- dim, 23/05/2021 - 01:20
KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1527|DIMANCHE 23 MAI 2021.
Ils ont juré de lui faire la peau. Mais ce natif de Kinshasa, commune de Barumbu, âgé de 58 ans, est-il prenable?
Nul doute, jamais un IGF-CS n’aura été aussi médiatique comme Jules Alengete Key dès le lendemain de sa prise fonctions le 7 juillet 2019, trois mois après l’investiture du Président de la République peu après son retour d’une tournée des voisins où il écoute et entend. Ni ne sera aussi redouté par quiconque a en charge la gestion des fonds publics dans un pays où le détournement est monnaie courante...
Il dispose (mieux, a disposé) des pleins pouvoirs, s’agissant de décaissements, travaillant directement avec la Présidence de la République voire avec le Président de la République lui-même et avec le Gouverneur de la Banque Centrale du Congo, désignant quel paiement était pertinent et qu’il faut immédiatement effectuer, quel autre ne l’était pas et qu’il faut éloigner de la chaîne de la dépense publique, dépassant en l’espèce les pouvoirs de ceux de l’avant dernier Premier ministre PPRD-FCC Sylvestre Ilunga Ilunkamba lors du régime d’expédition des affaires courantes...
Seul son avis était en effet entendu et, à la suite de cela, le Trésor public ne s’en porte pas trop mal...
L’homme qui s’habille comme un officier de police, costume aux boutons dorés - c’est par l’étoffe qu’on reconnaît le moine, explique-t-il - a, à ce jour, fait jeter en prison un puissant ministre, celui de l’EPST, le PPRD-FCC Willy Bakonga Wilima, qui fut secrétaire permanent adjoint de l’ex-puissant parti présidentiel PPRD, précédé en cellule au CPRK par deux de ses directeurs, condamnés dans le détournement en lien avec le programme de gratuité de l’enseignement.
IL S’EN PREND A LEUR BEEFSTEAK.
Jules Alingete Key pourrait bientôt en mettre au bagne un autre officiel, cette fois un vrai poids lourd, l’ex-Premier ministre Augustin Matata Ponyo Mapon dont la levée d’immunité réclamée par le Parquet général près la Cour constitutionnelle pourrait intervenir cette semaine ou, au plus tard, au tout début de la semaine prochaine après la mise en place d’une commission ad hoc au Sénat.
Et comme si cela ne suffisait pas, voilà l’IGF-CS, poursuivant, sans désemparer, ses missions, qui fait monter la colère dans les milieux des gestionnaires publics.
Dans un courrier daté du 13 mai 2021 (n° 545/PR/IGF/IG-CS/JAK/BCO/2021 adressé à sa patrouille financière (ses mandataires auprès des entreprises de l’État et des Établissements publics), il s’en prend au beefsteak des mandataires actifs et non actifs, qualifie de «détournements des deniers publics» nombre d’allocations et d’avantages que s’octroient régulièrement et depuis des années les mandataires publics.
Il en est ainsi du paiement des émoluments aux mandataires non actifs, de l’octroi de véhicules à crédit aux mandataires aussi bien actifs que non actifs, de la couverture des soins médicaux des mandataires non actifs, du paiement des primes de bilan, des primes de budget à tout mandataire public, de l’octroi des véhicules de fonction aux mandataires non actifs, cet avantage étant aussi octroyé aux commissaires aux comptes.
Cet homme qui, comme une machine à écrire, donne de mémoire et, à l’infini, une pluie de dates de sa vie (son diplôme d’état obtenu en 1983 avec 71%, son entrée à l’Université de Kinshasa en 1983, son départ de l’Université en 1988 avec sa licence en Économie, son recrutement l’année d’après le 7 janvier à l’Inspection Générale des Finances, sa cote à ce concours à l’IGF où il se classe en ordre utile - 6ème sur les 50 recrutés face à une foule de candidats -, promu inspecteur principal à l’IGF en 2010, inspecteur général à l’IGF dix ans plus tard en 2020, qui dispose d’un chapelet d’anecdotes à raconter sans fin, brandit l’article 10 du Décret n°13/055 du 13 décembre 2013 portant statut des mandataires publics dans les entreprises du portefeuille de l’État et l’article 11 du Décret n°13/056 du 13 décembre 2013 portant statut des mandataires publics dans les Établissements publics. S’il y a controverse autour de la lecture de ces deux articles, l’IGF-CS dit n’en faire qu’une «seule lecture grammaticalement correcte».
DECLARATION DE GUERRE.
Pour lui, ces textes ne laissent place à aucun doute «sur le fait que les mandataires non actifs ne sont admis qu’à un jeton de présence et que les commissaires aux comptes ne peuvent prétendre qu’à une allocation fixe, à l’exclusion de tout autre avantage».
En clair, «la rémunération de base, la prime, les avantages sociaux ne peuvent s’appliquer qu’aux mandataires publics actifs, ceux qui participent à la gestion courante».
«Il en est de même des primes de bilan, des crédits, des avances et d’autres avantages que s’octroient les mandataires actifs en violation des dispositions réglementaires interdisant formellement de telles pratiques ainsi que la sollicitation ou l’agrément de quelqu’avantages que ce soit en raison de leurs fonctions ou même en dehors de celles-ci».
Rien moins qu’une déclaration de guerre. C’est «appauvrir» et mettre à la rue ces D-G et, surtout, ces PCA des entreprises et établissements visés (CNSS, FONER, ARCA, CEEC, FPI, OCC, SCTP, SCPT, SNEL, SONAS, REGIDESO, RVA, INPP) qui ont décidé de lui asséner cette fois, «le coup fatal».
Des réunions se sont tenues le week-end pour lui régler ce moment et des sources citent surtout deux PCA très remontés. Il s’agit de montrer que cet Antonio Di Pietro de la Mani pulite congolaise n’a pas les mains aussi propres qu’il le prétend.
A l’heure de YouTube et des sextapes, des vidéos de chantage et d’opprobre sont montées par des légions d’experts d’Internet le montrant, grâce à des enregistrements qui auraient été réalisés dans l’immeuble Intelligent fournis par le gestionnaire du bâtiment, comment le très puissant IGF-CS se serait fait remettre de l’argent de... corruption !
En réalité, il s’agirait d’images à l’époque où Alingete était DirCaba de la ministre de l’Économie Acacia Bandubola Mbongo lorsqu’il se faisait remettre en espèces sa paie mensuelle par le conseiller financier, celle-ci n’était en effet pas versée par la voie bancaire mais payée en espèces en mains propres.
D’autres ressortent le dossier des 12 millions de $US des pétroliers. Un autre coup d’épée à l’eau s’agissant d’un dossier semblable à celui des 15 millions de $US du début de la mandature de Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo.
Il s’agit en fait d’un système mis en place par des gouvernements précédents avec le secteur qui consiste à assurer une stabilisation des prix et, du coup, de la paix sociale, par un blocage des prix à la pompe, sur un an au terme de laquelle, le secteur se fait verser l’éventuel manque à gagner. La question est de savoir comment ce paiement se repartit entre pétroliers et des services d’assiette et si cette somme peut aller dans la poche d’un DirCaba fut-il celui de la ministre Acacia Bandubola Mbongo?
Il est vrai qu’il faut garder la tête froide et savoir où on met les pieds lorsqu’on s’appelle Alingete et qu’on a décidé d’œuvrer à la traque de la pieuvre. Car, pour ceux qui n’ont plus rien à perdre, tout coup porté peut être de bon augure.
D. DADEI.