Hamida Shatur Kamerhe «invitée» par le procureur de Matete pour «instruction judiciaire»
  • ven, 26/06/2020 - 11:37

KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1491|VENDREDI 26 JUIN 2020.

Hamida Shatur Kamerhe, l’épouse du DirCab du Président de la République condamné samedi 20 juin dernier par le TGI dans le cadre du procès du Programme des 100 jours du Président de la République, paraît loin d’être sortie de l’auberge.

Citée comme témoin et invitée lors du procès de Makala (RP 26.931) ainsi que sa fille Soraya Mpiana Tshituka née d’un précédent mariage (avec l’artiste chanteur JB Mpiana), Hamida Shatur Kamerhe est attendue vendredi 26 juin à 14.00 au parquet général près la Cour d’appel de Matete, à Limete (fac-similé ci-contre).

LIEN AVEC SON ENRICHISSEMENT.
Selon toute vraisemblance, il s’agit d’une instruction en rapport avec son enrichissement ainsi que celui de ses proches, le cousin de son mari, Daniel Shangalume Nkingi alias Massaro ainsi que sa fille Soraya Mpiana Tshituka particulièrement. Si le risque de détention existe, il n’est pas en revanche évident, sauf accident, qu’elle puisse être «mapée» et conduite en prison où séjourne déjà son mari, à en croire une source judiciaire.

Il est prévisible qu’elle soit confrontée à la personne qu’elle avait citée, lors de son témoignage, comme étant son assistance chargée de dépôt de ses fonds à la banque Rawbank et dont elle avait dit ignorer l’adresse. Abondamment citée le jeudi 4 juin 2020, lors de la troisième et dernière audience, Marie-Josée Mengi - la fameuse dame - s’est finalement présentée d’elle-même devant le magistrat et aurait collaboré avec la justice, accompagnée de l’un de ses avocats, l’ex-député PPRD depuis passé à Lamuka (Ensemble), Mayiro Francis Kalombo.

La déposition de cette assistante Marie-Josée Mengi était fort attendue dans cette affaire portant soit sur 57 millions de $US soit sur 66 millions de $US, à en croire les révélations du témoin Bilomba, Conseiller principal du Chef de l’Etat en charge de l’Econome et des Finances qui avait également cité le gouverneur de la Banque Centrale du Congo Deogratias Mutombo mwana Nyembo.
Cette invitation devrait être une «pression supplémentaire» pour en savoir plus sur les détails du détournement des fameux 57 millions de $ US des maisons préfabriquées turques qui ont permis au Libanais Samih Jammal de la société Samibo de décaisser en cash ce pactole.

Dans son jugement prononcé par le Tribunal
de Grande Instance de Kinshasa/Gombe, siégeant en matière répressive au premier degré à son audience publique du 20 juin, portant sur la corruption, le détournement des deniers publics et le blanchiment des capitaux, le juge Bakenge Mvita, président, les juges Kasunda Ngeleka et Mukaya Kayembe ont ordonné la confiscation des fonds contenus dans les comptes de Hamida Shatur Kamerhe, de sa fille Soraya et du beau-frère Daniel Nshangalume Nkingi alias Massaro ainsi qu’au moins sept propriétés immobilières acquises avec les fonds détournés et couvertes par des titres dont les numéros avaient été communiqués.

Il reste que ce verdict a laissé nombre d’observateurs insatisfaits. Le tribunal n’aurait fourni pas de preuves probantes sur ce détournement en exhibant plus de détails. «Ils ont pris beaucoup de dispositions pour qu’on ne retrace pas facilement le cheminement de ces fonds», explique un homme proche du dossier. Un autre fait part de «pressions» qui auraient eu lieu pour qu’on dépose au plus vite le dossier au tribunal, sans en dire plus. De même, plusieurs témoins qui ont défilé devant le tribunal auraient dû être inquiétés et faire l’objet de poursuites. Ce qui, à ce jour, ne semble pas être fait. Dans les milieux judiciaires, on explique cependant que les enquêtes sont loin d’être terminées.

A propos précisément de ce verdict l’activiste américaine Ida Sawyer, Directrice adjointe à la division Afrique de l’ONG newyorkaise Human Rights Watch, se montre très critique dans un texte intitulé : «Affaire Kamerhe» en RD Congo : Étape majeure ou procès politique?

L’ACTIVISTE AMERICAINE IDA SAWYER CRITIQUE.
Ci-après : «Le moment était exceptionnel, jamais vu dans l’histoire de la République démocratique du Congo et pourtant, pendant que le juge rendait son verdict le 20 juin, Vital Kamerhe a eu un sourire moqueur. À travers le pays et dans le monde entier, les Congolais suivaient l’audience en direct sur leur écran. Kamerhe, directeur de cabinet du président Félix Tshisekedi, l’une des figures politiques les plus puissantes de l’histoire récente de la RD Congo et ex-allié de l’ancien président Joseph Kabila, a été reconnu coupable de détournement de fonds et de corruption aggravée. Il est ainsi devenu l’homme politique le plus important de la RD Congo à avoir été poursuivi pour corruption.

Kamerhe a été condamné à 20 ans de travaux forcés - commués en peine de prison en RD Congo - et encourt plusieurs millions de dollars d’amendes pour avoir participé au siphonage de plus de 50 millions de dollars de fonds publics alloués à des projets d’infrastructure. Il a aussi été déclaré inéligible à toute forme de mandat politique pour les 30 prochaines années.

Ce procès a marqué une étape importante dans la lutte contre la corruption. Tout au long de la procédure, les Congolais n’ont cessé de dénoncer sur les réseaux sociaux un système rongé depuis des décennies par une corruption rampante, rappelant aux autorités que le détournement de fonds publics n’est pas l’affaire d’une seule figure politique.

D’autres personnalités impliquées dans des affaires de corruption ces dernières années devraient également faire l’objet d’enquêtes et de poursuites adaptées dans le cadre de procès équitables, quelle que soit leur position ou leur appartenance politique. Si aucune autre enquête n’est lancée, l’«affaire Kamerhe» risque de rester dans les mémoires comme un simple règlement de comptes entre rivaux politiques. Les avocats de Kamerhe et de ses coaccusés - un homme d’affaires libanais et un autre collaborateur du président - ont fait part de leur intention de faire appel.

Le procès a démontré combien l’enquête a laissé bon nombre de questions sans réponses et que plusieurs témoins importants, eux aussi impliqués dans des infractions, ont pu s’en tirer sans être inquiétés.
Encore plus inquiétant, le juge qui présidait initialement le procès, Raphaël Yanyi, est décédé le 27 mai dans des circonstances douteuses. Les autorités ont d’abord affirmé qu’il était mort de causes naturelles. Mais le 16 juin, le ministre congolais de la Justice a annoncé que Yanyi était mort d’une hémorragie cérébrale due à un traumatisme crânien.

Le gouvernement a depuis ouvert une enquête pour meurtre. En RD Congo, le désir d’état de droit est manifeste. Pour y parvenir, les Congolais auront besoin d’être rassurés sur le fait que cette affaire n’était pas un procès purement politique. De nombreuses victimes et familles attendent également que justice soit rendue pour des crimes et des violations des droits commis par des responsables de l’administration précédente, dont certains sont encore en fonction. Personne ne devrait pouvoir se sentir intouchable».
ALUNGA MBUWA.


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