- mar, 06/10/2020 - 12:31
KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1502|LUNDI 5 OCTOBRE 2020.
Cela aurait pu être une rencontre ordinaire au stade Vélodrome de Kintambo, sans une saillie d’annonces, n’eussent été les réseaux sociaux qui ont fait part la veille d’annonces prêtées au Président de la République Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, de passage à Bruxelles. Une vidéo diffusée le lendemain a fait entendre des propos autres que ceux rapportés sur des sites belges à contenu congolais. Mais le feu avait pris.
L’homme à la courtoisie des rois qui dégouline sur son corps, se mettant debout pour saluer ses visiteurs même des plus humbles, inspirant respect et confiance au point que la plus grande banque du monde lui ferait crédit sans garantie, qui inspire la peur en même temps qu’il séduit, Yezu Kitenge Nz s’est senti interpellé, a revu le programme de cet événement au grand bonheur d’une foule qui avait envahi, dès 9:00’ le cœur de cette commune populaire et sans bouger jusqu’à 17:00’, sans avoir écouté et entendu celui qui n’est pas dans la cabine passagers du vol Congo mais dans le cockpit, informé des détails du vol, ce qui va, ce qui l’est moins, où va le vol, les contraintes météo, comment les contourner, poursuivre ou pas le vol. Uniquement Le Soft International.
Il l’avait dit, un dimanche 3 février 2019, 19 heures, au dîner offert par le Président de la République à du beau monde voire du très beau monde, trié sur les volets, élégant de pied en cape.
Ils étaient tous là venus de tous les horizons politiques, n’ayant pas forcément voté pour lui - le vote est secret - ou n’ayant pas publiquement, officiellement appelé à voter pour lui. Cathérine Nzuzi wa Mbombo, Evariste Mabi Mulumba, Evariste Boshab Mabudj, Adolphe Lumanu Mulenda Bwana Nsefu, Léonard She Okitundu, Jacques Tshimbombo Mukuna, etc.
Des personnalités politiquement diverses mais qui se reconnaissaient une origine et une âme communes : Kasaï, Grand Kasaï. L’homme qui les a mis ensemble : Yesu Kitenge Nz, les a conduits en cette grande salle de la Cité de l’UA, à un jet de pierre de la trop modeste résidence du Président de la République.
Un extrait de son mot prononcé à ce dîner résonne encore et toujours, d’où il tire existence et légitimité : «Monsieur le Président de la République, Chef de l’Etat, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo. Je cite le nom, j’appuie sur le surnom et ensuite le prénom (...). C’est cette répétition que les Ancêtres aiment entendre en écho».
«Je m’adresse à celui qui nous permet de nous retrouver en fête ce soir. Celui sans qui nous ne serions pas ici en train de savourer cette victoire, ce bonheur. Rien qu’à nous regarder, les visages en disent plus que les mots».
«Puisque suivant nos croyances ancestrales, les morts ne sont pas morts, puis-je vous demander, en lieu et place de l’habituelle minute du silence, de vous mettre debout et d’applaudir notre héros national, Patrimoine de la RDC et, aussi, pourquoi pas, du Grand Kasaï, le très estimé Etienne Tshisekedi wa Mulumba, d’heureuse mémoire.
Nous souffrons de votre absence. Mais, nous avons retenu de vous une grande leçon : dans l’obscurité, une étincelle pourrait être ta lumière. Mais sachez, très respecté Président Etienne Tshisekedi, comme je vous l’avais promis, il y a deux ans, tous désormais nous sommes autour de Félix. Ne craignez donc rien, nous tenons et nous maintiendrons notre promesse (...). Les enfants d’une même famille se ressemblent comme des jeunes bananiers, impossible de distinguer la banane plantin de la banane pomme».
«Le Grand Kasaï est ici réuni dans sa diversité et dans son unité pour vous exprimer son appui, non pas du bout des lèvres, mais du fond du cœur. Henry de Montherlant disait, la fidélité n’est pas dans les actes mais dans le cœur. Et le fond du cœur, dit un proverbe chinois, est plus loin que le bout du monde. Monsieur le Président de la République, avant, Vous aviez Votre base, Vos militants. Aujourd’hui, Vous avez tout un pays, toute une Nation dont le Grand Kasaï qui célèbre ce soir Votre succès, mais aussi une réussite collective». (...)
«Nous Vous savons à l’écoute de l’opinion. «Un chef, disait Paul Valéry, est un homme qui a besoin des autres». «Un chef écoute les avis d’un imbécile». «Vous êtes celui qui ne court pas derrière la chance, mais qui l’appelle. Vous êtes aussi un homme de surprises qui a pratiqué cet adage : «Votre sort ne doit pas être entre vos mains, mais dans votre cœur, afin qu’il ne passe d’une main à l’autre»». «Vous avez rêvé mais haut : «Il faut rêver très haut pour ne pas réaliser trop bas».
PAR LUI PASSE LA PAROLE POLITIQUE DU CHEF DE L’ETAT.
Bis repetita samedi 30 mars 2019. Personnage clé du régime Mobutu, Jacques Tshimbombo Mukuna a décidé de recevoir chez lui, en sa maison, sur les hauteurs de la ville, avenue Kananga, cette même crème kasaïenne en y associant des membres d’une élite issue d’autres provinces, pour célébrer la nomination de celui dont les relations avec le Président de la République, Chef de l’Etat, se resserrent jour après jour, faisant de lui l’homme par qui passe la parole politique publique du Président de la République.
En se levant, après une rafale de pluie qui a rafraîchi les lieux sans doucher quiconque, l’homme qui parle vrai mais affectionne la parabole, a ces mots à la bouche : «Ce soir, la République ne se trouve ni à la Cité de l’Union Africaine - la résidence provisoire du Président de la République, ni - encore moins - à Kingakati. La République se trouve ici, avenue Kananga, à Binza Ngaliema, autour de nous, avec nous, parmi nous. Le Président de la République sait que tous, vous êtes ici... ».
Yesu Kitenge Nz n’exagère pas. Il montre ce qu’un entourage d’un Chef de l’Etat peut représenter, le rôle qu’un entourage est appelé à jouer dans la réussite ou l’échec d’une action à la tête d’un pays.
N’a-t-on pas entendu dire que ce Chef est bon hormis son entourage qui lui fait échouer des politiques publiques ? Par ses mots, Yesu Kitenge Nz, voulait mettre ces hommes et ces femmes face à leurs responsabilités. Le Congo ira ou n’ira pas ; il marchera ou ne marchera pas. Tout dépend de ceux qui étaient rassemblés là, ce soir-là, autour de lui, avenue Kananga...
Ce samedi 3 octobre, une année après, toujours dans la Capitale mais en pleine cité populaire, en ville basse - au propre comme au figuré - dans la commune de Kintambo, sur la pelouse du stade vélodrome, Yesu Kitenge Nz en remet une couche. Cette fois une grande. Certainement une très grande.
La veille, 2 octobre, en se réveillant, il a décidé, lui, Yesu Kitenge Nz, de requalifier son discours du lendemain, de recadrer son meeting, sa rencontre annoncée de longue date avec une base tshisekediste mobilisée et conduite par le parti MSC allié du parti présidentiel UDPS, de Laurent Batumona Nkhandi Kham nommé le 10 juin Directeur Général de l’Office de gestion de la dette publique, OGEDEP.
Désormais, il s’agit d’un «meeting de vérité».
Certes, le 2 octobre au matin, les événements se sont précipités.
A Bruxelles où le Président de la République venait de terminer une visite privée d’une semaine, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo a rencontré un groupe de journalistes belges d’origine congolaise et la rencontre a donné lieu à des compte-rendus de presse.
L’un d’eux publié dans la nuit de jeudi 1er à vendredi 2 octobre, est diversement commenté à Kinshasa et dans diverses autres capitales du monde qui suivent la politique congolaise.
Selon un extrait, le Président de la République a déclaré qu’il n’entend nullement s’éterniser au pouvoir.
Si cela ne devrait pas donner lieu à polémique - nul ne saurait s’éterniser au pouvoir - c’est la suite qui surprend, rebute, donne lieu à une levée de boucliers.
Le journaliste a mis une phrase dans la bouche du Président de la République : «Il est humainement épuisant d’accomplir deux mandats à la tête de l’Etat...».
Ces deux phrases mises ensemble - «Je n’entends pas m’éterniser... Il est humainement épuisant d’accomplir deux mandats ...» - troublent, le moins que l’on puisse dire. Le Président est-il fatigué mais si tôt et à quel âge ? (intellectuellement, physiquement ?
YESU KITENGE
PREND LE TAUREAU PAR LES CORNES.
Serait-il malade, encore qu’il se rend souvent à l’étranger... serait-ce pour des soins...) à moins de deux ans du début de son mandat ? La charge de l’Etat serait-elle trop lourde au point qu’il aurait décidé de s’en aller au terme de son mandat actuel et, peut-être avant le terme de ce mandat ? Est-il en train de donner raison à ceux qui disent qu’un accord de type Poutine-Medvedev avait été signé à Kingakati avec l’ancien et le nouveau Présidents comme le laissent entendre des réseaux sociaux et que ce départ ouvrirait le chemin au retour du Président Kabila, pourtant sénateur à vie ?
Vient le momentum choisi.
Est-il le bon? Quel message envoie-t-on aux électeurs - pour la suite des combats politiques -, à l’économie, à des candidats investisseurs qui pourraient ne plus vouloir se risquer dans un pays sans miser sur la durée? Au fond, l’annonce de ce retrait n’est-il pas trop prématuré ? Qu’est-ce qui vraiment cloche, a cloché ?
Il y a, sans aucun doute, urgence, extrême urgence. Celui qui ne cesse de répéter qu’il est bien au cockpit et non en cabine dans ce vol Congo Fatshi et qu’il assiste voire participe à tous les mouvements de vol, aux risques qu’il pourrait courir, aux petites et grosses tempêtes qui pourraient arriver et faire ou non des dégâts au vol, décide précisément ce jour de prendre le taureau par les cornes et de foncer droit en allant distiller des vérités au public et, au passage, en tonnant fort voire très fort afin qu’il soit sûr qu’il a été entendu et bien entendu, en appelant les troupes à se ranger derrière lui, derrière le Président de la République, derrière le commandant de bord, à n’avoir aucune peur car les commandes sont tenues et bien tenues. Un discours musclé, très musclé, le moins que l’on puisse dire, un discours d’apaisement de la base, délivré du haut d’une tribune en métal dressée au cœur du stade Vélodrome.
En pointe pour tout recadrer systématiquement quand il s’agit de l’image écornée ou en voie de l’être du Président de la République, étant dans la droite ligne des promesses faites au père Sphinx de Limete et de l’engagement pris et qu’il a rappelés le dimanche 3 février, devant toute la colonie kasaïenne, l’homme présenté à la foule réunie, samedi au Stade de Kintambo, tout logiquement, comme «l’œil, l’oreille, la bouche du Chef de l’Etat», ce redresseur de torts, est bien dans son élément.
Afin que nul n’ignore rien, il tient, d’entrée de jeu, à préciser à haute et intelligible voix, la légitimité de sa parole : «Le Président sait qu’il se tient ici un meeting du MSC de Laurent Batumona. Au moment où je prends le micro, le Président sait que je vous parle».
Encore que le Haut Représentant et Envoyé Spécial tient, à la main, une feuille de papier blanc sur lequel il a couché des mots auxquels il se réfère.
Annoncé à pour 10:00’, le programme a commencé à 15:00’ sous un soleil d’aplomb mais qu’importe ! Le meeting tire jusque peu avant 17:00’ sans que le public attendant les annonces, qui voit défiler sur le podium, plusieurs intervenants du parti de Batumona, ne se lasse.
S’adressant dans les quatre langues du pays avec certes un accent tout particulier en tshiluba - la langue qu’il maîtrise le mieux - Yesu Kitenge Nz décidé d’éventrer le boa, replace ce jour comme un «grand jour», attaque sur l’harmonie et la cohésion qui ne sont pas au rendez-vous - « les relations ne marchent pas » - au sein de la coalition au pouvoir CACH-FCC avant de demander à la foule de donner son avis sur la question, et de prendre acte de la réaction du public, citant, pour cet homme qui n’écrit rien ou n’ouvre jamais la bouche, sans une citation, asiatique ou occidentale, en l’espèce celle du Français Charles De Gaulle : «Je vous ai compris».
Puis, il en vient à la situation « trouble » du pays. «A l’Est (groupes armés), au Sud à Lubumbashi (Bakata Katanga), à Kinshasa (Kuluna), à nouveau, le Représentant personnel du Président de la République et son Envoyé Spécial veut écouter la base. «En l’espèce, que demandez-vous au Président de la République?»
Puis, s’arrête, laisse la foule tout ouïe un peu surprise , s’exprimer. Elle parle du coût de la vie, évoque le dollar américain systématiquement à la hausse, les sauts de mouton dont l’inauguration avait été annoncée, avec assurance, pour décembre et qui n’a pas eu lieu, le service de l’eau et de l’électricité que lui, Yesu Kitenge Nz, n’a pas en permanence à son domicile.
Puis la grande annonce : «Félix Tshisekedi ira jusqu’à la fin de son mandat en cours qui prend fin en 2023 et se succédera à lui-même, en 2023,
En clair, «Félix fera deux mandats et pas un seul, contrairement à ce que disent les réseaux sociaux» alors que la version de cette interview circule parlant de «plus de deux mandats», ce qui est différent et règle la question...
Il n’empêche ! Yesu Kitenge Nz le répète deux fois (« il ne fera pas trois mandats car cela n’est pas constitutionnel, encore que trois mandats ça fatigue») avant de lancer un appel à la foule: «Soyons prêts pour 2023».
«LES IMPEACHMENTOIS
SOUS UN ARBRE, SOUS LE SOLEIL».
Puis la phase de coups et de coups durs assénés, des uppercuts multipliés quand on sait la courtoisie des rois qu’il coule sur le corps, se mettant toujours debout pour saluer ses visiteurs même des plus modestes, inspirant respect et confiance au point que la plus grande banque du monde lui ferait crédit sans garantie mais qui inspire aussi la peur quand il séduit.
«Ceux qui disent que Félix a échoué, c’est eux qui ont échoué. Qu’ils sachent que si la passation de pouvoir a été calme, dans quel état le pays était, après une soixantaine d’années de mal gouvernance?».
Friand d’anathèmes, il écorche encore plus ceux qui veulent et planifient la chute de Félix. «Nous, on est au pouvoir, eux les impeachmentois sont et demeureront sous un arbre, sous le soleil, en train de se faire piquer par des abeilles».
D’aligner sa vingtaine de vérités : « Dieu a choisi Félix et vous l’a donné pour l’élire»; «il n’y a pas deux Présidents de la République (au Congo); il n’y en a qu’un : C’est Félix.
Le Président c’est Félix» ; «Félix a l’impérium et nul autre l’a»; «c’est lui et lui seul qui détient le bic bleu et le bic rouge» (en clair, lui seul peut nommer et révoquer); «Félix est le commandant des Forces armées»; «Félix est combattu nuit et jour pour sa politique anti-corruption, anti-impunité, pro-peuple mais sachez que ce combat ne s’arrêtera pas »; «l’Etat de droit va se réaliser»; «Félix n’a peur de rien, lui seul fait peur»; «tout est makelele ya wenze»; «la loi Minaku et Musakata (Sakata), eza Mangungu ya Kalamu (du chantage)», signe que Kalamu ne saurait nullement inquiéter Kinshasa ; «le peuple est le patron de Félix, lui, Félix est au service du peuple, à votre service à vous peuple»; «Félix est prêt jusqu’au sacrifice suprême, pour son peuple»; «l’unité nationale, l’intégrité nationale, c’est à cela qu’il se bat, nuit et jour»; «la corruption - ce credo de Fatshi - doit prendre fin. Il nous faut arrêter ça; nous devons en finir avec ça; nous devons combattre la famine, ceci est dans son programme, tout comme la gratuité de l’enseignent»; «FCC-CACH c’est d’abord du respect mutuel, l’égalité de traitement, ce n’est jamais le rapport du cheval et du cavalier quand «chaque cavalier trouve cheval à sa botte, mais peu de chevaux trouvent de cavalier à leurs sabots» («CACH aza Mpunda te»).
Puis en vient à la présentation du Président de la République : «Le petit du léopard reste un léopard; Félix a 90 % de son père, et 10 % de lui-même». En clair, il est comme son père, l’opposant historique, l’opposant de tous les temps, « avec une détermination sans limite». En clair, «que l’on fasse gaffe… ».
Mais, poursuit-il, les crocs du Léopard, c’est ce qui fait la force du carnivore. Or, ces crocs, c’est vous le peuple». Reste Minembwe - le village sur les hauts plateaux du Sud-Kivu désormais érigé en commune, célébré par une cohorte de ministres et autres officiels membres d’institutions nationales au centre d’une polémique.
Sur cette question, il promet à la foule de s’informer d’une manière responsable auprès des instances responsables. Cela ne l’empêche pas d’annoncer un tweet ravageur... Et, «Beni (où il y a des morts chaque jour), Tokolemba te (nous sommes Beni)...»
Très actif et très suivi sur la plateforme sociale Tweter avec des postings atteignant voire dépassant les 1600 likes, cet homme discret qui répugne lumière et mondanités est désormais poussé à la lumière du jour et plonge dans la nostalgie d’une vie passée heureuse quand son ami et complice politique Baudouin Banza Mukalayi Nsungu, né le 2 janvier 1953 à Mbandaka, décédé à Kinshasa le 14 mai 2016, l’appelait révérencieusement «l’homme aux phrases assassines». Les mots peuvent tuer plus que la mort...
Puis, s’adressant à la foule, avant de prendre congé d’elle, le patriarche a ces mots à la bouche : «tout ce que vous m’avez dit va arriver aux oreilles du Président de la République».
T. MATOTU.