- ven, 15/03/2019 - 07:54
KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Il faut à l’état tout auditer. L’heure a sonné, plus question d’attendre. Afin que cela n’apparaisse pas comme une chasse aux sorcières, il va falloir confier le job à un organisme international au-dessus de tout soupçon, à recruter. Commencer cet audit par les comptes de la Centrale électorale nationale... indépendante qui ont avalé des milliards de $US ces dernières années; passer ensuite à la Banque Centrale du Congo dans ses comptes et multiples sous-comptes éparpillés dans les banques commerciales; puis dans toutes les entreprises publiques et les sociétés d’économie mixte d’importance ou pas (Gécamines, Inss (désormais CNSS, Caisse nationale de sécurité sociale), Sonas (Assurances), Scpt (Postes & Télécoms), Sctp (ex-Onatra), Inpp, (Préparation professionnelle) etc., toutes sans exception), les régies financières; plonger dans la gestion de tous les ministères, dans celle des chambres parlementaires, autres tunnels par où fuitent chaque année des millions de $US pour atterrir sur des paradis fiscaux; passer au peigne fin des projets tel Bukanga Lonzo (plus de 70000 ha, plusieurs productions, maïs, soya, haricot, manioc, pomme de terre, arachides, tomates, oignons, poulets, etc., au moins près de US$ 100.000.000 débloqués par le Trésor public... partis en fumée), ceux des marchés publics des infrastructures dans la Capitale (immeuble intelligent, aérogare de N’Djili, etc.) et dans les provinces, etc.
Lors de la campagne électorale, le Candidat Fatshi (n°20) l’avait annoncé, sur une radio: «Avant de lancer tout programme d’envergure, il nous faudra d’abord voir ce qu’ils nous auront laissé dans les caisses de l’état».
L’heure est venue de lancer le cinquième de ces douze chantiers d’Héraclès en nettoyant nos écuries d’Augias. Le Congo doit partir de l’avant et partir d’un bon pied. Il ne saurait le faire sans lancer aujourd’hui et maintenant ce chantier qui consiste à connaître la Vérité.
ETALER SON TAUX DE CORRUPTION.
Qui, dans ce pays, a fait quoi, quand, comment, avec la complicité de qui? Le Congo doit impérativement redorer son blason s’il veut que les investisseurs refluent dans un pays miracle adulé de tous, certainement le plus riche de la terre mais en même temps le plus pauvre en comparaison de son potentiel et, du coup, n’est visité par aucun dirigeant du monde.
Même le président chinois, par deux fois, a survolé notre pays, depuis Brazzaville, la Capitale d’en face n’est séparée que par l’eau du fleuve, sans penser une fois pouvoir s’arrêter à Kin alors que le pays serait avec des Chinois. Mais lesquels Chinois?
Le Président Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo doit compléter son cabinet en désignant un «Monsieur Anti-Corruption» au-dessus de tout soupçon.
Touchons du bois...
Dans un passé récent, Emmanuel-Janvier Luzolo Bambi Lessa s’est attelé à tout balancer. Mais ce fils de militaire de la Force publique du Congo belge et des ex-FAZ mobutistes, ministre de la Justice sous Muzito (2008-2012) nommé juge à la Cour constitutionnelle en juillet 2014 avant d’en sortir pour faire partie l’année suivante du bureau du Président de la République au titre de conseiller spécial en matière de «bonne gouvernance et de lutte contre la corruption, le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme», n’a jamais vu un seul des dossiers dénoncés être ouvert ni par le Garde des Sceaux, ni par le PGR quand il s’égosillait à déclarer que chaque année, le Congo perd au minimum $US 15 milliards suite à la corruption et au détournement des deniers publics.
Le 20 juin 2018 à l’ouverture à Kinshasa de la rencontre régionale Afrique de Transparency International (20-22 juin), il y revenait avec force. Devant l’assemblée réunie à l’initiative de cette ONG internationale d’origine allemande qui a pour principale vocation la lutte contre la corruption des gouvernements et institutions gouvernementale, il affirme que «la corruption gangrène gravement les institutions», explique le paradoxe congolais entre la taille de du budget de l’état et le coulage des recettes. «Nous avons un budget de $US 5 milliards et nous perdons chaque année au moins $US 15 milliards», déclare-t-il. Autre paradoxe: l’inexistence d’une jurisprudence dans la lutte contre la corruption.
Sur les 5.000 détenus que compte le pays dans les 200 prisons congolaises, on ne trouve pas cinq personnes condamnées du fait de la corruption ou de détournement des deniers publics! En clair, en l’espèce, aucune sanction...
à la veille de chaque scrutin, une organisation citoyenne LICOCO (Ligue congolaise contre la corruption) dit vouloir engager la mobilisation sociale des citoyens en vue d’exiger des candidats d’inscrire la lutte contre la corruption comme priorité dans leurs programmes de campagne. C’est pourtant lors de ce débat que la question de corruption rejaillit avec force.
Lundi 11 mars, rappelant dans la Capitale le discours-programme du Président de la République Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo dans sa partie sur le combat des anti-valeurs, l’homme qui passe pour l’Autorité Morale du système judiciaire congolais (il a été deux fois ministre de la Justice et président du très respecté Conseil judiciaire), le Patriarche Joseph N’Singa Udjuu Ongwakebi Untube a des mots qui glacent, s’agissant des élections au Congo. «Dans le secteur politique, avec le système de scrutin au second degré, la corruption des députés provinciaux pour l’achat de leurs voix lors du vote des gouverneurs et des vice-gouverneurs est devenue une preuve de puissance financière pour plusieurs candidats qui ne se gênent même pas, d’étaler sur la place publique leurs taux de corruption à proposer aux députés provinciaux. Une fois élus et installés à la tête de la Province, le Gouverneur et le Vice-Gouverneur s’emploient d’abord à utiliser les ressources publiques pour recouvrer d’importantes sommes d’argent dépensées pour l’achat des consciences des élus provinciaux et ensuite pour étouffer tout au long de leur mandat toute tentative des députés provinciaux de contrôler leur gestion de la Province. Dans de telles conditions, nous pouvons affirmer que les ressources générées par les provinces ne profitent pas aux populations qui continuent jusqu’aujourd’hui de croupir dans la misère».
Face à cette situation, N’Singa prie le Président de la République de «réagir immédiatement en sa qualité de garant du bon fonctionnement de toutes les institutions tant nationales que provinciales (et) en attendant que certaines dispositions constitutionnelles et légales en matière de désignation des gouverneurs et vice-gouverneurs soient revisitées», il demande au Chef de l’état de «nommer par ordonnance les personnalités chargées de diriger les 26 provinces du pays».
NON PLUS EXEMPTE.
Il faut être juste.
Si au niveau provincial, la question est patente, les Législatives nationales n’en auront pas été exemptes... S’il n’y a aucun doute que nombre de députés nationaux ont été élus du fait de leur popularité, il en existe d’autres - les plus nombreux - qui ont été mis sur les listes des élus dans les circonscriptions électorales par les agents électoraux dans les centres de vote ou carrément par le bureau de la centrale électorale à Kinshasa.
Dans son édition n°1444 datée du jeudi 14 février 2019, Le Soft International relate un incroyable scandale décrit par des témoins à la séance de proclamation samedi 12 janvier 2019 aux premières heures du matin des résultats des Législatives du 30 décembre 2018.
«Le soir de la proclamation des résultats des Législatives nationales et provinciales fut un vrai Théâtre de Chez Nous. La province du Kwilu s’est trouvée étrangement éparpillée (et pour cause?). La province a été appelée trois fois contrairement à ce qui se fait d’ordinaire et contrairement à d’autres provinces. C’est croire que le Kwilu avait trois provinces. Plus grave, la séance avait été levée quand l’assistance crie qu’une circonscription avait été oubliée. Laquelle? Masimanimba. Tiens, tiens! Et pour cause! On voit les membres du Bureau de la Céni en rire, faussement (le crime n’est jamais parfait!), se concerter, gênés, puis, le premier Vice-président Norbert Basengezi Katintima arracher avec arrogance une feuille de papier vierge de son bloc-notes, inscrire lui-même à la main les noms de ses «élus» de Masimanimba, tendre le morceau de papier à lire à la dame qui avait donné lecture des résultats après que le président de la Ceni Corneille Nangaa Yobeluo eût jeté un coup d’œil , sourire aux lèvres... Tout ça, devant les caméras du monde qui filmaient en direct et que des chaînes de télévision montreront le soir» (Le Soft International, n°1444 datée du jeudi 14 février 2019).
De là la crédibilité gravement éteinte des dirigeants de la Centrale électorale, point modèle de probité pour leurs agents. Ceux-ci souvent et publiquement déclarent avoir été recrutés et affectés en vue d’une mission: donner des voix à tel ou tel parti du pouvoir et, du coup, faire élire tel ou tel candidat...
On peut comprendre le nombre de retraits des candidatures à l’élection des gouverneurs ou aux sénatoriales.
ILS ABANDONNENT.
Le premier à se retirer de cette course fut précisément l’Anti-Corruption Luzolo Bambi Lessa.
Dans une correspondance datée du 22 février adressée à Nangaa, il explique sa décision motivée par le monnayage des voix des députés provinciaux. «Croyant aux valeurs éthiques et républicaines dans l’accès aux charges publiques et dans la gestion de celles-ci, je prends librement la décision de retirer ma candidature de l’élection sénatoriale», écrit le Flic anti-corruption qui se présentait dans le Kongo Central.
D’autres candidats avaient déjà dénoncé ces pratiques d’un autre âge, Adam Bombole, Vidiye Tshimangan etc.
Le 13 mars, le ministre honoraire Steve Mbikayi (Enseignement supérieur) écrit sur son compte Twitter: «élections sénatoriales. J’ai retiré ma candidature pour deux raisons: 1. L’inutilité de cette institution dont je demande la suppression; 2. le marchandage des voix par les députés provinciaux. à Kinshasa, une voix est vendue à au moins US$20.000. Scandaleux».
Le même jour, dans une lettre signée de Kananga (Kasaï Central), le Premier ministre honoraire évariste Mabi Mulumba annonce avec «regret et grande tristesse» son retrait de la course.
«Ma décision est motivée par le scandaleux monnayage des voix des députés provinciaux allant jusqu’à US$ 30.000 par électeur». Puis: «Il n’est pas acceptable qu’une chambre parlementaire prestigieuse comme le Sénat soit discréditée par un mode électoral perméable à la corruption de façon aussi notoire».
Puis: «Cette dénonciation de la corruption devra inviter la Céni à redoubler de vigilance pour prendre des mesures idoines pour crédibiliser la suite du processus électoral».
La Centrale électorale nationale a-t-elle le mental nécessaire de l’amener à poursuivre sa mission? Ce machin n’est-il pas définitivement désaffecté et discrédité? Dès le lendemain des sanctions américaines prises contre ses dirigeants, la CénI, dans un communiqué, annonce que son président «rejette en bloc ces sanctions» sans savoir comment quand elles s’appliquaient imparablement.
«Je n’ai aucune idée sur ces mesures, j’en ai pas des commentaires et je rejette les allégations de corruptions», déclare plus tard Nangaa à l’agence britannique Reuters sans convaincre.
L’homme doit certainement encore à apprendre sur la corruption qui se déroule à vaste échelle sous ses yeux, dans ses murs, dans le système électoral congolais...
Rien que sur la machine à voter (à voler) acquise en Corée du Sud chez Miru System avec des opérations retour ou la nomination des élus par la Centrale électorale congolaise.
Nangaa qui ne manque pas de verve sinon d’arrogance avait rêvé d’une notoriété planétaire à la suite de ses élections du 30 décembre. Il a vite été rattrapé par l’Oncle Sam et voit l’opprobre le pousser à quitter l’histoire par la petite porte. Désignés Wanted par les états-Unis d’Amérique, les jours de Nangaa et de ses proches étaient désormais comptés à la Céni.
Nageant dans la corruption, de pied en cape, ils ont perdu toute crédibilité et toute légitimité de conduire un processus électoral quelconque. Pas sûr, sauf miracle, qu’ils conduisent celui du Grand Nord et de Yumbi... Avec risque de terminer autrement ses jours. Ce n’est pas Fatshi qui le maintiendrait contre vents et marées d’une communauté internationale hâte à rejoindre Washington. Le Congo n’est pas un pays... à part.
D. DADEI.