Washington ne lâche pas le milliardaire israélien Gertler
  • sam, 11/12/2021 - 19:48

KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1541|VENDREDI 10 DÉCEMBRE 2021.

Elles sont tombées. Impossible d'éc-happer longtemps à l'Amérique. Vous avez beau gesticuler, distribuer des cartons d'argent dans des antichambres, dans les groupes de pression, chez les lobbystes, aux médias stipendiés, etc., quand elle t'a condamné, elle t'a condamné. L'Amérique ne lâche pas.

On sait comment réussit à négocier une licence avec l'administration sortante républicaine en obtenant le 15 janvier 2021 l'autorisation d’opérer des transactions en $US et de travailler avec des citoyens américains. Licence révoquée le 8 mars 2021 par le Trésor américain sous administration démocrate.

« La licence précédemment accordée à M. Gertler est incompatible avec les orientations claires de politique étrangère des États-Unis en faveur de la lutte contre la corruption dans le monde, notamment les actions des États-Unis pour lutter contre la corruption et promouvoir la stabilité en République Démocratique du Congo», écrit, le 8 mars, à propos du milliardaire israélien Dan Gertler, le communiqué du bureau du porte-parole du département d’État.

Le texte réaffirme la solidarité des Américains avec le Congo dans la lutte contre la corruption.
« Dans le cadre de notre Partenariat privilégié pour la paix et la prospérité, les États-Unis sont fermement solidaires de nos partenaires de la RDC dans la lutte contre les comportements malveillants qui affaiblissent les institutions et nuisent aux opportunités économiques du pays ».

AU TOUR D’ALAIN MUKONDA MAYANDU.
Prises en décembre 2017 après des accusations selon lesquelles le milliardaire israélien a servi d’intermédiaire dans la vente d'actifs miniers au Congo et qu'il a accumulé des centaines de millions de $US à travers des contrats opaques dans le pays, les sanctions américaines avaient été, peu avant le départ de Donald Trump de la Maison Blanche, étrangement allégées.

Dan Gertler est accusé d'avoir faire perdre «1,36 milliard de $US de recettes fiscales» au Congo dans les années 2010. L'homme qui a toujours réfuté ces accusations avait eu recours à des artifices et agissait par des prête-noms.
Depuis le 6 décembre 2021, l'étau se resserre. L'un de ses prête-noms, un Congolais du nom d'Alain Mukonda Mayandu, est frappé par le Trésor américain. Accusé pour son rôle de soutien auprès de Dan Gertler.

Ce sont 12 entités liées à Mukonda ou à des sociétés qui lui sont associées qui voient leurs comptes gelés après les sanctions de l’OFAC, l’Office of Foreign Assets Control (le bureau de contrôle des actifs étrangers) du département du Trésor américain.

Il s'agit des sociétés basées à Gibraltar (Kintaleg Limited) et au Congo (Ventora Global Services, Ventora Mining S.A.S.U, Ashdale Settlement Gerco SAS, Opera, Palatina SARLU, Gemini S.A.S.U., Kaltona Limited SASU, Multree Limited SASU, Woodford Enterprises Limited SASU, Rosehill DRC SASU).

Quand en 2017, le milliardaire israélien est placé sous sanctions américaines, Mukonda assure le service. Il ouvre plusieurs comptes bancaires et vire plusieurs fois de l’argent sur des comptes détenus indirectement par Dan Gertler.
En seize transactions, ce sont entre 11 et 13,5 millions de $US qui finissent sur les comptes des sociétés appartenant à la famille de l’homme d’affaires israélien. Le prête-nom va plus loin : il redomicilie plusieurs sociétés de Dan Gertler en les établissant désormais au Congo.

Le département du Trésor affirme désormais porter à 46 le nombre d'entreprises et d'individus proches de Dan Gertler placés sous sanctions, et s'engage à soutenir les efforts de lutte contre la corruption au Congo.
« L’Office of Foreign Assets Control du département du Trésor américain a sanctionné un individu, Alain Mukonda, pour avoir apporté son soutien au milliardaire sanctionné Dan Gertler, ainsi qu’à 12 entités liées à Mukonda ou à des sociétés qui lui sont associées en République démocratique du Congo et à Gibraltar.

Mukonda et les 12 entités sont désignées conformément au décret exécutif (EO) 13818, qui s’appuie sur et met en œuvre la loi mondiale Magnitsky sur la responsabilité des droits de l’homme et cible les auteurs d’atteintes graves aux droits humains et de corruption dans le monde », écrit le Trésor américain.

« La corruption permet aux mauvais acteurs d’abuser de leur autorité et d’obtenir des gains injustes au détriment des autres. C’est pourquoi le Trésor américain soutient les autorités congolaises à lutter contre la corruption ».

« Le Trésor s’engage à soutenir les efforts de lutte contre la corruption de la République Démocratique du Congo en poursuivant ceux qui abusent du système politique à des fins économiques et profitent injustement de l’État congolais », surenchérit le secrétaire adjoint au Trésor Wally Adeyemo.

« Le Trésor reconnaît que la corruption alimente l’instabilité et les conflits, et sape les efforts visant à atteindre la croissance économique et l’état de droit nécessaires pour surmonter la fragilité. Nous sommes solidaires du peuple congolais dans ses efforts pour lutter contre ce fléau».

Selon le Trésor américain, cette sanction a été prise en fonction des informations crédibles obtenues par les ONG, Organisations non gouvernementales qui surveillent les violations des droits de l’homme au Congo et dans le monde.
« Pour déterminer s’il y a lieu d’imposer des sanctions, le Trésor prend en compte les informations crédibles obtenues par les organisations non gouvernementales (ONG) qui surveillent les violations des droits de l’homme.

Le Trésor apprécie hautement les informations partagées par les ONG du monde entier pour exposer la corruption et les violations des droits de l’homme, qui peuvent être utilisées pour soutenir et développer des cas comme l’action du Trésor aujourd’hui », écrit le communiqué. Le Trésor américain note que les sanctions sont plus efficaces lorsqu’elles sont coordonnées dans la mesure du possible avec des alliés et des partenaires qui peuvent amplifier l’impact économique et politique.

Selon des sources, c'est un rapport de Global Witness et de la PPLAAF, la Plateforme de Protection des Lanceurs d'Alerte en Afrique, qui est à la base de ces sanctions.

Selon ce rapport, en août 2018, Mukonda avait créé une dizaine de nouvelles entreprises, détenues en réalité par Gerco SAS, contrôlé par l’épouse de Dan Gertler et neuf de leurs enfants.

DOSSIER DE REDRESSEMENT FISCAL.
« Les sanctions du Trésor vont de pair avec les efforts déployés par les partenaires locaux pour lutter contre la corruption, des enquêtes policières sur les acteurs corrompus aux réformes juridiques visant à renforcer des domaines clés tels que l’amélioration de la transparence sur les bénéficiaires effectifs et l’amélioration des processus de passation des marchés publics.

L’action d’aujourd’hui n’aurait pas été possible sans le soutien et la coopération des responsables de la RDC, qui ont fait preuve d’un engagement clair au plus haut niveau pour éradiquer la corruption ».

Directeur Général de «Oil of Congo SA», Alain Mukonda Mayandu a été invité le 10 septembre 2021 au parquet général près la cour d’appel de Kinshasa Gombe.
Une convocation en lien avec ses activités comme représentant de la société de Dan Gertler.
Il s'agissait de «voir clair dans son redressement fiscal ».

«Vous êtes prié de vous présenter à l’Office du parquet général près la cour d’appel de Kinshasa-Gombe, IIème étage du Palais de la Justice, place de l’Indépendance de la Gombe, le vendredi 10 septembre à 10 heures précises, pour des motifs qui vous seront communiqués sur place», écrit l'invitation signée par le substitut du procureur général, Malembe Wankani.

Dans une correspondance datée du 16 juin, le ministère des Hydrocarbures avait informé la société de Dan Gertler de sa décision mettant fin au contrat de partage de production entre le Congo et l’association Caprilcat Ltd ainsi que Foxwhelp Ltd sur les deux blocs pétroliers.

De droit congolais, ces deux sociétés sont affiliées au milliardaire israélien.
Le ministère avait enjoint les deux entreprises de transmettre au gouvernement tous les résultats d’exploration réalisée sur les deux blocs pétroliers.
D. DADEI.


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