- ven, 29/06/2018 - 03:12
KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
A Mbandaka, dans la nuit moite de la ligne de l’Equateur, plus d’un million d’âmes se prend à rêver.
Samedi 23 juin, tout Mbandaka s’est arrêté. Quand une ville de plus d’un million d’âmes descend dans la rue, on imagine la foule qui se déverse ou s’aligne le long d’une voie qui, une journée entière, ne désemplit pas, chante, crie, danse physique «Papa banda okende ebola ekota...», «Moto na moto na Mboka na ye oyo mboka Baende». Qui a dit que des membres de la Majorité Présidentielle ne drainent pas des foules? A Mbandaka, une ville s’est prise à rêver d’un Etafe Eliko «Bokulaka».
EACE, Entendre, Apprendre, Comprendre, Entreprendre. C’est la méthodologie qui a guidé, une semaine durant, la délégation de l’Alliance des Bâtisseurs pour un Congo Emergent (A.B.C.E) partie à Mbandaka, capitale de la province de l’Equateur dans le cadre d’un visite de prise de contact avec des candidats à la candidature et d’investiture aux scrutins du 23 décembre 2018.
Une méthodologie qui a connu son point culminant mardi 26 juin en début d’après-midi, au terme de la visite de cette ville du centre du pays adulée par ses natifs qui lui ont trouvé un nom du cru intraduisible comme c’est souvent le cas dans ce pays Mongo.
«Ekanga Ngenge Pili Pili Libende» pourrait n’être qu’un cri vantant le charme pimenté d’une ville interminablement moite et le côté acier de l’habitant.
LA METHODE EACE.
Cet après midi, dans cet amphi qui a vu passer une partie de l’élite de la province et de plusieurs autres provinces accourue dans ce haut lieu du savoir, à l’approche de 18 heures, des mains humides sont encore en l’air, réclament la parole pour oser une contribution mais l’orateur, le professeur Tryphon Kin-kiey Mulumba, propose de poursuivre un échange animé qualifié de partage hors de l’amphi, dans les jardins asséchés où le thermomètre sous l’ombre affiche 40 degrés de température dans une contrée traversée par l’équateur à l’exemple de la Colombie et du Brésil, du Gabon, de la Somalie, de l’Ouganda et n’a jamais su ce que le temps doux signifie, que la lumière et la sono fonctionnant au mazout, semblent de moins en moins donner la garantie de la poursuite de service...
Entendre. «Il vaut mieux que la population elle-même identifie et décline ses problèmes qu’elle connaît mieux que quiconque et propose des solutions», explique Tryphon Kin-kiey Mulumba. Apprendre et comprendre «ces problèmes ayant été déclinés et les solutions proposées par la population elle-même, voilà qui permet à l’homme public de les intérioriser et de les conceptualiser». Enfin entreprendre ce qui n’est possible que quand l’homme public informé des problèmes et des priorités de ses concitoyens, ouvre la page de la formulation de la pensée, de la construction des projets qui vont changer et transformer la vie, explique-t-il.
D’attaquer bille en tête: Puis d’attaquer bille en tête: «Entendre, c’est, par exemple: pourquoi l’eau potable ne coule pas au robinet de la Régideso à Mbandaka alors que la ville est sur un lit d’eau de ce majestueux fleuve? Or, l’eau c’est la vie! C’est vrai que pour qu’il y ait de l’eau, il faut de l’électricité. Pourquoi il n’y a pas d’électricité à Mbandaka? Pourquoi la Snél qui bénéfice du monopole de ce service de distribution du courant électrique aussi bien que la Régideso, ne fonctionne pas à Mbandaka?
Or, il n’y a point de développement sans électricité! Pourquoi le projet de centrale électrique développé par Jean-Claude Baende du temps où il était à la tête de la province, n’a jamais démarré?
ELLES FACHENT.
En présentant ce projet, le gouverneur avait-il tort? Si oui, quelle alternative a-t-on proposé»?
Vient une nouvelle série de questions. «Quel rôle dans le développement revient à l’Exécutif national? Quel rôle est celui de l’Exécutif provincial? Quelle place occupe l’élu aussi bien national que local? Quel rôle joue l’élite politique locale? Quelle place revient au souverain primaire, à savoir, le peuple»? Des questions qui fâchent...
Puis: «Dans ce qui arrive à notre vie de tous les jours, à qui la faute incombe-t-elle? A l’Exécutif? A l’élu qui vote des lois? A l’élite locale qui a mission de veiller au bien de ses concitoyens?». Revenant sur les lois, la province réalise-t-elle des recettes car l’Etat ne peut rien entreprendre s’il est dépourvu de moyens! Mais les recettes sont-elles possibles en dehors des lois? Qu’en est-il des édits provinciaux? Si les questions sont bien posées, elles comportent en elles les réponses…
Ici, Kin-kiey partage une expérience personnelle du temps où fut ministre des Relations avec le Parlement et qu’il entreprit d’évaluer les édits provinciaux votés par les différentes Assemblées provinciales du pays et promulgués par les gouverneurs des provinces d’avant le démembrement administratif. Grâce à un financement exceptionnel reçu du PNUD, Programme des Nations Unies pour le développement, dans son chapitre Gouvernance politique, des experts de son ministère firent, pour la première fois de l’histoire du pays, le tour des provinces en vue de collecter ces lois provinciales et les soumettre à l’examen des experts pour en déterminer la conformité avec la Constitution du pays. Une loi, pour exister, doit être conforme à la Constitution ou elle n’est pas...
«EBOLA EKOTA...».
En clair, il s’agit de la qualité de ces textes. En même temps était évalué le travail législatif des assemblées. Résultat des courses: sur les onze provinces que comptait le pays, le Grand Equateur prenait la queue de peloton. Le Bandundu placé juste au-dessus du Grand Equateur, ne s’en portait pas mieux...
Question - qui fâche: quelle place occupe l’élu, national et local dans la transformation des conditions de vie, donc dans l’émergence du pays? Quel rôle dévolu au souverain primaire, à savoir, le peuple, dans l’amélioration de la vie, et... donc, de sa vie? Comment changer la vie, changer de vie sans la capacité intellectuelle de définir son devenir, qui est dans la désignation des dirigeants qui doivent être des hommes (et des femmes) de vision? Si vous n’avez pas ces hommes (et ces femmes) de vision (partagée) placés à l’avant, comment bouger et avancer?» Voilà la méthode EACE développée par le professeur Tryphon Kin-kiey Mulumba qui permet d’appréhender des situations... Cette méthode permet de mieux connaître les problèmes auxquels fait face la population et d’apporter des réponses idoines...
L’atterrissage était prévu à 15 heures. Mais c’est à 17 heures que l’Airbus A320 de Congo Airways se pose à Ekanga Ngenge Pili Pili Libende. Sur la piste, deux mondes se font face, se défient. L’électricité en l’air. Par un concours des circonstances, le gouverneur PPRD de province regagnait sa ville.
Dans l’avion, a pris place l’un de ses prédécesseurs Jean-Claude Baende Etafe Eliko dont le parti ADH, Alliance des Démocrates Humanistes, est membre du Regroupement A.B.C.E. Dans la cabine, l’air est électrique.
Deux jours plus tard, aux funérailles d’un fonctionnaire des finances admiré pour ses œuvres, ils s’ignorent, s’épient. A cet endroit, ça sent l’électricité. Ambiance de pré-campagne... Le petit groupe du gouverneur controversé Bobo Boloko qui s’est fait dans les affaires, composé d’agents de l’Etat, s’est vite évaporé quand l’immense foule noire fait sauter les barrières, envahit la piste, avale son gouv’ adulé, «l’Ouragan», «l’Obama de l’Equateur», etc., ainsi que ses compagnons, le 1er Vice-président Tryphon Kin-kiey Mulumba en charge des Relations avec les partis politiques et les regroupements politiques et l’ADH Nicoletta Ntoya Nseki, secrétaire nationale A.B.C.E en charge des jeunes et de la femme à qui une marche à pied... sur 7 kilomètres est imposée. La politique c’est aussi le physique...
CARNAVAL DE RIO.
Dans ce pays Mongo, Ngombe, Libinza, Ekonda, Bankutu, etc., où la chaleur communicative s’exprime par le muscle, pleurs, plaintes, espoirs, joie, admiration, etc., s’accompagnent toujours par des grosses bousculades ou par des chants ininterrompus qui, plusieurs jours encore, résonnent dans les oreilles de ces deux hommes. L’ADH Nicoletta Ntoya Nseki n’a osé rien défier. Mise à l’épreuve de la marche, elle a jeté l’éponge… Quand c’est une ville peuplée de plus d’un million d’âmes, on imagine la foule qui s’est déversée dans la rue ou s’est alignée aux abords d’une voie qui ne désemplit pas aux cris et chants «Papa banda okende ebola ekota...» (depuis ton départ, le virus tueur Ebola a attaqué la province, la question est de savoir c’est quoi et qui Ebola) ou «Moto na moto na Mboka na ye oyo mboka Baende» (ici, c’est le pays de Baende, de nul autre), etc., qui n’arrêteront pas jusqu’à l’arrivée à 19h00’ à la Grand’Place du Marché. Ici, c’est une véritable ambiance de carnaval... C’est un miracle si on ne compte de morts à la suite de bousculades...
Depuis matin, un orchestre traditionnel en sueur et en muscles électrise l’incroyable foule dense quand des jeunes filles très physiques jouent du bassin. Collés l’un et l’autre, nul ne peut entendre nul. L’Equateur «Mambenga», Mbandaka «Ekanga Ngenge Pili Pili libende» saluent le fils Etafe Eliko «Bokulaka» parti trop tôt mais qui revient et se prennent à rêver d’un autre avenir.
Quel pays! Quel plaisir! Quel bonheur! Que peut l’élu face à peuple si chaleureux, qui se mobilise comme un seul homme pour venir accueillir deux hommes de Kinshasa! Question de la méthode EACE...
T. MATOTU.