, les affreux ont dû battre en retraite. Hélicoptères de combat de la Monusco, artillerie de la brigade internationale d’intervention en appui aux FARDC: la puissance de feu était trop forte face aux M23. Les combats qui ont lieu sur les hauteurs de Kibati ou qui viennent d’avoir lieu ont été décisifs sur la suite des événements.
Si le Congo est loin d’être sorti du gouffre dans lequel il est plongé, il est clair que cette déroute militaire et diplomatique des rebelles ne sera pas sans conséquence lors de la reprise des fameux pourparlers de Kampala.
Ces travaux doivent reprendre et Kinshasa n’y verrait aucun inconvénient à condition que les rebelles abattent enfin leurs cartes.
Veulent-ils déposer les armes - comme Kinshasa le leur demande - et expliquer pourquoi ils s’étaient armés pour tuer leurs propres compatriotes ou veulent-ils continuer à être au service de ceux qui ne veulent pas du bien de leur pays? En même temps, Kinshasa n’a jamais refusé aucune coopération avec aucun de ses voisins à condition que la souveraineté pleine et entière du pays soit reconnue sur tout son territoire...
Le rwanda martial isolé.
Il reste qu’au niveau régional comme international, le Rwanda, accusé nommément d’ingérence par l’ONU, paraît désormais isolé et sa marge de manœuvre extrêmement limitée.
Au lendemain d’une rhétorique résolument guerrière, dont il a déjà usé à plusieurs reprises dans le passé contre notre pays, le gouvernement rwandais a baissé d’un ton vendredi, ne réagissant pas officiellement aux nouvelles accusations de l’ONU sur un soutien de son armée aux rebelles du M23. Jeudi soir, le sous-secrétaire général aux opérations de maintien de la paix, Edmond Mulet a déclaré au Conseil de sécurité avoir des «informations crédibles et cohérentes» sur un soutien de l’armée rwandaise aux rebelles du M23, dans les combats en cours au nord de la capitale de Goma, ont déclaré des diplomates à New York.
L’intensité de ces combats, qui durent depuis une semaine, est montée mercredi et jeudi, avec l’engagement accru, aux côtés des FARDC, des onusiens, chargés d’éradiquer les groupes armés qui pullulent dans l’est du pays.
Selon ces mêmes sources, le sous-secrétaire général aux opérations de maintien de la paix qui s’exprimait à huis clos, a évoqué une infiltration de troupes rwandaises au Congo «ces derniers jours» (Le Soft International n°1242, daté du 30 septembre 2013).
Accusé depuis octobre 2012 de soutenir le M23, rébellion composée à majorité de rwandophones, le Rwanda a toujours fermement démenti, de même que Kampala, également accusé.
Signe de gêne, divers responsables de la présidence et du gouvernement rwandais ont été contactés vendredi par l’Afp, après ces nouvelles accusations, mais aucun n’a répondu. Seule la ministre rwandaise des Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo a fait un baroud d’honneur en «démentant» dans la nuit sur son compte Twitter la présence de troupes rwandaises de l’autre côté de la frontière. «Non (...), les troupes rwandaises ne sont pas en République démocratique du Congo (pour le moment)», a-elle écrit, sur un ton volontairement ambigu, entre ironie et menace voilée.
Le Rwanda se retrouve «très isolé sur la scène internationale», a estimé Thierry Vircoulon, directeur du projet Afrique centrale au centre de réflexion International Crisis Group (ICG), cité par l’Afp.
Membre non-permanent du Conseil de sécurité depuis le 1er janvier, le Rwanda a bloqué mardi, selon des diplomates, une proposition franco-américaine de sanctions contre deux responsables du M23. Il s’est aussi opposé depuis une semaine à plusieurs projets de déclaration du Conseil sur la situation dans l’est du Congo, mettant en cause le M23.
Comme à chaque nouvel épisode de crise dans le Nord-Kivu, Kigali a ces derniers jours haussé le ton et usé d’un vocabulaire martial après la chute de son côté de la frontière d’obus tirés depuis le Congo.
Accusant les forces congolaises d’«intensifier leur bombardement délibéré du territoire rwandais», Louise Mushikiwabo a averti jeudi: «cette provocation ne peut plus être tolérée. Nous n’hésiterons pas à défendre notre territoire». Mais, vendredi, Ban Ki-moon a affirmé que ce sont les rebelles du M23 qui ont tiré en direction du territoire rwandais.
Dans un communiqué, M. Ban «condamne en particulier les tirs non ciblés émanant du M23 qui ont causé des morts, des blessés et des dégâts matériels parmi la population civile à l’est de la RDC et dans les zones frontalières au Rwanda, de même que parmi les Casques bleus».
Catherine Ashton, la représentante de la diplomatie de l’Union Européenne, a elle mis en garde vendredi contre «toute tentative pour internationaliser le conflit».
«Toute intervention directe de pays voisins de la RDC ne pourrait qu’aggraver la situation», a-t-elle affirmé.
Des coups de menton.
L’armée rwandaise est déjà intervenue officiellement à trois reprises au moins dans des conflits en RDC. En 1996 - la RDC s’appelle encore le Zaïre - elle organise, encadre et accompagne au combat la rébellion de l’Afdl, qui renverse un an plus tard Mobutu Sese Seko.
En 1998, la rupture de l’alliance avec l’Afdl provoque la Deuxième Guerre du Congo, conflit régional impliquant plus d’une dizaine de pays africains, dont le Rwanda est un acteur majeur. Cela est passé par l’assassinat à Kinshasa du Chef de l’état Laurent-Désiré Kabila.
Le dernier soldat rwandais quitte officiellement le Congo en octobre 2002.
En 2009, l’armée rwandaise APR participe à une opération conjointe avec les FARDC contre les rebelles hutus rwandais dans l’Est congolais.
Jeudi, des véhicules blindés de l’armée rwandaise ont ostensiblement parcouru Kigali, prenant la route de Gisenyi, en direction de la frontière congolaise. De façon inhabituelle, des images de ces mouvements de troupe ont été diffusées à la télévision nationale et sur les médias.
Risque de confrontation.
Aucun déploiement militaire particulier n’a toutefois été constaté vendredi à Gisenyi ou le long de la frontière alentour.
La ville était calme et les boutiques ouvertes. Les deux postes-frontière reliant Gisenyi et Goma sont restés ouverts depuis la reprise des combats et les commerçants notamment continuaient de traverser vendredi dans les deux sens.
Malgré ses coups de menton, la marge de manœuvre de Kigali semble aujourd’hui très limitée, notamment en raison de la présence importante de l’ONU au côté des FARDC dans les combats face au M23.
«Maintenant les Casques-Bleus sont très impliqués. Il y a donc un risque de confrontation entre les Casques-Bleus et le Rwanda, ce qui serait catastrophique pour le régime de Kigali», notait vendredi Thierry Vircoulon.
Le soft et agences