- lun, 30/10/2017 - 01:43
KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le navire UNC a fait naufrage et repose sous l’eau.
Incroyable! Voilà qu’il tangue... Le paquebot va-t-il chavirer et faire naufrage? Il n’y a pas danger à bord, il y a panique! Elle s’est emparée de tous les passagers, c‘est le sauve qui peut général. L’un après l’autre, chacun saute du navire en perdition sans canot de sauvetage, qu’importe! L’essentiel est de se jeter à l’eau au plus vite et de tenter d’atteindre le rivage ou d’attendre l’arrivée d’un bateau de secours qui aurait capté le CQD... C’est le couple Jean Bertrand Ewanga Isewanga-Claudel André Lubaya qui, le 30 août 2016, déclenche le mouvement par un saut dans l’eau avec grand fracas. Suivi en décembre 2016 sur la pointe des pieds avant d’officialiser trois mois plus tard, début mars 2017, du professeur Sam Bokolombe Batuli, ancien DG à la DGI qui venait de mitrailler sans ménagement le capitaine, son président de parti, l’accusant notamment sur les réseaux sociaux d’user de «la sorcellerie». «C’est de la sorcellerie lorsque, pour espérer sortir du gouffre, un kabiliste, sans rire, propose ses bons offices aux ailes du Rassemblement».
Au tour du personnel d’exécution de faire ses cartons en tête la belle Mamy Kanku Tondola Ntoto, la présidente de la Ligue des Femmes menacée d’être déballée sur les réseaux sociaux par des Mohicans sans que nul ne sache sur quel dossier.
Mais voici que le vaisseau amiral de la flotte, le ministre d’État Pierre Kangudia Mbaya ouvre grande la coque et saute à l’eau à son tour sans radeau emportant sa garde rapprochée!
C’est Justin Bitakwira Bihona-Hayi depuis auréolé d’un ministère par Badibanga, puis par Tshibala, qui avait sonné l’alerte en mai 2014 en quittant le navire où il avait reçu en héritage le poste de président du groupe parlementaire...
Qu’attend le capitaine ou l’équipage pour lancer le Mayday! Mayday!, le fameux appel de détresse ou le Pan! Pan!, connu de tous les marins pour appeler au sauvetage?
Vital Kamerhe Lwa Kanyiginyi Nkingi est trop fier de lui. Comme le capitaine du Titanic Edward John Smith resté debout terrassé face à l’irréparable, l’immense rocher qui se dresse le 15 avril 1912 au large de Terre-Neuve et va couler du matin l’insubmersible Titanic.
Il fut pourtant le premier du PPRD et de la MP.
Présenté par l’histoire comme le directeur de campagne de Joseph Kabila Kabange en 2006 - ce que certains contestent - dont il est alors proche, il claque la porte sur un géant coup de tête alors au faîte de sa gloire comme président de l’Assemblée nationale.
Il venait de publier une apologie «Pourquoi j’ai choisi Kabila» (Kinshasa, février 2006) présentée le 10 mars devant des diplomates autour de la piscine de l’hôtel Invest par Tryphon Kin-kiey Mulumba qu’il a cherché personnellement à l’ex-hôtel InterContinental et baptisée par le président de l’Union des écrivains Mathias Buabua wa Kayembe.
«Ma conviction est que ce qui se racontait sur Kabila était faux», déclare-t-il, solennellement. Avant de faire plus tard un mea culpa. Que les Congolais l’en excusent! Sur Kabila, il s’était littéralement trompé... Ce n’est plus l’homme qu’il avait connu. Qu’importe! Tshisekedi s’était trompé sur Mobutu. Signe de reconnaissance réciproque, les deux avaient porté le même costume et tenu une canne! C’est Kamerhe qui le remarque. Il n’a pas tort. Rappelant que seuls les imbéciles ne changent pas d’avis…
Ce séducteur hors normes qui s’adresse à la foule en en connaissant chacun des membres, s’adressant à chacun dans sa langue maternelle, aurait fait avancer des thèses s’il avait mis le temps à profit. Grâce à un passage remarqué à la tête de l’Assemblée nationale de décembre 2006 à mars 2009, il rassemble autour de lui un dream team. De tous ces hommes et femmes, pas un seul n’est resté. Dernier des Mohicans, le député Baudouin Mayon Mandeke est dehors, à en croire tous! Promis faussement à succéder à Kangudia, il devrait encore attendre un retournement de situation toujours probable. Tous rêvent d’une rue bouillonnante et déterminante.
En 2009, si le Président de la République le tient informé de l’appel fait aux troupes rwandaises en vue d’une opération conjointe restée secrète, Kamerhe en profite pour se démarquer du Chef de l’État et brandir sa congolité. L’occasion faisant le larron, des rumeurs reprises sur les réseaux sociaux n’ont-elles pas contesté ses origines? S’il en gagne en popularité dans un Kivu natal anti-Rwanda, il tombe en disgrâce et profite pour enfoncer le clou en se portant candidat contre son mentor. Il recueille 7,74% et arrive troisième mais préfère se mettre loin des Institutions.
COUP DE SA VIE.
Puis, le présidentiable se positionne pour le poste de porte-parole de l’opposition sans mettre d’accord ni sa droite où trône Jean-Pierre Bemba Gombo, ni sa gauche où règne Étienne Tshisekedi wa Mulumba qu’il loue et déteste.
S’il refuse de se rendre à la réunion du Château de Genval que celui-ci a convoquée, début juin 2016 en Belgique et qui a donné lieu à l’actuel Rassemblement de l’opposition dont, du coup, il ne fait pas partie, c’est qu’il refuse d’apparaître comme quantité négligeable sachant qu’il se ferait coiffer au poteau et voler la vedette par un tout récent dissident de la Majorité, son éternel rival, l’ancien gouverneur richissime du Katanga Moïse Katumbi Chapwe avec qui il venait de renouer à Bruxelles dans un mot d’ordre qui fit long feu «Pasi nayo pasi nanga, pasi na biso» (nous sommes et restons ensemble). Il conteste avec violence puis accepte le dialogue convoqué par le Chef de l’État à la Cité de l’Union Africaine qu’il co-préside et jure de faire rallier l’aile dure de l’opposition mais échoue à conquérir la Primature. Il n’empêche! Il a su placer hommes et femmes dans le nouvel Exécutif mais ne fait rien pour le consolider. Au contraire, il le combat farouchement, le trouvant peu crédible. Au Dialogue inter-congolais comme à celui des évêques de la CÉNCO, la Centrale électorale nationale indépendante a fait adopter un calendrier de 504 jours avant la tenue effective des scrutins pourvu que le financement suive, tout comme le vote par le Parlement des lois d’accompagnement. Kamerhe prend part à tous ces deux dialogues et a ces mots, à la Cité de l’UA: «Avec la technique, on ne triche pas».
L’homme calculateur a senti le peu d’appuis de la rue à ce calendrier et, plus grave, la montée en puissance de ses anciens partenaires de l’opposition qui se sont focalisés sur le terme de décembre 2017. En clair, si passage en 1918 «c’est sans Kabila»!
Voilà Kamerhe qui joue le coup de sa vie: l’annonce de son retrait du gouvernement provoquant une crise majeure de l’Exécutif de Tshibala. S’il déclare lors d’une conférence de presse agir en concertation étroite avec son ministre du Budget Kangudia, celui-ci organise peu de temps après une contre-conférence de presse, nie tout en bloc, déclare sa loyauté au Président de la République, assure se maintenir à son poste, annonce son départ de l’UNC!
Pour ce coup, Kamerhe invoque le report illégal des élections. Mais cette question gérée par l’Exécutif est aussi celle de la Centrale électorale tout comme du Parlement où Kamerhe a maintenu intacte sa représentation. Que cherche-t-il? Use-t-il du chantage afin qu’aux négociations dont il perçoit l’approche, avec la présence à Kinshasa de l’envoyée de Donald Trump, l’ambassadrice Nikki Haley, il se réserve une bonne part à lui-même? Qui lui en ferait le reproche?
Dans ce cas, pourquoi ne pose-t-il pas clairement le problème, préférant passer par des subterfuges? Dans ce jeu de ruse, l’ami de trente ans, a mesuré le risque personnel encouru. Il a choisi de se défaire de cette amitié et a fait le saut dans l’inconnu mais l’honneur est sauf...
Reste Kamerhe! Quel avenir pour lui et pour son UNC? Bien malin qui le dirait. Il est clair que l’élu de Bukavu a joué et a perdu. Comme c’est souvent le cas pour lui! Il n’est fiable ni au sein de la Majorité dont il fut membre prééminent, puis allié, ni dans l’opposition qui lui conteste la qualité de camarade. Pis que cela, il n’appartient à aucune composante, passage obligé au pouvoir dans ce Congo. Nikki Haley qui a convoqué cette opposition disparate, incapable de se mettre d’accord sur rien, à la recherche chacun d’une reconnaissance, l’a reçue en 15’ dans une dépendance de l’ambassade des États-Unis, s’en est moquée. Comme nombre d’observateurs étrangers avant elle!
Il faut hélas le constater. Le navire UNC a coulé. Le bateau se trouve au fond de l’eau! Mais en politique, l’impossible n’existe pas. Rien n’exclut une remontée à la surface et une remise à flots mais le temps du dream team appartient au passé!
T. MATOTU.