Les transports font grand débat au Sénat
  • dim, 17/05/2015 - 13:42

Le débat entamé mercredi 13 mai aura marqué la semaine dernière le Sénat. Ouvert devant deux ministres - celle du Portefeuille Louise Munga Mesozi et son collègue des Transports et Voies de communication Justin Kalumba Mwana Ngongo - il s’est conclu comme le prévoit le règlement intérieur de la Chambre haute par la prise de parole de l’élu à la base de la question généralement un missile. Plus de peur que de mal, le Sénateur (Ind., originaire du Katanga) Flore Musendu Flundu, spécialiste de la question, a proposé deux recommandations notamment la suspension du processus de liquidation de la société de transport aérien LAC. Cette session partie sur les chemins de fer avec la SNCC, a abordé tous les modes de transport dont aérien avec la société LAC (en liquidation) et Congo Airways SA (qui effectue son premier vol dans moins de deux mois, le 30 juin). Elle a été l’occasion - comme il sied - pour les deux ministres d’exposer la politique du Gouvernement dans le secteur et de justifier des décisions d’Etat. Avec ses différentes voies de communication qui impliquent différents modes (ferroviaire, routier, aérien, fluvial, lacustre, maritime, etc.), le secteur des transports est pour un pays ce que sont les veines et les artères dans un corps humain. «Autant celles-ci jouent le rôle vital de pouvoir permettre le transport et les échanges des nutriments à travers le corps, autant les voies de communication sont indispensables à la croissance économique de tout pays», a expliqué vendredi 15 mai, Justin Kalumba Mwana Ngongo.
Ci-après la question du sénateur Flore Musendu Flundu qui a lancé le débat.

Epine dorsale de l’économie nationale, la SNCC est présente dans sept des onze provinces d’antant et devrait permettre notamment:
-l’évacuation des produits agricoles des centres de production vers les centres de consommation;
-l’évacuation pour exportation des produits miniers qui connaissent maintenant un essor considérable:
-un commerce substantiel suite à la mobilité des personnes et de leurs biens.
La SNCC traverse une situation difficile depuis la fermeture de la voie de Benguela depuis quatre décennies et la rupture du trafic minier consécutive à la chute de production du cuivre et par la suite la préférence au transport routier plus souple pour des niveaux de production encore volatiles en son temps. L’état des lieux des Concertations nationales de novembre 2013 avait stigmatisé la faiblesse des infrastructures de transport (f1uviales, ferroviaires, routières). Elles sont le socle de tout élan économique. Si le transport constitue l’un des plus importants défis que le pays est amené à relever pour s’assurer un développement durable, en matière de capacité de transport, de coût par km, de longévité et de sûreté, le rail est préférentiel pour le transport de masse, de gros trafic et de grande distance. Il déplace des grands tonnages, à moindre frais. En dépit de son besoin d’investissement initial très important, le trafic ferroviaire reste compétitif. Si la route transporte en moyenne à un taux de 0,35 USD/TKm, le rail le fait en moyenne à un tarif 3 fois inférieur soit 0,13 USD/TKm. Malheureusement, il est confronté à une forte demande sociale qui le rend souvent non rentable.
Le transport passager seul se fait à perte sur nos lignes de chemin de fer tandis que celui de marchandises couvre juste ses charges. Seul le trafic gros tonnage génère une marge bénéficiaire qui de manière générale contribue à couvrir la perte induite par les autres secteurs qui du reste sont indispensables pour maintenir l’économie dans sa globalité. Il est indispensable que le gros trafic revienne de manière impérieuse au rail. Il lui permettra de générer les ressources nécessaires pour son maintien et son développement. Le saupoudrage par dotation de quelques matériels roulant dont des locomotives du reste de seconde main et non adaptée au réseau, donc avec un coût de maintenance élevée ne résoudra jamais le problème du rail si on ne lui assure pas un trafic important; et dès lors les activités connexes liées au chemin de fer ne pourront qu’en souffrir. D’autre part, le trafic fluvial au Congo reste dans sa globalité interconnecté au ferroviaire. Nous avons retenu avec satisfaction le besoin exprimé pour relancer de manière professionnelle le réseau fluvial; il a besoin de se compléter par le ferroviaire. L’avantage du ferroviaire est essentiellement constitué de la relance du secteur minier qui de manière inévitable en est dépendant. Comment comprendre que le chemin de fer a été florissant quand le pays produisait 450.000 t de cuivre par an et qu’il meure maintenant que l’on produit 600.000 t avec le regard sévèrement braqué sur un million de tonnes. Les effets induits sur l’évacuation des produits agricoles et le transport de personnes et de leurs biens en découleront aisément. D’autre par, les efforts fournis pour la réhabilitation des routes seront vains si l’on continue à y orienter le gros trafic. Les routes telles que faites chez nous ne sont pas aptes à prendre cette charge. Ceux de mauvaise foi diront que le chemin de fer n’a pas la capacité d’absorption de ce trafic important. Ceci n’est pas vrai surtout en ce moment où la voie de Benguela s’ouvre, car les miniers seraient heureux d’acquérir du matériel pour les entreprises ferroviaires et leur trafic engrangerait les marges nécessaires pour la rentabilité du secteur, non seulement sur ce réseau, mais aussi sur celui multimodal dit national.
Aujourd’hui, il est malaisé de parler de l’utilité du chemin de fer et de rappeler une phrase célèbre, celle de Morton Stanley: «Sans chemin de fer, le Congo ne vaut pas un penny».
Pour désengorger le pays et permettre d’évacuer les produits par toutes voies possibles, plusieurs interconnexions ont été mises en place:
-Vers le Sud via les chemins de fer Zambiens (ZRL) par Durban ou Cape Town (South Africa) d’une part ou TAZARA (Tanzania Zambian Railway) pour Dar-Es-Salam;
-Vers l’Est via TRC (Tanzania Railways Company) pour Dar-Es-Salam;
-Vers l’Ouest via le chemin de fer de Benguela pour Lobito (Angola);
-Vers le Nord via le f1euve et la SCPT (ex-ONATRA) pour Matadi.
Suite à des causes exogènes et endogènes - baisse de production minière au pays, longue guerre en Angola, guerres successives, préférence du trafic routier plus souple - ce réseau, posé en 1929 en moyenne, n’a plus bénéficié de support financier conséquent et a atteint un niveau de vétusté généralisé très avancé de l’outil de production aussi bien fixe que roulant. Au cours des quatre dernières décennies, le trafic ferroviaire est passé de trois milliards deux cents millions à trois cent vingt millions d’unités de transport.
Du point de vue de la voie, sur les 3.641 kms du réseau, les rails et traverses ainsi que la caténaire, les sous-stations et les télécommunications sont fortement détériorés et plus de 1.600 km demandent un renouvellement complet. Pourtant la SNCC connaît un manque d’équipements, d’outillages et de pièces de rechange pour refaire cette voie et le stock de matériel est insuffisant pour faire face aux besoins.
Durant la même période, les ouvrages d’art, ponts se sont sévèrement dégradés. Quant au matériel roulant, locomotives, wagon et voitures à voyageurs ainsi que le matériel naviguant, ils sont devenus vétustes et subissent des entretiens inadéquats par insuffisance d’équipements dans les ateliers centraux. Malgré le financement de la Banque Mondiale (près de USD 400 millions), la SNCC reste confrontée à des difficultés énormes et la restructuration de stabilisation engagée avec la firme belge n’a apporté aucun fruit. Toute cette configuration a conduit à la non satisfaction des engagements sociaux par l’entreprise et à la démotivation du personnel qui du reste, bien que constituant une main d’œuvre qualifiée et expérimentée, connaît un vieillissement prononcé avec un âge moyen situé autour de 56 ans et qui nécessite un rajeunissement. La partie Ouest du réseau Sud de la SNCC, dénommée, Réseau Ouestreprend les ouvrages de Tenke à Dilolo et inclut le tronçon Tenke-Lubudi pour raison d’intégration administrative et économique. Ce réseau n’échappe pas à l’état général de l’outil de production de la SNCC. Il a même été parmi les plus affectés avec l’interruption du trafic entre Dilolo et Benguela dont il est tributaire d’une part et d’autre part le niveau de production minier dans l’hinterland minier du Katanga. A ce jour, les deux paramètres conjuguent et l’ouverture du chemin de fer de Benguela ne peut que militer à la réouverture urgente de ce réseau surtout qu’avec le transfert du potentiel minier de Ndola à Kolwezi, il peut bénéficier du transit de la Zambie par la voie Solwezi-Kolwezique votre Gouvernement avait de manière injuste rejetée en son temps.
Du point de vue du tonnage transportable sur ce réseau, une moyenne de 2 milliards d’unités de transport avait été observée sur quinze ans (1984 à 1988) et les perspectives de développement minier et agricole anticipent une réalisation possible du double de ce trafic dès la réouverture. Quant aux travaux de réhabilitation et d’équipement de ce réseau, ils exigent un coût global de USD 660 millions dont le montage financier a indiqué une rentabilité très acceptable.
Daignez éclairer le peuple souverain au travers l’Assemblée Plénière du Sénat sur cette situation qui devrait prendre profit de la réouverture de la voie de Benguela fermée pour quatre décennies en donnant notamment réponse aux préoccupations suivantes:
-1. Pourquoi une politique d’autruche qui ne veut pas remettre de manière impérative le trafic minier au chemin de fer et l’interdire au trafic routier?
-2. Le besoin en financement ne représente que 10% de la production du cuivre. Le Gouvernement manque-t-il tant de «power bargain»?
-3. Pourquoi le Gouvernement privilégie l’axe Kolwezi-Lubumbashi au lieu de celui Kolwezi-Dilolo qui ne peut recevoir aucun train à ce jour et qui marque un caractère urgent de réhabilitation pour ouvrir ce couloir salutaire pour la SNCC et pour la population du point de vue approvisionnement en denrée alimentaire?


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