Jusqu’où ira Museveni?
  • jeu, 21/11/2013 - 03:26

Question: à quoi jouent Kampala et clairement, le président Museveni, le maître du pays? Et, à quoi sert cette nouvelle escalade dans une région qui n’a que besoin de paix?

Depuis la défaite suivie de la reddition de la rébellion du mouvement du 23 mars, attestée par le ^communiqué officiel du président de la rébellion Bertrand Bisimwa, informations et déclarations d’officiels font état de bruits de bottes à la frontière ougando-congolaise. Bertrand Bisimwa et le chef militaire du M23, Sultani Makenga ont été accueillis à Kampala, capitale de l’Ouganda sans que personne ne connaisse leur statut et ce pays a tôt fait état de l’arrivée sur son territoire de 1.700 rebelles du M23 défaits.
Alors qu’il est tenu à des engagements stricts dans le cadre de l’accord-cadre d’Addis-Abeba, portant sur la République Démocratique du Congo, signé le 24 février 2013 par les Chefs d’Etat de la sous-région, outre le fait qu’il conduit une médiation délicate dans cette énième crise de la sous-région et se doit, de ce fait, de tenir une posture de neutralité pour ne pas compromettre les chances de réussite de sa médiation, c’est un autre spectacle que Kampala nous envoie. Un jour, il explique qu’il n’est pas un service de la République Démocratique du Congo et en tire comme conclusion qu’il ne saurait renvoyer «ces individus-là» dans leur pays. Un autre, on reçoit confirmation des dirigeants ougandais eux-mêmes que les chefs politique et militaire de la rébellion ont bien été accueillis à Kampala et qu’ils résident dans un «lieu sûr, tenu secret»: que les combattants défaits, arrivés avec armes et bagages, ont été délestés de leurs armes et placés dans un second temps vers le massif du Ruwenzori à la frontière congolaise quand des responsables de la société civile congolaise généralement bien renseignés des déplacements de personnes dans cette région, disent avoir vu le chef militaire du M23 parader à la frontière ougando-congolaise et certainement pas en touriste. C’est à cette frontière que la présence des combattants du M23 a été annoncée…
Question: à quoi jouent Kampala et clairement, le président Museveni, le maître du pays? Et, à quoi sert cette nouvelle escalade dans une région qui n’a que besoin de paix? Au fait que peuvent Kampala et Museveni contre notre pays? Mieux: jusqu’où peuvent-ils aller plus loin dans ce jeu de montée des périls?
Dans la fameuse «annonce de fin de rébellion» en deux paragraphes, Bisimwa paraît assez clair.

QUE PEUT FAIRE KAMPALA CONTRE NOUS?
«La Direction du Mouvement du 23 Mars annonce à l’opinion nationale et internationale qu’elle a décidé à dater de ce jour de mettre un terme à sa rébellion et de poursuivre, par des moyens purement politiques, la recherche des solutions aux causes profondes qui ont présidé à sa création». Puis: «A cet effet, le Chef d’Etat-major Général ainsi que tous les commandants des grandes unités de l’Armée Révolutionnaire Congolaise sont priés de préparer les hommes des troupes au processus de désarmement, démobilisation et réinsertion sociale dont les modalités sont à convenir avec le Gouvernement de la République Démocratique du Congo». Puis: «Fait à Kampala, le 05 Novembre 2013, le Président du Mouvement du 23 Mars, Bertrand Bisimwa».
Dès cet instant, le processus déclenché par la déroute suivie de la reddition, semble s’être bien déroulé. Le nettoyage des zones occupées s’est bien effectué. Des chancelleries étrangères représentées par leurs attachés militaires ont visité les anciens bastions des rebelles. Le pouvoir de l’Etat congolais s’est remis en place avec, après le départ des forces combattantes des zones urbaines, l’arrivée des forces de police pour veiller à la sécurité des personnes et de leurs biens et consolider la paix. Tout baignait dans l’huile hormis certes le rendez-vous manqué de Kampala où la signature au bas du document de fin de guerre n’avait pu être apposée le 11 novembre par aucune des parties à la suite de la contestation par le Gouvernement de la République Démocratique du Congo de l’intitulé du document. Le gouvernement a fait savoir qu’il avait tout approuvé sauf l’intitulé du document. C’est ce qu’on a appelé la «guerre de sémantique» - importante - du point de vue du Gouvernement qui, invoquant sa souveraineté et sa légitimité, n’accepterait pas de signer un «accord» avec une rébellion défaite, inexistante et illégitime mais accepterait de parapher une «déclaration» de fin de guerre… En clair, très peu de choses…
Alors, qu’est-ce qui justifie les fâcheries ougandaises que l’on aperçoit dans les diverses prises de position de Kampala et, surtout, dans ce qui apparaît comme un redéploiement des forces rebelles à la frontière ougandaise? La question vaut la peine d’être posée. Mais, le plus important - le Congo n’étant guère dupe des intentions belliqueuses récurrentes de ses voisins - que peut faire Kampala de plus déterminant contre notre pays? Disons-le: rien. Kampala ne peut rien faire contre nous.
Que de guerres passées contre le Congo, que d’échecs accumulés face à un Congo uni, mobilisé et déterminé d’assumer son destin même si jamais le Congo n’a manqué de traîtres dans ses rangs au service de l’étranger. Mais qu’est-ce que cela a - in fine - donné?
Il y a eu la rébellion de l’Afdl face à un régime Mobutu décadent et honni, qui a gagné. Jamais depuis, une seule rébellion n’a réussi contre notre pays. Ni le RCD, ni le MLC, ni le CNDP, ni - pour couronner le tout - le M23. Ils ont beau ravager tout sur leur passage dans nos territoires riches en minerais rares qu’ils convoitent, ils n’ont jamais terrassé, ni ne terrasseront un pays uni, soudé et fier. Il n’y a pas un habitant dans cette partie orientale convoitée qui ne respire le Congo et, en tout cas pas, plein ses poumons.
Alors, comment Kampala et Museveni feront-ils pour changer la donne? Et, précisément aujourd’hui où notre pays a pris conscience de ses responsabilités et développe le sentiment de révolte et… de puissance! Et, précisément aujourd’hui que le monde a compris les enjeux de cette guerre et a pris l’option de se ranger aux côtés du Congo! Qui n’a pas compris que dans le jeu des relations internationales jamais les amis n’ont été éternels - seuls les intérêts le sont? Quand on voit ce qui se passe dans le monde, nos voisins peuvent-ils jurer que rien ne pourrait jamais les rattraper et aucune juridiction internationale? L’Ouganda plus précisément n’est-il pas déjà dans un contentieux avec notre pays et n’a-t-il jamais perdu bataille, face au Congo, devant une Cour d’arbitrage internationale?
Le Congo qui a fait monter en puissance son armée et sa diplomatie et qui travaille à la cohésion nationale, n’a rien à craindre de ses voisins, lui qui, en dépit de tout, les a toujours tous vaincus par sa force tranquille. Face à l’Afdl, face aux rébellions du RCD, du MLC, du CNDP, c’est l’option nationale, la Maison Congo qui a toujours vaincu.
Il en sera ainsi tant que tous les habitants de ce pays seront et se sentiront Congolais. Ce que Kabila appelle «avoir la passion du Congo». Les 70 millions de Congolais ont tous cette passion du Congo.
T. MATOTU.

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