- jeu, 09/07/2015 - 13:12
Au Kongo Central, une plaque tectonique semble s’être déplacée.
Bien que revenu l’avant-veille de l’étranger où il suivait des soins avant de repartir le surlendemain pour reprendre ses soins interrompus, Jacques Mbadu Nsitu a indubitablement réussi sa fête de l’Indépendance célébrée de façon solennelle dans la capitale du Kongo Central en présence du président de la République Joseph Kabila Kabange et de toutes les notabilités du pays - les deux présidents des Chambres Aubin Minaku Ndajandjoku et Léon Kengo wa Dondo -, le Premier ministre Augustin Matata Ponyo Mapon qu’accompagnaient un groupe restreint de membres du gouvernement, des chefs des missions diplomatiques au grand complet, etc.
Le relief accidenté et rugueux fait de collines de la grande ville rocheuse où la navigation maritime accoste, n’a pas empêché le gouverneur de débrouiller un bout de rue nivelé permettant à l’armée, la police et des représentants des forces vives de battre le pavé, deux heures durant.
Arrivés la veille par la route à près de 4 heures de Kinshasa, par le train de la SCTP qui a repris du service et a nécessité 7 heures pour joindre Matadi ou par voie aérienne, les VIP avaient trouvé chacun un lit et un couvert dans les innombrables hôtels à la qualité inégale mais leurs tout-terrain - seuls véhicules capables de défier un relief inhospitalier - ne savaient pas où donner du pneu... Qu’importe! Le 30 juin est un jour de fête qui fait lâcher les Congolais de toute obédience et cette date qui marquait en 2015 le 55ème anniversaire de l’indépendance du pays valait bien le détour.
«VOUS ÊTES AU CONGO».
En dépit d’avenues introuvables - de petites ruelles escarpées sur lesquelles nichent de minuscules baraquements construits les uns sur les autres - la ville est à l’heure de la modernité. L’un des établissements hôteliers qui a accueilli les VIP est certainement Ledya, propriété du richissime homme d’affaires du même nom Lengo Dia Vengo Ledya - qu’aucun manuel de cadres congolais ne connaît hélas! C’est une succession d’immeubles en hauteur s’étendant sur d’innombrables mètres carrés. Autour de sa piscine géante niche une terrasse où un buffet d’accueil fut servi aux convives - ministres et diplomates - la veille du défilé, offert par le Premier ministre Augustin Matata Ponyo. Une terrasse qui fait oublier que vous êtes au... Congo et dans une ville de l’arrière-pays. Le défilé du 30-Juin fit une réussite de l’organisation. Gouverneur du Kongo Central, Jacques Mbadu Nsitu avait choisi un même pagne pour habiller toutes les mamans retenues pour le défilé. Signe de l’unité du pays. Un régal pour l’œil. Tout comme l’idée originale de faire défiler les différentes diasporas des dix autres provinces du pays, chaque groupe arborant en tête une banderole que couvrait un slogan à l’identique... Alors que cette date a été l’occasion pour nombre de provinces d’accueillir un défilé national, c’est la première fois que celui-ci déboulait au Kongo Central, ex-Bas Congo. Et Jacques Mbadu Nsitu s’est fait fort de le signaler dans une allocution retransmise en direct...
L’EFFET NE MWANDA NSEMI.
Le gouverneur en a remercié le Chef de l’Etat Joseph Kabila Kabange pour avoir pris une décision qui ramenait le pays dans la province d’origine du premier président du Congo indépendant, Joseph Kasavubu, l’un des pères de l’indépendance.
Si le Kongo Central est connu comme une province boudeuse - anti-régime, de tous les temps bastion imprenable de l’opposition quoiqu’en pensent les Kimbanguistes, on rappelle combien d’hommes politiques sous la IIème République ont dégagé à toute vitesse la ville sous une pluie de caillasse et on connaît le désamour entre Mobutu et le Mukongo et les scores électoraux du président Kabila en 2006 et 2011 où seul un territoire Yombe, le Tshela fit la différence - tout laisse croire qu’une mue est en train de prendre place.
On sait que la province qui nourrit l’esprit de caste, requiert une justification de descendance avant toute adoption, réclama l’indépendance pour elle-même, a de la répulsion pour l’ailleurs... Celle qui n’a jamais fait le deuil de ses icônes - les grandes familles nobiliaires régnantes (Kasavubu, Kimbaugu-Kisolokele-Diangenda, Diomi, Kanza, Ntumba Ntukadi) et adule les émergents (Kisombe, Nzolantima, Kindwelo, Kiwakana, Lungwana, Mpanu Mpanu, Nimy, etc.) a pourtant fait un triomphe à Kabila. Quand le Chef de l’Etat s’est offert un bain de foule à l’issue du défilé comme à son habitude à chaque fin de manifestation, cris de joie et hululements retentissaient à son passage.
Est-ce l’effet Ne Mwanda Nsemi Badiengila dont la secte Bundu Dia Kongo anti-pouvoir déferla sur le Kongo Central ou le député de l’opposition s’est-il mis en phase avec l’évolution des mentalités dans le pays? Reste qu’en dépit de ses déboires électoraux, Joseph Kabila Kabange, président de tous les Congolais - ceux qui ont voté pour lui ou et ceux qui n’ont pas voté pour lui - ne s’est jamais détourné du Kongo Central où il se rend régulièrement et dispose de fermes agricoles... Ancien professeur de Mathématiques, Physique et Chimie, Ne Mwanda Nsemi s’est distingué par cette phrase prononcée devant les chaînes de télévision après avoir rencontré le Président: «fin de mandat, glissement, élections, tout cela ce sont des mots». L’homme qui ne salue jamais de la main vient de se prononcer publiquement lors d’une conférence de presse pour un glissement permettant - «à tout le monde» - donc à Joseph Kabila de rempiler trois ans après le terme en décembre 2016 de son mandat actuel... Signe que même dans l’ex-Bas Congo, les esprits se mettent à évoluer et que l’opposition pour l’opposition n’est plus à la mode. Au Congo Central c’est comme dans le reste du pays: une plaque tectonique idéologique paraît se déplacer positivement.
T. MATOTU.