Ce fut un putsch
  • ven, 05/01/2018 - 06:27

KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le 31 décembre 2017, ce fut un «coup monté et manqué».
A la Majorité Présidentielle dont le Bureau Politique formé d’une trentaine de membres nommés par le Président de la République, Autorité Morale de la Majorité Présidentielle, et qui ne tient de réunion qu’à sa seule autorisation expresse, s’est réuni jeudi 4 janvier tirant profit de la trêve des confiseurs, la Journée des Martyrs, chômée et payée, il n’y a aucun doute: il y a bien eu, dans le chef des initiateurs de la marche de «sommation», un complot, en clair, une tentative de putsch. Les preuves ne manquent pas et vont devoir être brandies sous peu lors d’une communication de la Police Nationale ou du Procureur Général de la République.
Le responsable de ce «coup monté et manqué» - qui rappelle d’autres dans ce pays, est le bien nommé «ancien Président de l’Assemblée Nationale du Régime Mobutu» - le Haut Conseil de la République-Parlement de Transition, en abrégé HCR-PT - le Cardinal Laurent Monsengwo Pasinya. Archevêque de Kinshasa. Le Cardinal est fin mandat mais «glisse» à son tour et apprécie, quand il en fait des reproches à d’autres, en attendant que le Saint-Père lui trouve un successeur.
Mais son initiative n’a pas connu de succès. Ni Mgr François-Xavier Maroy Rusengo, archevêque de Bukavu, qui en a fait voir des vertes et des pas mûres, ni Mgr Théophile Kaboy, évêque de Goma, ville très engagée avec une colonie Shi dont on connaît l’activisme politique, ni ailleurs dans le pays, ni à Kisangani avec l’archevêque Marcel Utembi, ni à Mbandaka-Bikoro avec l’archevêque Fridolin Ambongo, n’ont rallié l’appel du Comité Laïc de Coordination.
Il se trouve que l’action du CLC voulait au mieux promouvoir l’Accord de la Saint-Sylvestre dont les archevêques Utembi et Ambongo sont les artisans. Pourquoi ces prélats qui auraient dû être prompts à approuver l’action des laics menée par Isidore Ndaywell è Nziem, membre du MSR, Justin Okana, Directeur général limogé de la Régie des Voies Aériennes et Thierry Nlandu Mayamba l’ont-ils de fait désavouée?
Pour nombre de dignitaires de la Majorité Présidentielle, le «puissant Cardinal» - c’est ainsi qu’il est présenté désormais par les medias du monde - a joué en solo. Pourquoi?

COURRIER PATHETIQUE.
Dans un courrier pathétique que des Congolais et autres analystes du Congo, se partagent par milliers depuis le 2 janvier, un «prêtre dévoué et perplexe», s’adresse à son évêque. Comme suit: «Bonjour Baba Askofu (Evêque): «Je viens de lire trois documents de mise au point après la marche dite «des laïcs catholiques» provenant de la Hiérarchie de l’Église et qui me laissent perplexe! L’un provenant de la Nonciature qui se défend de n’avoir ni «approuvé ni désapprouvé» l’initiative de ce «Comité Laïc de Coordination», inconnu jusque là de nos structures ecclésiales. L’autre provenant de la CENCO qui essaie de montrer que nos Pères les Évêques «ne sont pas divisés» malgré le refus de beaucoup d’Évêques de relayer dans leurs diocèses l’initiative politique du fameux «CLC». Le dernier provient du Cardinal archevêque de Kinshasa: un réquisitoire sans merci contre le Pouvoir qui a bafoué la «liberté religieuse», un bilan macabre et catastrophique des manifestations du 31 décembre, un appel à ce que ce «Pouvoir des médiocres» laisse la place... Etc.
Je suis un peu gêné Monseigneur!
1. La CENCO a sorti une exhortation en novembre 2017, nous invitant à nous approprier le calendrier électoral de la CENI par ce titre fort: «Allons aux élections»! Nous avons apprécié!
Comment se fait-il qu’en décembre 2017, les mêmes Évêques puissent laisser un Groupe informel de «Laïcs catholiques» contredire leur message en mobilisant toute la Communauté catholique à marcher pour «demander le départ du pouvoir actuel avant les élections» (mot d’ordre connu - «Transition Sans Kabila», - comme provenant du Rassop-Limete)?
2. À quel moment nos évêques ont-ils décidé d’abandonner leur rôle de «médiateurs» pour devenir «partisans» en choisissant un camp contre parmi les protagonistes qu’ils avaient mis ensemble dans les discussions politiques ayant abouti à l’Accord dit de la Saint-Sylvestre?
3. Des prêtres ont privé les Chrétiens du nombre de messes dominicales ordinaires en la solennité de la «Sainte-Famille» pour suivre un mot d’ordre politique venant de «Laïcs catholiques»!
C’est une première dans la pratique pastorale!
Depuis quand nos fidèles doivent-ils nous distraire de notre devoir pastoral qui est l’édification des âmes pour les accompagner dans leurs revendications politiques partisanes?
4. Monseigneur, nos Églises accueillent des catholiques membres de partis politiques de l’opposition et des fidèles proches du pouvoir!
Comment désormais leur parler d’amour fraternel si nous invitons les uns à sonner, siffler, taper sur les casseroles et à marcher contre les autres? Si nous considérons que ceux de l’opposition sont des Saints et ceux du pouvoir des mécréants, nous devrions logiquement exclure nos Chrétiens proches du pouvoir de la Sainte Communion! Ce qui serait une dérive pastorale gravissime et inimaginable!
Père Évêque, il n‘est pas trop tard pour tenir un discours qui ramène les cœurs à l’apaisement! Ce pays a trop souffert pour que nous en rajoutions!
En lisant les interrogations, certains peuvent me traiter de «pro-Pouvoir», d’indifférent à la misère du Peuple, etc.!
Mais, je me demande: Là où nous avons échoué à ramener les politiciens à la raison par le Dialogue, la Concorde et l’Amour, allons-nous réussir à les convertir par la haine, la grogne populaire, les insultes («médiocres», «sanguinaires», etc.) et en mettant en danger la vie de nos fidèles? Que nous enseigne l’Évangile?
C’est déplorable de voir des Pasteurs qui auraient dû appeler à l’apaisement durcir le discours par des paroles au vitriol et des bilans macabres qui révoltent la conscience! Aucune condamnation par rapport à un groupe informel qui a préféré braver l’interdiction des pouvoirs publics, comme si ceux-ci allaient laisser déferler sur les rues des foules incontrôlées et sans destination définie! Faire de l’Église le bras séculier des politiciens en mal de positionnement est indécent et contraire aux prescrits pastoraux! L’Église protestante a bien fait de garder sa neutralité pour continuer à être interlocutrice! L’Église catholique vient de perdre cette qualité! En acceptant cette infâme qualification de «partisane» (en effet, dans le monde entier, on a su que «l’Eglise catholique a marché pour demander le départ du pouvoir en place» (sic)!, en acceptant donc de prendre parti pour un camp contre l’autre, en laissant un groupe informel ne faisant pas partie de la structure de la CÉNCO engager toute l’Église, en soutenant ce groupe informel de Chrétiens liés à l’opposition et en refusant de le dénoncer, les Évêques ont perdu leur rôle d’arbitres et de médiateurs! Ceci aura des conséquences pastorales graves dans l’avenir! Avec respect et déférence».

LIGNE ROUGE FRANCHIE.
Il n’y a aucun doute que le Cardinal Monsengwo a franchi la ligne rouge. Qualifier les Dirigeants du pays de «médiocres qui doivent dégager» et les services de l’ordre et de sécurité de «barbares», est nouveau. Rarement des telles injures ont été proférées publiquement par un prélat sans que cela ne soit déclarer d’acte de guerre.
Animal blessé, certains s’attendaient au pire quand des listes des personnalités proches du pouvoir et à «éliminer», circulent.
Invité à s’en expliquer sur Radio Vatican interloquée, l’archevêque a donné au monde l’image de la «vierge déflorée». Du genre: «Je célébrais ma messe et voilà qu’armés jusqu’aux dents, ils ont tenté de me donner la mort».
Il pourrait être rejoint par une «note technique» de la Nonciature Apostolique qui dresse un bilan de «la violence dans l’archidiocèse de Kinshasa pendant le 31 décembre 2017». Agressions subies dans les paroisses par les forces de sécurité: 134 (paroisses avec accès des fidèles et célébration des messes entravées: 2; paroisses avec célébration des messes interrompues par les forces de sécurité: 5; paroisses avec des clôtures envahies par les forces de sécurité: 18; paroisses avec enclos perturbés par le lancement de gaz lacrymogène: 10; paroisses avec rapports des décès: 3). Autres dommages signalés. Fidèle catholique décédé par impact des balles: 1 (à Saint-Dominique); autres décès signalés: 4 (2 à Sainte Famille); 2 à Saint-Alphonse. Prêtres arrêtés: 6 (plus un séminariste). Avec ce commentaire: «Les données proviennent des rapports de sources ecclésiastiques sûres au 3 janvier 2018 et sont encore provisoires». A chacun de tirer son enseignement.
T. MATOTU.


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