Ce n’est pas le procès Minembwe qui s’est ouvert mais celui de Ruberwa
  • jeu, 22/10/2020 - 17:44

KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1503|MARDI 20 OCTOBRE 2020.

Une véritable catastrophe de gestion de l’image. Certes, les Congolais réclameraient un match retour contre le Rwanda qui a agressé par deux fois le pays et l’a vaincu par deux fois, sous l’Afdl et Laurent-Désiré Kabila qui a chassé Mobutu le 16 mai 1997 du pouvoir et sous le RCD-Goma et toutes ses tentacules (RCD-KML, RCD-Kisangani, KCD-L, etc.) qui ont donné la mort certes à élucider au président du pays Laurent-Désiré Kabila le 16 janvier 2001 mais la question de Minembwe est trop mal tombée pour Azarias Ruberwa Manywa.

CE LANGAGE
DES SIGNES QUI PREVAUT TOUJOURS.

En politique, c’est le langage des signes qui prévaut toujours. Le ministre a beau s’expliquer avec brillance et des heures durant - « ma mission (à Minembwe) était nationale, et je l’ai exécutée en âme et conscience ; il n’est pas juste qu’un ministre que je suis au niveau national réponde des actes posés en présence du gouverneur, par le ministre compétent qui a la question dans ses attributions» -; il a beau montrer sa bonne foi, des heures durant - «pour ce qui est de la balkanisation, il s’agit d’une accusation sans fondement; je ne me reconnais ni de près, ni de loin dans ce concept ; dans tous les cas, à mon égard, il s’agit d’une pure invention; il n’y a pas eu de députés nationaux, ou des ministres au niveau national, qui soient partis pour l’installation du bourgmestre; ils n’ont pas procédé à l’installation, à moins d’extraire le terme coïncidence de la race humaine ».

Que cela soit devant la représentation nationale comme cela l’a été lundi 19 octobre à la suite de l’interpellation (question orale avec débat) du député d’opposition lamukiste proche de l’ex-gouverneur du Katanga Moïse Katumbi Chapwe, élu du Nord Kivu, Muhindo Nzangi Butondo, devant les partis de la plateforme FCC, devant ses collègues ministres du Gouvernement Sylvestre Ilunga Ilunkamba, devant mille médias, radios, télévisions, sites en lignes congolais et étrangers, sur YouToube, etc., comment croire lorsqu’il s’agit de celui qui, quand ses rébellions Afdl et RCD avaient franchi la frontière congolaise par Gisenyi vers Goma ou par Cyangugu vers Bukavu, disait qu’il n’en était absolument rien, que tout cela était de la simple mystification congolaise?
Dans ce nouveau débat qui fait rage, n’a-t-il pas compris qu’il ne s’agit ni de Minembwe, ni des Banyamulenge, ni des Tutsis congolais, mais de lui?

L’EXCEPTIONNELLE
LONGEVITE POLITIQUE DE RUBERWA.

Celui qui dirigea l’une des vice-présidences du régime 1+4 quand trois de ses collègues sont aujourd’hui des has been, ont quitté la scène et la terre - Abdoulaye Yerodia Ndombasi, Arthur Z’Ahidi Ngoma mais aussi Jean-Pierre Bemba Gombo, celui-ci mis hors circuit politique par la CPI où il passa 10 ans pour des crimes de guerre perpétrés en Centrafrique - comment expliquer, justifier, la résilience, mieux, l’exceptionnelle longévité politique de Ruberwa?

Résiste-t-il en politique de droit - du fait de son poids politique au Congo mais lequel poids politique, celui des armes? - ou du fait d’être issu d’une minorité ethnique bannie - mais bannie par qui donc et où, au Congo ? - et cela serait écrit dans quel texte de loi ? Alors que nombre de ses collègues membres du FCC, le Front commun pour le Congo, vivent d’aumône quand le débat fait rage au sein de la plateforme politique kabiliste sur la gestion des ressources humaines et sur des poids décernés à la tête du client, comment expliquer le grand train de vie que mène Me Azarias Ruberwa Manywa, né le 20 août 1964 à Gisenyi, district de Rubavu, au Rwanda, diplômé de droit de l’Université de Lubumbashi en 1989, inscrit au barreau de Lubumbashi le 7 août 1990, Vice-président du pays en charge de la Commission politique, défense et sécurité de juin 2003 à décembre 2006, candidat Président de la République en 2006, présent dans tous les cénacles politiques nationaux, dans le très fermé Comité de suivi des accords FCC-CACH dont il serait l’un des gardiens du temple et pourquoi?

N’a-t-il pas profité de cet éternel statut pour jouer de l’influence et réquisitionner qui il veut, ministre de la Défense, Gouverneur de province, officiers de l’armée voire le chef d’état-major des forces armées et, pire, des diplomates étrangers dont le plus emblématique de Kinshasa, l’Américain Mike «Nzita» Hammer?

Comment expliquer que le poste au Gouvernement qui lui reviendrait de droit serait celui de ... la Décentralisation et des Réformes institutionnelles mais ce poste inamovible n’est-il pas en soi hautement suspect? Comment le membre d’une ethnie révendicative et, aux yeux de certains de ses corégionnaires, vindicative, peut-il se trouver des années durant à la tête d’un ministère de la Décentralisation et des Réformes institutionnelles comme si celui-ci avait été créé pour lui?

N’est-ce pas un message envoyé au pays, au monde, à l’Histoire que cet homme a mission de régler la question de sa communauté et, en même temps, comment ne pas comprendre ceux qui lui font le procès - en premier ses covoyageurs - disent qu’il les aurait piégés en faisant coïncider leur passage sur les Hauts Plateaux au sien, dans ce Sud-Kivu qui s’est toujours déchiré à chaque fois qu’approchent des échéances électorales, réel enjeu politique à l’Est?

LE RAPPORT MAPPING PORTE PAR LE PRIX NOBEL DENIS MUKWEGE.
C’est vrai, le hasard n’a jamais existé. Il n’y a donc pas que la petite commune rurale de Minembwe qui fait parler d’elle. Voilà qu’est ressuscité le Rapport Mapping, un document de plus de 550 pages du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme consacré aux violations les plus graves des droits de l’homme et du droit international humanitaire commises au Congo par des armées étrangères dont celle du Rwanda qui s’en défend à considérer les dénégations de l’ambassadeur du Rwanda à Kinshasa, Vincent Karega qui font encore défiler des grappes humaines dans nos villes et même à Kinshasa gênant le réchauffement récent des relations entre Kinshasa et Kigali.

Ces violations auraient été commises entre mars 1993 et juin 2003. Le rapport comprend une description de 617 incidents violents survenus dans le pays, crimes de guerre, crimes contre l’humanité, violations du droit humanitaire international, qui appellent à des poursuites judiciaires, selon les Nations Unies alors que l’impunité persiste. Un rapport qui a trouvé un parrain, le Prix Nobel de la paix, le célèbre gynécologue Denis Mukwege de l’hôpital Panzi, Sud-Kivu.

Difficile de prédire le sort de Ruberwa et nul ne sait ce qui va lui arriver au Parlement. Ce dont il faut être sûr en revanche est que le ministre a déjà perdu la bataille de l’image, que la sanction qui lui sera infligée sera politique, non juridique.
ALUNGA MBUWA.


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