Si Kinshasa était tenté de refuser le visa à Reynders.
  • mar, 26/09/2017 - 08:23

Ce qui l’empêcherait d’inaugurer le nouvel immeuble de son ambassade.
C’est un secret de polichinelle! Rien ne va plus entre Didier Reynders et les officiels congolais. à New York, en marge de la 72ème session de l’Assemblée générale des Nations unies, le président de la République a reçu au New York Palace où il logeait, le Premier ministre Charles Michel en l’absence du chef de la diplomatie belge et de son collègue à la Coopération au développement, Alexander de Croo, également Vice-Premier ministre. La veille, les officiels congolais de la suite présidentielle ont fait fort, expliquant qu’il s’agit d’un rendez-vous «en tête-à-tête», «loin de Didier Reynders» et de quiconque.

Un tête-à-tête à la demande de Kinshasa pour cette entrevue qui a eu lieu vendredi 22 septembre à 18 heures TU dans l’appartement présidentiel du New York Palace en l’absence du chef de la diplomatie congolaise, Léonard She Okitundu. Une rencontre «instructive et utile», écrit l’agence belge Belga citant «l’entourage du Premier ministre belge». Signe qu’il y a échange d’informations et reprise de contacts au plus haut niveau. Charles Michel qui n’a fait aucune déclaration à l’issue de cette entrevue qui a duré une heure et quart, s’est aussitôt dirigé vers l’aéroport où il a embarqué pour la Belgique.
Membre prééminent du parti libéral francophone MR, Didier Reynders a, ces derniers mois, multiplié des postures pro-opposition katumbiste mettant publiquement en cause la légitimité du pouvoir congolais. Son cabinet a encouragé la réunion de Genval, en banlieue bruxelloise, et le Belge s’est fait remettre en priorité au Palais d’Egmont par les organisateurs eux-mêmes, les conclusions de ce conclave présidé par étienne Tshisekedi, financé par le désormais opposant radical, le richissime ex-gouverneur du Katanga, Moïse Katumbi Chapwe.

A Genève, il vitupère.
à Genève, en juin dernier, au Conseil des droits de l’homme, il vitupère sur le régime à la tête du projet européen tendant à mettre en place une commission d’enquête internationale indépendante sur les tragédies du Kasaï, suspectant «hautement» le régime d’être mêlé dans les atrocités et la mort des experts onusiens, allant à l’encontre de la position des officiels congolaise qui ont opposé un farouche refus, soutenus par un groupe africain soudé.
En marge de l’Assemblée générale des Nations Unies, Reynders a fait des «déclarations, faisant monter la tension autour de la réunion du 19 septembre sur le Congo qui devrait, à l’entendre, évaluer l’accord politique du 31 décembre 2016 et envisager une transition sans Kabila au-delà de 2017». Si l’accord de la Saint-Sylvestre conclu avec la médiation des évêques de la CéNCO, était au centre des échanges, la question de la transition n’a jamais été abordée (texte ci-bas).
Soixante-heures avant la venue à New York du chef de l’état congolais, Moïse Katumbi Chapwe et Félix-Antoine Tshilombo Tshisekedi auxquels trois enseignants peu connus à Kinshasa, ont signé et publié un communiqué dans cette ville siège des Nations Unies, faisant état d’une transition «conduite par des personnalités éminentes consensuelles chargées de préparer les élections démocratiques, libres, transparentes et paisibles qui ne sont possibles ni avec M. Kabila, ni avec la Commission électorale Nationale Indépendante dans sa configuration actuelle». Reprenant le propos du chef de la diplomatie belge. Question: qui souffle à l’oreille de qui?
Si le fils Kabila abhorre le Belge à l’entame de la soixantaine «très individualiste», peu chaleureux, «sans conviction», «agnostique», comme il se décrit ou le décrivent ses proches, le président apprécie la candeur dont fait montre le fils de l’ancien Vice-premier ministre, Louis Michel. Tôt, dès le lendemain de l’assassinat de son père, le Mzee Laurent-Désiré Kabila en pleine guerre du RCD-MLC, celui qui n’a pourtant pas la réputation de mâcher ses mots, a pris le dossier Congo en mains, l’a placé à l’agenda de la communauté internationale. Malgré des moments qui n’ont pas toujours été de longs fleuves tranquilles, Louis Michel passe pour un parrain du régime congolais sans nier sa sympathie pour ses amis congolais libéraux. Mais des éclats de voix jugés trop paternalistes n’ont jamais atteint le niveau de ceux d’un de ses prédécesseurs, rue des Quatre-Bras, le libéral flamand Karel de Gucht que concurrence désormais Reynders.
Quand du haut de la tribune des Nations Unies à New York, samedi 23 septembre, Kabila rejette «ingérence extérieure et diktat quelconque» réaffirme la souveraineté de son pays, nul doute, il a en tête ce Belge.
Reste qu’entre Reynders et les Michel, cela n’a toujours pas été du grand amour. Ces dernières années, leurs relations se sont particulièrement détériorées quand Reynders avait été soupçonné de chercher à détrôner le leadership historique des Michel au sein d’un parti libéral francophone, membre de l’actuelle coalition au pouvoir.
L’arrivée en octobre 2014 à la tête de l’exécutif fédéral du jeune premier connu pour avoir battu tous les records de précocité (plus jeune député provincial à 18 ans, plus jeune député fédéral à 24 ans et, dans la foulée, plus jeune ministre wallon, puis, last but not least, plus jeune premier ministre fédéral à 38 ans) n’avait pas été du goût du très rôdé ministre des Finances qui n’a eu de cesse d’occuper le poste avancé des Libéraux comme Vice-premier et affiche des «envies».

Il dénonce Tshibala.
Alors, viendra à Kinshasa dans «les jours ou les mois à venir» comme il le répète où il souhaite inaugurer la nouvelle ambassade à l’architecture peu intégrée, érigée en co-propriété avec les Pays-Bas, boulevard du 30-Juin? Si Kinshasa souhaite se passer d’un hôte encombrant, on ne voit mal comment la diplomatie congolaise refuserait le visa d’entrée à ce Belge - ce qui l’affaiblirait politiquement - mais sans envenimer des relations tendues entre les deux Capitales après l’incident de la suspension par Kinshasa mi-avril 2017 de la coopération militaire belge intervenue après que le même Reynders eût critiqué la nomination par le Président de la République de Bruno Tshibala Nzhenze comme Premier ministre. Rompue au lendemain de la prise du pouvoir par Laurent-Désiré Kabila à la tête de l’ex-rébellion de l’AFDL, cette coopération qui consistait en la formation des officiers congolais, avait été rétablie peu après l’arrivée au pouvoir de Joseph Kabila, n’avait plus été interrompue depuis. Si Reynders a déclaré prendre acte de la nomination de Tshibala, il ne s’était pas empêché de décocher des flèches contre le régime déclarant que «cette désignation s’écarte de la lettre et de l’esprit de l’accord de la Saint-Sylvestre», appelant à mettre en œuvre intégralement cet accord «y compris la levée des restrictions aux lois et liberté». Notant, «comme l’Union Européenne», sa préoccupation, «du fait que «les autorités de transition ne disposent pas du large soutien nécessaire». Menaçant: «Dans ce contexte, et suite à la forte détérioration de la situation sécuritaire et des droits de l’homme, la Belgique se concertera avec ses partenaires internationaux concernant les relations avec la RDC. Elle demande à tous les acteurs de tout faire en vue de permettre l’expression d’opinions de manière pacifique».
à Kinshasa, She dut se fendre d’un communiqué regrettant «qu’en dépit du modus vivendi arrêté de concert avec son homologue congolais sur l’utilisation des canaux diplomatiques comme moyen idoine d’échanges entre les deux gouvernements, le Vice-premier ministre belge ait publié un communiqué non conforme (....) et désobligeant à l’endroit des autorités congolaises relativement à la récente nomination du Premier ministre congolais».
T. Matotu.


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