- jeu, 03/07/2025 - 16:59
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Le Soft International n°1638 | LUNDI 09 JUIN 2025.
C’est fini désormais entre les deux hommes
Donald Trump paraît en avoir marre de son ami Elon Musk. Le président américain l'a menacé dans une interview samedi 7 juin de « très lourdes conséquences » s'il tentait de nuire à des élus républicains et c'est deux jours après leur violente rupture qui a éclaté aux yeux du monde entier. Il a également fait part de son intention de ne plus vouloir adresser la parole à Elon Musk.
L'escalade se poursuit dans les tensions entre les deux hommes. Le président américain a déclaré samedi 7 juin qu'il y aurait des « conséquences graves » si Elon Musk venait à financer des démocrates face aux républicains soutenant le projet de réforme fiscale voulu par le président américain, auquel s'est opposé le milliardaire, une querelle ayant éclaté au grand jour une semaine auparavant. Interrogé sur la possibilité que le richissime entrepreneur finance des candidats démocrates en campagne contre des élus républicains soutenant ce texte, il a répondu à la chaîne NBC : « S'il le fait, il devra en payer les conséquences ». « Il devra faire face à de très lourdes conséquences », a-t-il ajouté.
Bien qu'Elon Musk ait effacé certains des messages qu'il avait publiés jeudi sur le réseau social X dans lequel il se disait favorable à une destitution de Donald Trump ou un autre où il insinuait un lien entre Donald Trump et l'affaire Epstein, le président américain a déclaré qu'il n'avait aucune envie de restaurer sa relation avec Elon Musk. Lorsque la chaîne lui a demandé s'il pensait que sa relation avec le multimilliardaire était terminée, Donald Trump a répondu : « Je suppose que oui ». Il a en outre déclaré qu'il n'avait pas l'intention de s'entretenir avec Elon Musk dans un avenir proche. « Je suis trop occupé avec d'autres choses », a-t-il lancé, avant d'ajouter : « Je n'ai aucune intention de lui parler ».
UN DIVORCE BRUYANT.
Les tensions entre Donald Trump et Elon Musk, l'un des principaux soutiens du président américain dont il a été un temps le conseiller, ont éclaté à propos du vaste projet de réforme fiscale du chef de la Maison Blanche. Le texte, décrit par Donald Trump comme « grand et beau », a été qualifié d'« abomination » par Elon Musk, qui dit craindre - comme certains élus républicains - un alourdissement de la dette publique déjà massive des États-Unis. Cette opposition d'Elon Musk au projet de loi, que Donald Trump dit attribuer à la suppression programmée des crédits d'achat pour les véhicules électriques, a jeté une ombre sur l'adoption du texte par le Congrès, dont les deux chambres sont contrôlées par les républicains avec une majorité étroite. Donald Trump a déclaré samedi sur NBC News être confiant sur l'issue du vote au Congrès, qu'il anticipe d'ici au 4 juillet - jour de la fête nationale américaine.
Après plusieurs jours de tensions, c’est donc la rupture. Un divorce bruyant entre le président et le patron de X et Tesla. Depuis jeudi 5 juin, c'est le grand déballage par réseaux sociaux interposés, avec des menaces de part et d'autre. Face au caractère imprévisible de ces deux personnalités, les médias américains s'interrogent sur la suite des événements.
Qu'en pense Maud Quessard? La directrice Espace Euratlantique-Russie à l’IRSEM, spécialiste de la politique étrangère américaine, également autrice des livres Alliances et politique de pouvoir à l'ère trumpienne (Palgrave MacMillan) et Les guerres de l'information à l'ère numérique, PUF, pense que « ce qui est intéressant dans cette prise de position de Trump, très virulente vis-à-vis de Musk et de SpaceX, c'est davantage la purge qui est à l'œuvre. On a sans doute remarqué qu'un des proches de Musk, Jared Isaacman, milliardaire lui aussi, était candidat à la tête de la Nasa et il a été écarté. Donc davantage que de soutiens financiers, ce sont plutôt des purges que Donald Trump annonce, y compris dans les équipes de Musk. Et ce qui se dessine, ce n'est pas seulement l'affrontement de deux hommes, mais de deux camps, les libertariens soutenus par Musk avec Ron Paul d'un côté et de l'autre les MAGA de toujours comme Trump et le président de la Chambre des représentants qui s'est également positionné contre Elon Musk». Quant aux conséquences que cette division peut avoir au sein du parti républicain, Maud Quessard pense qu'il «peut y avoir des conséquences. Le soutien de Ron Paul, lui, fait partie du Tea Party et qui incarne les libertariens.
On sait que les barons de la tech sont des libertariens convaincus, qu'ils incarnent ce techno-capitalisme nationaliste fortement libertarien. Ça ne concerne pas qu'Elon Musk, mais l'ensemble en fait des grands barons de la tech qui sont venus soutenir Trump. Et ce qui est intéressant, c'est que ces libertariens - un courant finalement minoritaire au sein du Parti républicain - deviennent plus importants avec les barons de la tech. Il y a un point majeur dans leurs opinions et leurs lignes politiques: le budget américain. En cela, ils sont assez cohérents, autant Musk que Ron Paul. Et finalement, dans cette affaire, Musk peut paraître beaucoup moins fou que Trump ne voudrait le dire car s'intéresser au déficit budgétaire américain, qui est extrêmement conséquent puisqu'il atteint à 6,25% du PIB, est un sujet majeur et pourrait créer une division. La question budgétaire et puis celle de la loyauté».
Mais ce budget, pense Maud Quessard, « ne pourrait peut-être pas déstabiliser Trump qui peut paraître inébranlable, mais le contrarier, sans doute. Il appelle ce projet de loi le «Big Beautiful Bill», le très beau projet de loi, comme toujours, c'est comme le « Golden Dome », tout est enrobé d'une rhétorique qui est toujours un petit peu exubérante. Et cela touche aussi toujours à cette personnalité de Donald Trump, particulièrement imbu de lui-même et très susceptible. C'est une ligne de crête que doivent adopter les républicains loyaux pour finalement passer sous le radar des foudres de Trump. Fidèles à leurs convictions et peut-être aux intérêts du pays. Et l'intérêt du pays serait de ne pas creuser davantage le déficit budgétaire. Cela risque de déstabiliser Trump, car lui, il a fait des promesses de campagne et il faut que, avant le 4 juillet, il ait pu tenir ses promesses de campagne et faire passer son « Big Beautiful Bill » avant cette date fatidique pour rester crédible auprès de son électorat MAGA».
Il est vrai qu'«on est dans le battage médiatique. Musk sort des dossiers qui pourraient atteindre le président et peut-être atteindre son électorat. Mais encore, au-delà de ce scandale majeur, ce qui est particulièrement intéressant, c'est ces deux camps qui se forment, dont les MAGA autour de Trump qui vont le soutenir envers et contre tout. Et puis de l'autre côté, les masculinistes blancs, les «TechGuys» qui sont déjà très actifs en ligne pour soutenir Musk. Et là, on voit qu'il y a une fracture, non pas qu’entre deux hommes, mais entre deux courants. Et même sur cette question-là, les masculinistes blancs adeptes de la tech qui soutiennent Musk ont déjà pris position depuis, si on regarde ce qui circule sur X en faveur de Musk. Et ces gens-là sont plutôt des hommes jeunes blancs qui ont fait partie de l'électorat de Trump et des MAGA».