- ven, 23/10/2015 - 09:05
Qui est Soraya Aziz Souleymane qui suscite admiration auprès de ses compatriotes pour sa brillante réussite professionnelle comme pour les combats qu’elle mène pour l’émergence d’un Congo nouveau?
Elle a été élue Femme Minière de l’Année 2015 (WomanOf TheYear_2015) le 15 octobre 2015 au cours d’un banquet offert par le gotha minier au salon du tout nouvel hôtel Béatrice, à Kinshasa.
Quatre ans plus tôt, elle avait été proclamée Miss Leadership Congo 2011 pour avoir formé plus de 4000 femmes adultes à la lecture, à l’écriture, à des opérations budgétaires, à la vie associative, etc.
Qui est Soraya Aziz Souleymane qui suscite admiration auprès de ses compatriotes pour sa brillante réussite professionnelle comme pour les combats qu’elle mène pour l’émergence d’un Congo nouveau?
Sur cette vénérable diva - le mot n’est pas fort - du réseau social Twitter (304 millions d’utilisateurs/mois, 500 millions de tweets/jour), l’un d’eux (@Achi_MATHE) a posté à l’adresse du ministre Tryphon Kin-kiey Mulumba (@kkmtry) le tweet ci-après: «Vous cherchez un stock de compétences en RDC, en voici une @SoraZIZ. Il y en a d’autres si vous voulez».
Ce compatriote faisait allusion à un propos du ministre Tryphon Kin-kiey Mulumba tenu mi-août sur des médias publics français (TV5 Monde, France 24, Africa 24, Rfi, etc.), à Jeune Afrique, au Soir de Bruxelles, à l’agence belge Belga, à Afrikarabia, etc., expliquant qu’il n’était pas donné au premier quidam de se hisser à la tête d’un pays de la taille du Congo - un sous-Continent avec ses 400 tribus; de le diriger pendant autant de temps; que dans nos pays, la compétence n’était pas une denrée également partagée sur le modèle d’Athènes où la démocratie est née, et où, un système représentatif a fonctionné en se fondant sur le hasard, le tirage au sort; que si, en 2001, le Congo, a choisi un jeune âgé de 29 ans quand le pays regorgeait des docteurs en Droit, en Science Po et des Saint-Cyriens, qui ne parlait aucune langue de la Capitale, cela ne saurait être un hasard. Il n’empêche! Ce propos - «stock de compétences avérées» - a fait et continue de faire débat dans le pays, dans la diaspora, dans nos rues, dans nos médias, sur nos réseaux sociaux, dans nos salons ouatés.
Au lendemain du posting de @Achi_MATHE, le Soft International qu’édite Finance Press Group dont le ministre Tryphon Kin-kiey Mulumba est fondateur, s’est mis par vent favorable, sur les traces de Soraya Aziz Souleymane. Une femme congolaise compétente. Portrait.
Ceux qui la connaissent la présentent comme une femme unique. Née à Uvira à l’hôpital général de référence de la ville, au pied des hauts plateaux de Minembwe au Sud Kivu où des grappes humaines se déplacent emmitouflées jusqu’aux oreilles dans des manteaux fourrés comme en Europe en plein hiver, Soraya Aziz Souleymane fait ses études primaires et secondaires au Centre scolaire congolais de Bujumbura dans la plaine toute proche mouillée de la Ruzizi.
Elle explique: «C’était plus facile et plus rapide pour nous d’obtenir nos résultats d’examens à partir de ce centre lié à l’ambassade du Congo au Burundi».
Une mère chrétienne Luba-Kasaïenne originaire de Miabi à Tshilenge dans l’ex-Kasaï Oriental, au centre du pays; un père musulman pratiquant d’Ubuari au Sud-Kivu à l’extrême est du Congo.
Abdoulaziz Souleymane et Dalila Mwanza Kapinga Aziz portent un regard neuf sur la jeune fille qui vient de naître, qu’ils estiment, avant que le gender ne devienne un must de gouvernance, qu’elle a les mêmes chances qu’un jeune homme sinon plus, pour s’accomplir.
LE HASARD EXISTE-T-IL?
Les deux tourtereaux ont fait connaissance au cours de leurs études dans la Capitale, à l’université et se sont unis pour la vie.
Ils ont eu six enfants dont quatre filles, tous détenteurs au moins d’un diplôme de licence. Soraya est la troisième des filles et le troisième enfant du couple. Depuis, les époux coulent des jours heureux au Kenya où ils se sont installés après avoir fui les guerres fratricides du Kivu sans que cela ne les empêche de faire un va-et-vient au pays humer un air parfois irrespirable…
Soraya Aziz Souleymane est polyglotte. Elle parle français aussi bien qu’anglais, swahili aussi bien que lingala. Elle baragouine des mots de tshiluba.
Congolaise, elle se sent à l’aise partout, à l’est comme à l’ouest alors qu’elle attend d’être intronisée cheffe tribale à Miabi, au cœur du Congo, après que la fratrie lui eût trouvé un nom, Mukajana (jeune femme dynamique et entreprenante).
Son nom d’Uvira Soraya, reçu le 1er août 1981 à sa naissance, signifie l’étoile la plus brillante du Ciel en musulman. Soraya Aziz Souleymane a fini par se convaincre que le hasard pourrait ne pas être…
Dans son album photos, on la voit aux côtés de personnalités de tout premier rang de la scène politique américaine - cette Amérique où elle suivit une partie de sa formation après une maîtrise en Développement à Sussex en Grande Bretagne et où elle exerça des fonctions exécutives à Phoenix en Arizona au siège de la maison mère de TFM (Tenge Fungurume Mining), Freeport-Mc Moran Copper & Gold Inc).
En premier Henry Kissinger, l’ancien secrétaire d’Etat américain sous deux présidents républicains Richard Nixon et Gerald Ford, passé à la postérité vivant, un Prix Nobel de la Paix à la clé pour sa contribution à la résolution de la guerre du Viêt-Nam et celle du Kippour.
Les époux McCain dont Cindy, l’épouse très active au Congo, est son modèle achevé. «Je voudrais pouvoir tant lui ressembler», supplie cette jeune femme de 34 ans alerte comme à genoux, profondément croyante, dans ses notes personnelles données à lire au Soft International.
«C’est une femme exceptionnelle. Elle est leader, son mari aussi. Elle a un grand cœur, comme ça! Et d’une humilité désarmante», écrit-elle.
Son album photos contient des Marin’s qu’elle a rencontrés un jour dans la vie, des activistes afro-américains qu’elle admire, des dizaines d’autres célébrités dont elle se sent proche…
Sur son compte Twitter qui approche le pic de 7.000 followers, celle qui reste continuellement le doigt collé sur son clavier de smartphone ou l’œil rivé sur un matos à l’écran en saillie après plusieurs accidents et qu’elle ne souhaite pour rien au monde changer - «je perdrais de précieuses données», explique-t-elle - qu’elle ne quitte qu’aux petites heures du matin, a longtemps recadré des débats de ses suiveurs, réclamant tolérance, droit d’être différente, exhortant à ne juger et condamner personne par principe comme cela arrive sur les sites en ligne et les réseaux sociaux congolais!
Il lui arrive d’en interdire l’accès à certains quand «des tchats extrêmes en font trop». «Je n’ai pas vocation à être perturbée dans mes convictions, nous explique-t-elle, ferme. Je reste une personne de principes mais raisonnable», atténue-t-elle.
Mi-octobre, au lendemain de Béatrice, ce profil a changé pour afficher ce que Soraya Aziz Souleymane est fondamentalement - une mère attentionnée pour sa fille Latifah, de 10 ans - qu’elle couve à Kinshasa dans sa famille - «pour des raisons de convenance personnelle» - quand elle court le monde dans tous les sens - ou entend être pour ses compatriotes - une femme qui lutte imperturbablement pour la gouvernance dans son pays.
Proclamée Miss Leadership Congo 2011 pour avoir coaché plus de 4000 femmes adultes, la voici quatre ans plus tard, Femme Minière de l’année 2015 (Woman Of TheYear_2015), élue au cours d’une soirée le 15 octobre dans le vaste salon aseptisé du tout nouvel hôtel Béatrice, boulevard du 30 juin.
Le gotha minier congolais du club IPAD (l’équivalent sud-africain de Indaba, réunissant Africa Mining Review Magazine ainsi que la section minière du patronat FEC, Fédération des Entreprises du Congo) qui l’a couronnée lors d’un banquet, s’est basé sur une nomination des acteurs de la société civile qu’elle a encadrés et dont elle a renforcés les capacités dans le domaine de la transparence des industries extractives ou de l’impact sur les activités industrielles sur les communautés locales, au cours d’un an au Centre Carter, une ONG américaine œuvrant sur la gouvernance et sur la santé, dont elle fut à Lubumbashi, au Katanga, le directeur Pays Adjoint, poste qu’elle a volontairement quitté le 14 septembre pour se laisser ouvrir d’autres opportunités.
Le prix Woman OfTheYear d’IPAD est attribué chaque année à une femme reconnue pour sa compétence et pour sa contribution remarquable et inspirationnelle dans le secteur de la gouvernance minière.
Les promoteurs du prix ont vanté «une femme déterminée, motivée, experte dans son domaine», qui s’est consacrée au secteur lors des années passées dans le privé, chez le Canadien Banro Mining (mines d’or au Sud Kivu et au Maniema) et à TFM (cuivre et cobalt au Katanga) comme dans le monde associatif au Centre Carter. «Un modèle positif et motivant pour d’autres femmes».
En entendant ces paroles résonner dans ses oreilles depuis les hauts parleurs du salon Béatrice, Soraya, stressée, assise à une table où elle ne connaissait personne, débarquant peu avant d’un avion après sept heures de vol avec plusieurs correspondances, moulée dans une impeccable robe bleue de soie, hoche la tête de haut en bas calmement en signe d’acquiescement.
Elle se décrit elle-même comme une personne «très ambitieuse et très déterminée» mais toute son ambition et toute sa détermination sont à l’heure actuelle «focalisées» sur son pays, le Congo.
Détentrice de plusieurs diplômes universitaires, membre de plusieurs clubs anglo-saxons parmi les plus prestigieux dont l’un patronné par le président Obama et un autre qui veut «refaire ou donner une forme au monde», cette femme qui traîne derrière elle quatorze ans d’expérience dans des secteurs liés à la communication, au développement, à la gouvernance et à la vie associative, se présente avant tout comme une diplomate internationaliste qui croit «en un Congo prospère». Qui veut travailler aussi dur qu’elle peut pour voir émerger «le Congo que nous méritons et que nos générations futures méritent».
A SES PARENTS.
Un accomplissement professionnel qu’elle doit à ses parents dont elle dit être fière.
«Le fait pour eux d’avoir eu quatre filles avant les deux garçons venus plus tard, a été l’élément déterminant pour nous. Nous, les filles, avons été élevées dans un environnement où le fait d’être femme était célébré. Un environnement qui nous expliquait que nous pouvions faire tout ce que les garçons peuvent faire sinon mieux professionnellement; que nous étions tout aussi compétentes sinon plus compétentes que les garçons. Nous avons été élevées par des parents qui ont vraiment respecté l’aspect genre certainement du fait d’être tous deux des universitaires».
La première rencontre entre Abdoulaziz Souleymane et Dalila Mwanza Kapinga a lieu à Kinshasa.
Ce fut en octobre 1974 au pied de l’immense podium dressé sur la pelouse du stade du 30 Mai à l’occasion du concert de la star américaine James Brown dont le passage - événement planétaire - révolutionna la musique congolaise. Il s’ensuivit le passage de Tabu Ley alias Seigneur Rochereau et son Afrisa International à l’Olympia à Paris, celui de Franco Lwambo Makiadi et son OK Jazz, puis d’autres groupes musicaux dont Sosoliso du trio Madjesi désormais lancés dans le show business plutôt que dans la lancinante rumba…
Devant les caméras du monde, le jeune Abdoulaziz Souleymane jouait sur le podium géant en lever de rideau d’un festival qui réunit trois jours durant, outre «Mister Dynamite» («Sex Machine» ou «The Greatest Artist of All Time») des grandes voix de la musique noire (BB King, Bill Wethers, Celia Cruz, Manu Dibango, Myriam Makeba etc.) en marge du «Rumble In The Jungle» (le combat dans la jungle, le combat du siècle Ali-Foreman) ainsi baptisé par le promoteur américain Don King. Deux énormes boxeurs Noirs Américains que tout opposait.
Emblème de la lutte anti-ségrégation aux Etats-Unis, Cassius Clay (Mohamed Ali) était venu chercher sa revanche sur les terres de ses aïeux et les avait conquises avec son «Ali Bumu Ye» (Ali, tues-le) contrairement à George Foreman mal à l’aise.
Le jeune étudiant Abdoulaziz Souleymane était guitariste du célèbre groupe de l’Université nationale du Zaïre, UNAZA (aujourd’hui UNIKIN), The Alabama Casino.
L’étudiante Mwanza Kapinga venue voir le spectacle et encourager le groupe musical de l’Université, est littéralement conquise par ce virtuose swahiliphone qu’elle n’avait jamais eu l’occasion de voir sur le campus et qui concurrençait les plus grands guitaristes d’un festival planétaire réunissant les plus grandes stars de la scène soul et blues.
Et, entre le jeune Souleymane d’Ubuari et la jeune Mwanza Kapinga Dalila de Miabi, fille d’un puissant colonel de l’armée de Mobutu (ex-FAZ), ce que l’on pouvait craindre se produisit: l’irrésistible coup de foudre qui les emportait tous les deux. Le reste allait se régler sur le campus…
LARME A L’ŒIL.
Depuis, toute la fratrie gratte la guitare. Une fois par jour, de 16 à 17h, Soraya s’isole pour une séance guitare. Elle ne se déplace jamais sans en bandoulière ou en cabine cet instrument de musique à cordes, l’un des rares objets qu’elle a ramenés de Lubumbashi après avoir dit adieu à ses collaborateurs du Centre Carter.
Depuis, elle s’est enfoncée dans la fourmilière kinoise où elle veut réaliser son rêve.
«Mère d’une petite fille et tante de plusieurs neveux et nièces, nous explique-t-elle, je voudrais les voir prospérer dans un Congo de loin meilleur que celui que nous avons aujourd’hui. Un Congo qu’ils méritent; où il y a la paix, la sécurité; où l’éducation, la santé sont des acquis; avec une classe moyenne qui peut aider le Congo à aller de l’avant à travers l’entrepreunariat et la création d’autres opportunités économiques; un Congo fier de sa culture - que cela soit dans le domaine de la musique, des sports, de la sculpture, des arts plastiques, des médias; un Congo dont tout le monde puisse être fier».
«J’appelle tous les Congolais à s’unir et à travailler dur pour cet objectif. Notre hymne national lui-même, dit: «O peuple ardent, par le labeur, nous bâtirons un pays plus beau qu’avant». «Cela dit tout», conclut-elle. Une ambition. Une vision. Un programme.
Elle qui fait part du «décalage» qu’elle a à affronter, face certains événements, à chaque fois qu’elle s’absente du pays et qui appelle la diaspora à faire montre d’humilité «face au savoir-faire local».
Soraya Aziz Souleymane sait qu’elle peut, en tout instant, compter sur ses sœurs dont Dr Aziza Aziz Souleymane arrivée depuis peu sur Twitter, ses frères, ses amis - les amis du réseau qu’elle a su tisser, depuis des années, depuis l’université - et qui constituent son réseau.
Les membres de ce réseau sont ses plus grands conseillers, ses complices, sa source d’opportunités diverses. En premier lieu, le club Cogito (ergo sum).
Le lendemain de Béatrice, alors que la nouvelle de son prix se répand sur Facebook et Twitter, que de partout ça tchate toutes les secondes sur le smatphone aplati, cette femme qui aime la biodiversité qu’elle protège, se passionne pour les oiseaux qu’elle étudie et aime entendre chanter, projette un voyage dans les Virunga, cette amoureuse du travail et de son pays qu’elle vante à chacune de ses sorties, qui déteste la violence, l’injustice et la pression, a une pensée et deux mots. A son Congo. A son réseau. A ceux qui l’ont nominée. A ceux qui l’ont élue entre quatre finalistes.
Une pensée, deux mots d’un pathétique à prendre une larme à l’œil: Bonjour, merci. «Bonjour mon #Congo Merci du fond du coeur à tous ceux qui ont cru, ont rendu ce couronnement possible. #RDC #iLead pic.twitter.com/U0oDcpIq1H
Soraya RDC (@SoraZiZ) 16 Octobre 2015
T. MATOTU.
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