- lun, 14/09/2015 - 03:27
La majorité mise face à ses responsabilités. Elle survivra ou elle périra, à elle de choisir.
Comment décrire cette rentrée politique qui s’ouvre mardi 15 septembre comme d’ordinaire avec le retour dans leurs hémicycles des élus des deux Chambres législatives? Bien malin qui saurait prédire.
Voilà des mois que l’opposition réclamait un dialogue avec la majorité. Aussitôt que le Chef de l’Etat a décidé de la recevoir pour l’écouter, elle et le reste de la classe politique (majorité et société civile) afin de dégager les préalables susceptibles de conduire vers ce rendez-vous, c’est pour ne voir franchir sa porte qu’une partie de cette opposition, l’autre et non des moindres (UDPS, MLC, UNC, etc., qui auraient pu constituer des trophées) ayant décliné l’offre tout en réaffirmant tout l’intérêt de l’initiative.
Si un autre courant de l’opposition ayant dit non au dialogue, ce courant (UDPS) accepte néanmoins de rencontrer des émissaires présidentiels hors du pays, à Venise en Italie, puis à Ibiza en Espagne. Que se sont-ils dit? Bien malin qui saurait répondre.
Résultat des courses: à chaque fois qu’un pas est franchi, c’est effectuer trois pas en arrière...
ECHEC DU PRE-DIALOGUE.
Ainsi, alors que l’UDPS reconnaissait publiquement être engagé dans des pourparlers avec le camp présidentiel en vue du dialogue, son Secrétaire général déclarait sur des médias ne pas reconnaître une Institution clé de l’Etat, à savoir la Cour constitutionnelle, «encore moins les actes qu’elle pose». Faut-il un dessin pour décrire le sort qui attendait ce dialogue, si jamais il venait de se tenir? Tous les observateurs faisaient le pari d’un UDPS resté ce parti imprévisible qu’il n’a jamais cessé d’être.
On comprend mieux «le communiqué officiel» de la présidence de l’UDPS tombé dimanche soir à l’heure où Le Soft International allait sous presses, signé le jour même 13 septembre par «Etienne Tshisekedi Wa Mulumba, Président de l’Union pour la Démocratie et le Progrès social, Président élu de la République Démocratique du Congo.
Si ce communiqué demande encore à être authentifié dans un parti où le pouvoir de Tshisekedi est littéralement contesté et où un groupe de personnalités appelle à l’éviction de son leader historique - des journalistes qui ont joint hier tard dans la soirée le siège de l’UDPS à Kinshasa, n’étaient pas en mesure de confirmer l’existence de ce communiqué - ce texte dit avoir «pris acte de l’échec des entretiens de Venise et d’Ibiza ayant mis aux prises ses représentants à ceux du camp Kabila. Qu’Etienne Tshisekedi «a demandé à ses délégués de se retirer dès cet instant de la table des négociations».
Le communiqué poursuit: «Ces entretiens avaient pour but de prédéfinir le format, la thématique et de régler tous les problèmes liés à l’organisation d’un dialogue devant se dérouler à Kinshasa entre les acteurs politiques congolais, sous la facilitation de la communauté internationale en vue de préparer, pour la première fois dans l’histoire de notre pays, une alternance politique et asseoir ainsi les bases d’un Etat de droit et de démocratie».
Puis, rappelant le risque de «mettre en péril les acquis de nos longues années de lutte pour un changement démocratique» et faisant ressortir «les enjeux pour la Nation (...)», le communiqué «lance un appel solennel à toutes les forces politiques et sociales acquises au changement, de s’unir à nous pour poursuivre les objectifs recherchés au travers du dialogue». Ces objectifs sont trois. D’une part, «l’organisation d’un processus électoral crédible et dans un climat apaisé». D’autre part, «l’élaboration d’un calendrier consensuel et qui tienne compte des délais constitutionnels». Enfin, «le transfert pacifique du pouvoir, dans le respect de l’expression de notre peuple».
EST-CE UN COMPLOT?
Député de Kinshasa-Funa, si Ne Mwanda Nsemi né Zacharie Badiengila - un poids lourd mystico-politico-religieux de la province du Kongo Central qui dit avoir eu ses adeptes (ceux de sa secte Bundu dia Kongo) raflés par la police et interdit de se rendre dans sa province, a rejoint de manière spectaculaire les thèses de la majorité présidentielle allant jusqu’à se rendre en tournée au Kongo Central prêcher la parole pro-dialogue qui déboucherait sur une transition de trois ans, un dérapage verbal ouvrira la voie à une déconvenue.
Le gourou sera caillassé par des jeunes remontés dans la ville côtière de Muanda et aura la vie sauve grâce à l’intervention de la police qui organisera son exfiltration.
Retour dans la Capitale, Ne Muanda Nsemi largue ce qui pourrait ressembler à une petite bombe: son retrait de la vie politique et son retrait du dialogue. S’il avait été chargé d’une mission pour humilier le camp présidentiel, il aura à ce jour réussi son coup de la superbe manière. Le gourou explique avoir été victime d’opprobre de la part d’adversaires politiques et, plus grave, avoir été abandonné par la majorité présidentielle!
Dans quel intérêt la majorité aurait-elle à tourner le dos à un opposant d’un tel calibre qui l’aurait rallié? Si Ne Mwanda Nsemi a reçu les flèches les plus acérées de ses propres co-régionnaires, d’aucuns ne s’empêchent pas de voir des indices de conspiration perpétrée contre le camp présidentiel allant jusqu’à évoquer une cinquième colonne tapie dans le centre névralgique de l’Etat avec mission de fragiliser en interne. Et, du coup, voilà que l’opposition se prend des ailes et se met à rêver d’un grand soir quand des rumeurs folles se mettent à courir dans tous les sens contribuant à un vrai blocage au moment même où la frange la plus dure - réunie dans la plate-forme Forces Acquises au changement FAC - prépare un meeting le mardi 15 septembre, soit le jour même de la rentrée parlementaire. Ce meeting qui a été autorisé par la ville de Kinshasa se tiendra à N’Djili, Place Sainte Thérèse, connue pour être un haut-lieu de l’opposition. Que va désormais faire la majorité, elle qui n’a à ce jour guère brillé par sa cohérence et paraît littéralement noyautée? Nul doute, plus que jamais, elle est mise face à ses responsabilités. Elle survivra ou elle périra… A elle de choisir.
D. DADEI.