À Bukavu, la reddition d’un agent de l’État tourne en tragédie avec fusillade et mort d’homme
  • lun, 06/11/2017 - 06:36

KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Cela n’arrive qu’à Bukavu, au Sud-Kivu… et, généralement, dans la partie est du pays où pullulent des «forces négatives». Un fonctionnaire de l’Etat relevé de ses fonctions par une mesure administrative régulièrement prise par son chef hiérarchique, en l’occurrence le gouverneur de province, fait de la résistance des jours durant, refuse de faire la remise-reprise avec son successeur désigné et, qui plus est, se réfugie dans une «fortification» quand les forces de sécurité l’appellent à se rendre. Car l’homme, Abbas Kayonga Dada, est un colonel de l’armée, les Forces Armées Congolaises, FARDC en sigle, a retenu sa garde et son escorte armée. Ayant ouvert le feu sur les services de l’ordre venus l’arrêter, il ne se rendra qu’à une unité des forces onusiennes, après échange de coups de feu, «craignant pour sa vie et celle de ses hommes». La capitale du Sud-Kivu s’est réveillée dimanche 5 novembre au son de tirs à l’arme légère et lourde. Les forces de sécurité ont tenté de désarmer la garde du colonel Abbas Kayonga Dada. Le 2 novembre, le chef du Service antifraude du Sud-Kivu, un Tutsi Munyamulenge, a été démis (suspendu) de ses fonctions par le nouveau gouverneur Claude Nyamugabo Bazibuhe et refusait d’obtempérer.

UN CADAVRE D’HOMME.
Peu avant 6h00’ du matin, des tirs à l’arme lourde étaient entendus aux quartiers Nguba et Muhumba dans la commune d’Ibanda.
Des témoins ont fait état de blessés graves et des photos ont été postées sur les réseaux sociaux.
Tout est parti du fait que des agents de l’ordre ont été envoyés vers la résidence d’Abbas Kiyonga pour identifier les personnes armées déployées autour de sa maison et vérifier l’origine des armes que ces hommes détenaient. Un échange des tirs s’en est suivi.
L’ex-patron de l’anti-fraude a été accusé de «manquements graves» par le nouveau gouverneur de la province. Version démentie par Abbas Kayonga. Pour lui, sa mise à pied serait liée à deux saisies récentes qu’il aurait opérées au Sud-Kivu, l’une de bières frauduleuses et l’autre de tourmaline, des pierres semi-précieuses. Un trafic qui, selon ses proches, profiterait au nouveau gouverneur et à son entourage. Un partisan du nouveau chef de l’exécutif provincial a en effet été cité par Rfi, déclarant: «C’est faux. C’est Abbas Kayonga, le grand fraudeur qui a toujours servi les intérêts du Rwanda et de l’ancien gouverneur Marcellin Chissambo».
Ex-ministre des Mines du RCD - la rébellion soutenue, à l’époque, au Rwanda - Kayonga Dada est une figure bien connue et controversée à Bukavu. Dimanche matin, il disait sur Rfi «craindre pour sa vie et celle de ses hommes». D’où son appel à une intervention de la MONUSCO et son refus d’obtempérer.
Près de sa résidence, une église fréquentée par sa communauté Banyamulenge a été pillée dimanche par des jeunes en colère. Plusieurs organisations de la société civile ont appelé la population à éviter de tomber dans piège ethnique. Selon un communiqué officiel du gouverneur Nyamugabo, c’est un «groupe d’insurgés qui a troublé l’ordre public dans la ville de Bukavu», dès le matin. «Le climat est resté tendu jusqu’à 13 heures lorsquye la situation est redevenue calme après la reddition de M. Abbas Kayonga avec 14 hommes à la MONUSCO». «Vers 14h30’, accompagné de 16 de ses complices, il a été remis par la MONUSCO à la disposition de la justice congolaise. Ils sont tous aux arrêts en attendant leur procès qui débutera incessamment». «Au lieu qui lui servait de fortification, un arsenal d’armes de guerre ainsi qu’un cadavre d’homme, ont été trouvés», poursuit le gouverneur précisant que «les agissements de M. Abbas Kayonga et ses comparses sont des actes isolés n’impliquant ni de près ni de loin la paisible communauté Banyamulenge» dont il est issu.
ALUNGA MBUWA.


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