Au discours du 6 décembre, Yesu Kitenge prend sa canne en ivoire, remet son nœud papillon
  • sam, 12/12/2020 - 12:34

KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1510|VENDREDI 11 DECEMBRE 2020.

Lors des années Mobutu, il se faisait appeler «le Grand Tomatier». Un jour, à la télé, il surprit un co-debater, arrêta la discussion. Il lui avait suffi de dire que lui, Yesu Kitenge Nz., avait mangé tout jeune, chez ses parents, de la tomate crue, que l’homme en face, à l’âge adulte, n’en savait rien du goût. Le lendemain, toute la presse de la ville unanime titrait : «Yesu, le Grand Tomatier»...

LA LANGUE DES SIGNES.
Envoyé Spécial et Représentant Personnel du Président de la République, Yesu Kitenge porte d’autres signes. Nul ne l’a jamais vu en cravate qu’il exècre. Le nœud papillon c’est sa ligne vestimentaire. De même - et ce n’est pas le poids de l’âge, loin de là, il semble l‘avoir hérité des années Mobutu qu’il a combattu, a connu en maintenant sa liberté de parole - il ne se déplace pas sans sa canne à la main...
Est-il à l’initiative des Consultations présidentielles?

Yesu Kitenge - comme tout homme d’Etat - ne donne pas de réponse à ce genre de question. Lui spécialement aime à communique par parabole... Et, en réalité, nul ne sait vraiment ce qu’il pense...
Alors que ses bureaux officiels sont situés dans un quartier excentrique de la Gombe, l’Envoyé Spécial et Représentant Personnel du Président de la République a été des plus actifs au Palais de la Nation - la Présidence de la République - en octobre, novembre et début décembre 2020.

Au sortir d’une consultation avec le Président de la République, des Congolais venus au Palais de la Nation, se faisaient des selfies avec lui, dans les couloirs. L’homme qui aime la langue des signes, c’est loin d’être un hasard. S’il y était c’est clair qu’il est au cœur de l’ouvrage. Comment il en serait autrement!
Le dimanche 6 décembre, c’est le must quand le Président vient présenter aux Congolais les conclusions d’un mois des consultations.

Selon certains, Yesu aurait personnellement conseillé le protocole et veillé à son exécution stricte. Les deux officiers de part et d’autre au salut, l’entrée style martial, c’est lui... La solennité. La grande solennité. La langue des signes. «Le fils du Sphinx est le fils Sphinx. Désormais pleinement dans ses vêtements. Il faut que le monde le sache...».
Dans son discours, le Président ne dit-il pas «Kisalu me banda» (le travail désormais)...
Ce dimanche 6 décembre, lui Yesu y a été vu en nœud papillon - qu’il ne mettait plus depuis belle lurette. Il avait toujours sa canne mais une canne spéciale, une canne en ivoire, outre un costume trois pièces. Le grand jour. La langue des signes.

Cet homme qui, pour ses proches, s’est fixé des objectifs autour du Président de la République vole de succès en succès.

CETTE CHUTE QUI LE COMBLE.
Jeudi 10 décembre, a été l’autre jour de fête avec le déboulonnage de la présidente de l’Assemblée nationale, Jeanine Mabunda Lioko. Il n’avait jamais accepté qu’elle ait tenté de ramener le Président de la République «à son niveau». Sur son compte Twitter @KitengeYesu, il n’y a que ça. Veiller à défendre le Président. Son dernier «la personnalité-garde-robe du moi. Le courage est comme 1 muscle qui prend la force à l’usage.

Gardez le meilleur rejetez le pire. Honorables décidez sans crainte. Dissolution ou pas est votre unique responsabilité. De temps à temps, Félix rappelle les forces tapies dans son cœur». Un texte qui avance vers les 2100 likes, qui a dû booster les votes anti-Mabunda, anti-Kabila, pro-Fatshi.

DEMAIN HUMILIER SYLVESTRE ILUNGA.
Qui ne se rappelle son tweet de «président délégué...» qui ne se trouve ni à la Cité de l’UA, ni au Palais de la Nation mais sans aucun doute au... Palais du Peuple. Où on trouve deux «présidents délégués...». L’autre à la Chambre haute...
Il est trop comblé Yesu Kitenge après la défaite la plus cuisante qu’il vient de faire infliger à la «présidente déléguée» Mabunda - deuxième personnalité de l’État dans l’ordre protocolaire, un vrai dispositif du régime Kabila -, aux FCC, aux PPRD qui n’avaient de cesse que de vanter une «majorité de roc», toute acquise, déterminée et dont les stratégies viennent d’échouer, échec qui ouvre une nouvelle ère au pays. Ils avaient tout entre leurs mains, bloquaient tout, prenaient tout pour eux. Rien pour le peuple...
Que la présidente de chambre ait été destituée par 281 députés présents sur les 500 (il y avait 484 députés dans la salle) c’est la catas politique.

Après avoir critiqué une démarche « illégale », tous les FCC (les PPRD en tête) se sont tous déplacés en masse, prêts à jouer le jeu du rapport de force et déterminés à prouver qu’ils étaient bien «majoritaires». L’ancien ministre Lambert Mende Omalanga l’a dit avant la séance. Parmi ces caciques Kabila : Néhémie Mwilanya Wilondja, la sœur jumelle de l’ancien président Jaynet Kabila, qui préside la commission défense et sécurité à l’Assemblée. Une mobilisation qui n’a pas suffi.
Un résultat, un triomphe de taille pour le Président de la République qui conquiert ou se constitue, sans coup férir, une nouvelle majorité parlementaire.

Ce qui annonce une autre chute : celle du Gouvernement Sylvestre Ilunga Ilunkamba.
Les élus étaient appelés à se prononcer sur plusieurs pétitions réclamant la destitution des membres du bureau - pétitions qui avaient été déposées le samedi 5 décembre et signées par des représentants de différents bords politiques.
Pendant les débats, le député Christophe Mboso Nkodia Puanga, président du bureau d’âge, a eu le plus grand mal à maintenir le calme dans l’hémicycle.

S’interrompant à de nombreuses fois pour réclamer le silence, il a passé outre les demandes des élus FCC qui réclamaient notamment un appel nominal pour vérifier que le quorum était bel et bien atteint.
Dans son discours de dimanche 6 décembre, le Président Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo a regretté d’avoir disposer d’un «Gouvernement de coalition (qui) n’a pas permis de mettre en œuvre le programme pour lequel (il a été) porté à la magistrature suprême, et que d’autre part, (ce gouvernement) n’a pas été capable de répondre aux attentes et aux aspirations de notre peuple».

Jugement terrible pour le Premier ministre... Lundi 7 décembre, le Président de la République a reçu en audience le Premier ministre qu’il n’avait plus vu depuis plus d’un mois après la suspension des conseils des ministres et qu’il n’avait plus jamais rencontré depuis l’incident du refus par le Chef du Gouvernement d’organiser le protocole de prestation de serment des magistrats de la Cour constitutionnelle et, plus grave, son refus d’y prendre part.

Poussé par les caciques de son parti PPRD - en tête le très puissant ancien DirCab de Kabila, Néhémie Wilonya Wilanja - Sylvestre Ilunga Ilunkamba a continué à s’entêter comme jamais rendant la collaboration impossible entre l’Hôtel du Conseil et le Palais de la Nation.

UNE ETAPE DANS LA RECONQUETE.
Parti depuis peu dans son Katanga natal qu’il visite sans cesse sans se rendre ailleurs en province - sauf quelques heures passées dans le Kwango proche et tout récemment dans le Kongo Central où il fut hué par des militants de l’UDPS qui réclamait sa démission - le Premier ministre s’apprête d’ores et déjà à subir l’humiliation d’une Assemblée nationale très remontée.

La pétition anti-Mabunda reprochait à la présidente de l’Assemblée nationale une «gestion opaque » de la caisse de l’Assemblée. Les signataires l’accusaient aussi de s’être « illustrée par des initiatives cavalières, conflictogènes et partisanes », citant notamment son appel au boycott de la prestation de serment des juges de la Cour constitutionnelle, dont le camp Kabila contestait la nomination.

Invitée à prendre la parole, comme chaque membre du bureau mis en cause, elle a dénoncé des « inexactitudes» dans les accusations portées à son encontre, pointant plusieurs contradictions, et conclut son discours en présentant ses excuses aux députés, auxquels elle a demandé de rejeter ces pétitions. Cette nouvelle page qui s’inscrit au Congo est nul doute une étape cruciale dans l’offensive que mène Félix Tshisekedi pour reprendre l’avantage sur le camp Kabila.
D. DADEI.


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