- lun, 03/12/2012 - 10:00
Il faut sans atermoiement funeste construire la paix mais la crise de Goma impose une lecture qu’il faut assumer. Le Chef de l’Etat s’est engagé ferme. Joseph Kabila Kabange tiendra parole. Il va parler avec les rebelles du M23 qui sont des Congolais et ont des points de vue à faire valoir. Le rendez-vous paraît avoir été pris, le lieu de rencontre fixé, la date dépendrait de l’évolution du processus de normalisation dans le chef-lieu de la ville capitale du Nord-Kivu.
LE SOFT INTERNATIONAL N° 1204 DATE LUNDI 3 DECEMBRE2012
TROIS HEURES DE TETE-ATETE.
Le 24 novembre, le sommet extraordinaire des Chefs d’Etat de la Conférence internationale sur la région des Grands lacs (CIRGL) avait posé le principe d’une rencontre entre le Chef de l’Etat et le M23 en déclarant que le président de la République répondrait aux revendications «légitimes» des rebelles à condition que les insurgés regagnent leurs positions de départ à au moins 20 kms de Goma.
Si les rebelles regagnent leurs positions d’antan sur les collines proches de Goma - ce qu’ils semblent avoir entrepris depuis samedi 1er décembre mis sous pression des puissances occidentales, même s’il restait des détails à régler - Brazzaville, la Capitale sœur du Congo voisin, pourrait accueillir cette rencontre.
Est-ce pour cela que le président Denis Sassou Nguesso s’est rendu à Kigali le 24 novembre, jour même de la tenue du sommet de Kampala, après s’être entretenu avec son homologue Joseph Kabila Kabange et y a rencontré le président Paul Kagame?
Vendredi 30 novembre, à la tête d’une forte délégation comprenant des membres de son Gouvernement - le ministre des Affaires étrangères Basile Ikwele, celui de la Défense Charles-Richard Mondjo, mais aussi Jean-Dominique Okemba, conseiller spécial en matière de sécurité et sa fille Claudia Sassou Lebomba, en charge de la communication - Denis Sassou Nguesso a passé la frontière en survolant en cinq minutes le fleuve par hélicoptère.
Il a été reçu par le Chef de l’Etat au Palais de la Nation, siège de la présidence de la République.
LE DECOMPTE MACABRE.
Au bout de trois heures d’entretien en tête-à-tête, les deux Chefs d’Etat ont publié un communiqué conjoint pressant les rebelles de se retirer des villes de Goma et de Sake, rappelant les décisions du sommet de Kampala, réitérant leur attachement aux conclusions du sommet de Kampala. Selon le communiqué, le président Sassou a informé son homologue des résultats de sa visite à Kigali qui eut lieu le jour du sommet de Kampala.
De toute évidence, le président Sassou se sent fort concerné par cette énième crise des Kivu. Les villes de Brazzaville et de Kinshasa sont les deux Capitales les plus rapprochées du monde - avec tout ce que cela implique du point de vue sécuritaire...
Soutenus par le Rwanda - le fait est avéré, la Grande Bretagne parle d’«informations crédibles et irréfutables», c’est nouveau au point de renoncer à verser une importante aide budgétaire ( plus de 25 millions d’euros) - les rebelles du M23 n’en restent pas moins des citoyens congolais. A Goma, ce fut une bataille décisive qui s’est soldée par des pertes en vie humaine. Depuis le début de cette énième guerre du Kivu, l’heure a peut-être sonné de faire le décompte macabre et d’assumer une lecture de cette crise.
Pourquoi autant de vies humaines fauchées? Qu’est-ce qui est à la base de ce énième conflit armé? Pourquoi en est-on à la troisième occupation de cette ville capitale du Nord-Kivu?
ALLER VERS LA PAIX.
Pourquoi tant de réunions, tant de barzas communautaires n’ont rien donné à ce jour?
Pourquoi tant de compatriotes ont-ils été attirés par le coup de feu et précisément depuis cette province du Nord-Kivu? Pourquoi tant d’argent sorti du Trésor public pour une guerre qui n’en finit pas de commencer?
Pourquoi le Rwanda - et souvent avec l’Ouganda - sont-ils si prompts à tourner leurs armes vers leur voisin occidental ou, à inspirer, des rébellions au Congo?
S’ils s’en défendent, pourquoi le monde entier est-il si convaincu de leur implication? A supposer que ces deux pays n’aient rien à voir avec la petite dernière, pourquoi dans le passé, ces pays ont-ils soutenu des rébellions jusqu’à se disputer la troisième ville du pays, Kisangani?
L’Occident - ou pour reprendre un terme bien de chez nous le monde anglo-saxon - pourquoi les Congolais le voient-ils toujours derrière le Rwanda - et l’Ouganda - dans ces aventures de guerre au Congo?
Il faut tout de suite dire que ce ne sont pas des initiatives de paix qui ont fait défaut à Kinshasa. Non seulement il y a eu la grande palabre de Sun City au lendemain de l’avènement au pouvoir de Joseph Kabila Kabange et qui a abouti au régime 1+4, il y a aussi nombre d’initiatives de paix et de sécurité connues ou inconnues, notamment les réunions de Goma qui, pendant une semaine, en présence du Chef de l’Etat, débatèrent entre compatriotes, de mille questions qui seraient restées sans réponses.
Contrairement à ce que ce professeur Kä Mana - installé dans les Kivu - peut expliquer sur Rfi, en tirant à boulets rouges sur son propre pays pour qui la perte de Goma correspond à une «perte de la bataille de la responsabilité, parce que quand vous analysez la crise actuelle, on se rend compte qu’il manque au niveau du gouvernement du pays, un centre de responsabilité qui nous permette de discuter entre Congolais et de sortir par le haut de cette crise que nous vivons…», sauf à développer un discours «politiquement correct», il est abusif de parler d’absence de responsabilité.
Cela dit, n’est-il pas désormais temps d’aborder courageusement nos problèmes du Kivu? Certes, il est vrai qu’aussi longtemps que les enjeux électoraux et donc «politiciens» resteront ce qu’ils sont, il sera difficile pour certains de voir froidement en face. C’est Joseph Kabila Kabange qui un jour faisait ce distinguo entre «homme d’Etat» et «homme politique», ce dernier étant le premier quidam qui s’exerce dans le métier alors que l’homme d’Etat est celui qui a de la vision, de la perspective, se place au-dessus de la mêlée.
Ce pays doit aller vers la paix, s’engager, sans atermoiement, à la construire. A l’interne mais, aux frontières, au-delà des frontières.
Il est temps de voir avec qui prendre ce départ tant que le casting a été une catastrophe.
Au lendemain de la prise de Goma, nombre ont préféré changer de veste, raser les murs. En attendant «la bonne nouvelle»: celle de la prise de Bukavu avant l’annonce du ralliement...
D. DADEI
LEGENDE :
Brazzaville va certainement abriter des rencontres annoncées entre Kinshasa et le M23. Est-ce qui explique le déplacement vendredi 30 novembre du président Denis Sassou Nguesso à Kinshasa (ici avec son homologue Joseph Kabila Kabange)? Le président Sassou se sent concerné par la crise des Kivu et déploie des efforts. PRESSE PRESIDENTIELLE.